Dans une lettre transmise au ministre de la Justice David Lametti (disponible uniquement en anglais; les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions), trois sections de l’Association du Barreau canadien appuient la crĂ©ation d’une commission forte et indĂ©pendante ayant pour mandat de rectifier les condamnations injustifiĂ©es et commentent certaines recommandations du rapport LaForme–Westmoreland-TraorĂ© sur le projet d’une Commission sur les erreurs judiciaires.
Cette lettre, rĂ©digĂ©e par la Section du droit pĂ©nal, la Section sur le droit des enfants et la Section de la communautĂ© sur l’orientation et l’identitĂ© sexuelles, doit ĂŞtre lue conjointement avec un mĂ©moire antĂ©rieur (disponible lui aussi uniquement en anglais) qui commentait l’ensemble des recommandations.
Recommandation numéro 5
La recommandation numĂ©ro 5 du rapport propose « qu’un tiers des commissaires aient une expertise concernant les causes et les consĂ©quences des erreurs judiciaires, qu’un tiers soient qualifiĂ©s en tant qu’avocats et qu’un tiers reprĂ©sente des groupes qui sont surreprĂ©sentĂ©s en prison et dĂ©savantagĂ©s en ce qui touche leur quĂŞte de rĂ©paration ». Elle propose Ă©galement qu’il y ait au moins un commissaire autochtone et un commissaire noir. Les sections de l’ABC approuvent dans l’ensemble cette recommandation, tout en ajoutant que ces juristes devraient ĂŞtre spĂ©cialisĂ©s en droit pĂ©nal et que les non-juristes devraient ĂŞtre des experts en condamnations injustifiĂ©es.
Concernant la question de la diversitĂ©, les sections de l’ABC confirment la nĂ©cessitĂ© d’une telle disposition, mais craignent qu’un quota fixe soit contre-productif. « PlutĂ´t que d’arrĂŞter un nombre dĂ©terminĂ©, il vaudrait mieux que la Commission reflète la diversitĂ© de la sociĂ©tĂ© canadienne. Lors des nominations, les groupes traditionnellement dĂ©favorisĂ©s qui ont historiquement souffert d’erreurs judiciaires, ainsi que les groupes socialement dĂ©favorisĂ©s, devraient ĂŞtre reprĂ©sentĂ©s. »
Recommandation numéro 18
La recommandation numĂ©ro 18 demande « que le cĹ“ur de la structure lĂ©gislative de la commission soit le souci de l’Ă©galitĂ© vĂ©ritable et la lutte contre la discrimination systĂ©mique et le colonialisme », et que des obligations claires et complètes soient prĂ©vues en matière de rapports. Les sections de l’ABC approuvent cet engagement envers l’Ă©galitĂ© vĂ©ritable, mais prĂ©viennent que des ressources adĂ©quates doivent ĂŞtre allouĂ©es pour tenir compte de la diversitĂ© linguistique et de l’ensemble des droits constitutionnels.
Ces ressources sont essentielles pour « s’assurer que personne ne subit une erreur judiciaire fondĂ©e sur une incapacitĂ© Ă communiquer. Une tentative raisonnable n’est pas une norme acceptable lorsqu’il s’agit d’erreur judiciaire ». Les droits constitutionnels devraient guider l’allocation des ressources, ajoutent les sections. « Il est inacceptable que la sociĂ©tĂ© canadienne permette que des condamnations injustifiĂ©es soient maintenues parce que le gouvernement n’est pas prĂŞt Ă engager des ressources suffisantes pour que justice soit faite. »
Recommandation numéro 25
La recommandation numĂ©ro 25 accorderait Ă la Commission le pouvoir d’effectuer un travail systĂ©mique pour prĂ©venir les erreurs judiciaires. Les sections de l’ABC appuient entièrement cette recommandation. Les problèmes systĂ©miques sont par dĂ©finition difficiles Ă identifier et Ă rĂ©soudre par l’intermĂ©diaire de cas individuels. Comme la Commission traitera les causes des condamnations injustifiĂ©es dans le cadre de cas individuels, il faudra « lui permettre de dĂ©velopper une expertise et une base de connaissances qui pourra servir au travail de rĂ©forme du droit dans ce domaine ».
Recommandation numéro 26
La recommandation numĂ©ro 26 propose que la Commission « soit proactive et fournisse des informations et un soutien aux demandeurs et demandeurs potentiels ». Les sections de l’ABC appuient pleinement cette approche, qui « permettra Ă la Commission de desservir ceux et celles qui en ont vraiment besoin. Elle offrira Ă©galement un mĂ©canisme pour dĂ©couvrir les erreurs judiciaires qui, autrement, ne seraient pas portĂ©es Ă l’attention de la Commission ».
Recommandation numéro 50
La recommandation numĂ©ro 50 du rapport permettrait Ă la Commission de « fournir de l’aide pour la rĂ©intĂ©gration des demandeurs, et ce, pendant le processus de demande et après qu’ils aient Ă©tĂ© libĂ©rĂ©s ou que leur condamnation ait Ă©tĂ© annulĂ©e ». Cette aide devrait figurer dans la loi et ĂŞtre adĂ©quatement financĂ©e, selon les sections de l’ABC.
Les sections soulignent que « les condamnations pĂ©nales sĂ©vères ont gĂ©nĂ©ralement un effet stigmatisant et isolant ». La rĂ©intĂ©gration de ces personnes peut reprĂ©senter un dĂ©fi de taille, surtout si elles sont incarcĂ©rĂ©es depuis de nombreuses annĂ©es. Par ailleurs, les condamnations injustifiĂ©es n’affectent pas que les demandeurs : elles affectent aussi leur famille et leur communautĂ©. C’est pourquoi la Commission « devrait jouer un rĂ´le proactif dans la rĂ©intĂ©gration des demandeurs et des personnes exonĂ©rĂ©es pour les aider Ă refaire leur vie », concluent les sections de l’ABC.