L'honorable Barbara Baird

Justice-Barbara-Baird-xx.jpgQUEL A ÉTÉ VOTRE CHEMINEMENT DANS LE MONDE DU DROIT ET DE LA MAGISTRATURE?

En Ă©crivant ces lignes, je rĂ©flĂ©chis au fait que j’ai Ă©tĂ© admise au Barreau du Nouveau-Brunswick en juin 1976 et qu’aujourd’hui, soit 46 ans plus tard, je suis devenue juge surnumĂ©raire Ă  la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick. Comment est-ce arrivĂ©?

Je dirais : non sans beaucoup de travail acharnĂ© et d’engagement envers la profession.

Comme d’autres qui ont partagĂ© leur histoire, j’ai dĂ©cidĂ© que je voulais devenir avocate quand j’avais environ 14 ans. Personne d’autre dans notre famille d’ingĂ©nieurs, de mĂ©decins et de scientifiques n’avait poursuivi une telle carriĂšre, et il y avait trĂšs peu, voire aucune, avocate en exercice au Nouveau-Brunswick Ă  cette Ă©poque. Ce n’Ă©tait pas un choix populaire. Nous vivions encore Ă  une Ă©poque oĂč les femmes devenaient femmes au foyer, institutrices, infirmiĂšres ou secrĂ©taires.

Nous Ă©tions environ neuf, si je me souviens bien, dans notre classe de droit d’environ 65 personnes. Mon chiffre n’est peut-ĂȘtre pas prĂ©cis, mais nous Ă©tions assurĂ©ment en minoritĂ©. Je me suis prĂ©parĂ©e pour ce choix de carriĂšre en participant au club de dĂ©bats et en m’impliquant dans la politique Ă©tudiante, tant Ă  l’Ă©cole secondaire qu’Ă  l’UniversitĂ© du Nouveau-Brunswick, et j’ai fait du bĂ©nĂ©volat auprĂšs d’organismes communautaires. Pendant mes Ă©tudes de droit, j’ai travaillĂ© Ă  la clinique d’aide juridique communautaire, et j’ai occupĂ© deux emplois Ă  temps partiel. Ces expĂ©riences m’ont appris des choses sur le monde rĂ©el et l’expĂ©rience humaine que j’ai emportĂ©es avec moi dans la pratique privĂ©e et au-delĂ . L’exercice du droit consiste Ă  aider les autres Ă  rĂ©soudre leurs problĂšmes personnels et financiers, en leur donnant les meilleurs conseils possibles, sans trop rechercher « la gloire et la fortune ».

J’ai commencĂ© ma carriĂšre d’avocate Ă  Saint John dans un grand cabinet multidisciplinaire. J’avais toujours voulu ĂȘtre dans la salle d’audience. J’ai donc rejoint le service des litiges et j’ai rapidement Ă©tĂ© plongĂ©e dans le grand bain des affaires que le cabinet traitait en permanence – poursuites pĂ©nales, procĂ©dures civiles liĂ©es Ă  un accident de la route, fautes mĂ©dicales, violations de contrat, etc. J’ai rĂ©digĂ© des plaidoiries, participĂ© Ă  des enquĂȘtes prĂ©alables et agi Ă  titre d’avocate en second lors de procĂšs. Cette expĂ©rience pratique a jetĂ© les bases d’une carriĂšre fructueuse dans les tribunaux du Nouveau-Brunswick, Ă  tous les niveaux.

Mon mari et moi avons tous deux obtenu une maĂźtrise en droit Ă  la London School of Economics alors que nos deux enfants avaient 4 et 3 ans. Il a fallu pour cela quitter le Canada, vivre Ă  Londres, puis revenir pour reprendre lĂ  oĂč nous nous Ă©tions arrĂȘtĂ©s. J’encourage les jeunes juristes Ă  poursuivre des Ă©tudes supĂ©rieures. Non seulement une maĂźtrise est gratifiante, mais elle vous distingue du « reste de la classe » et vous ouvre plus de possibilitĂ©s. AprĂšs nos Ă©tudes supĂ©rieures, nous avons dĂ©mĂ©nagĂ© Ă  Fredericton et sommes tous deux entrĂ©s dans des cabinets. Je suis ensuite devenue registraire adjointe de la Cour d’appel, puis directrice des Services judiciaires du ministĂšre de la Justice du Nouveau-Brunswick. Ça me convenait beaucoup mieux, Ă©tant donnĂ© les exigences de la carriĂšre et de la famille. J’ai repris la pratique privĂ©e quelques annĂ©es plus tard, car c’Ă©tait ma passion.

Pour finir, j’ai Ă©tĂ© nommĂ©e Ă  la Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick en 2007, puis Ă  la Cour d’appel en 2015.

QUELLE EXPÉRIENCE DE VOTRE CARRIÈRE JURIDIQUE VOUS A LE MIEUX PRÉPARÉE À VOTRE TRAVAIL AU SEIN DE LA MAGISTRATURE?

Trouver un Ă©quilibre entre la carriĂšre et la famille peut ĂȘtre difficile. Il m’est souvent arrivĂ© de travailler jusqu’Ă  minuit Ă  prĂ©parer mes dossiers, longtemps aprĂšs que les enfants aient Ă©tĂ© mis au lit. Il faut mĂ©nager ses forces. La vie sociale passe au second plan, en raison des contraintes de temps. Il faut avoir un soutien pour la garde des enfants. Et il faut prendre soin de soi-mĂȘme, prendre le temps de se ressourcer, de faire de l’exercice et de manger correctement, pour avoir l’Ă©nergie de passer Ă  travers ces longues journĂ©es. Un procĂšs est dĂ©vorant et nĂ©cessite une prĂ©paration et une concentration intenses. J’ai couru mon premier et unique marathon Ă  50 ans et je fais toujours de l’exercice rĂ©guliĂšrement. Il faut ĂȘtre en bonne condition physique et mentale pour garder le rythme.

Si vous n’ĂȘtes pas heureuse dans ce que vous faites, allez voir ailleurs. Vous devez avoir la conviction d’avoir fait le bon choix et d’ĂȘtre en mesure d’offrir le meilleur service possible Ă  vos clients. Si vous n’ĂȘtes pas heureuse, ou si vous n’ĂȘtes pas stimulĂ©e, cherchez quelque chose qui vous convient mieux.