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Une évaluation des répercussions sur les droits de l’enfant (ERDE) est un outil grâce auquel les politiques et les mesures législatives peuvent être conformes au paragraphe 99 de l’Observation générale no 14 du Conseil des droits de l’enfant. Il s’agit d’un outil qui :
- perçoit les enfants comme des titulaires actifs de droits plutôt que comme des bénéficiaires passifs de mesures prises par des adultes;
- prédit l’incidence de politiques proposées, de lois, de règlements, de décisions budgétaires, administratives ou autres sur les enfants et le plein exercice de leurs droits;
- surveille et évalue de manière continue les répercussions des mesures prises sur les droits de l’enfant;
- s’incorpore aux processus gouvernementaux à tous les niveaux, le plus tôt possible et de manière continue, lors de l’élaboration de politiques ou d’autres mesures générales aux fins d’une bonne gouvernance des droits de l’enfant;
- maximise les répercussions positives ou atténue les répercussions négatives sur les droits et le bien-être de l’enfant. (Observation générale no 14 du Conseil des droits de l’enfant – Droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale (paragraphe 35)
Le Comité des droits de l’enfant a fait, à maintes reprises, la promotion de l’utilisation d’une ERDE en tant que mesure générale de la mise en œuvre des droits de l’enfant. À l’instar d’une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée ou d’une évaluation des répercussions sur l’environnement, une ERDE est une méthodologie et un outil de prise de décisions qui contribuent à fournir une assurance de la qualité relativement à la mise en œuvre des droits de l’enfant dans d’importantes propositions de politiques ou de questions législatives ou de réforme du droit. Une ERDE aide également à s’assurer que des politiques publiques ou des décisions législatives existantes ou proposées se conforment de manière générale à la Convention. L’outil aide les décideurs à cerner les répercussions positives ou négatives, prévues ou non prévues, directes ou indirectes, à court terme ou à long terme.
La présomption réfutable du Canada selon laquelle les lois nationales se conforment à ses obligations internationales issues de traités appuie l’utilisation d’une ERDE. La connaissance de cet outil et de la manière dont il influe sur la prise de décisions et les mesures législatives peuvent aider les professionnels du droit à faire valoir des arguments et à présenter des enjeux devant des tribunaux aux fins d’une meilleure application des droits de l’enfant. Par ailleurs, l’utilisation d’une ERDE peut appuyer le rôle d’un avocat lors d’une prise de décisions concernant la manière dont une analyse fondée sur les droits de l’enfant peut et doit influencer le processus législatif.
Qu’est-ce qu’une ERDE et que fait-elle?
- C’est un outil permettant d’évaluer et d’examiner les répercussions potentielles des lois, des politiques et des programmes, existants ou proposés, ainsi que des décisions sur les enfants et leurs droits.
- Elle utilise la Convention comme cadre pour évaluer les répercussions positives ou négatives, prévues ou non prévues, directes ou indirectes, à court terme ou à long terme.
- Une ERDE est différente d’une évaluation des répercussions sur l’enfant, puisqu’elle utilise le cadre de la Convention et reconnaît les enfants en tant que titulaires actifs de droits plutôt que comme des bénéficiaires passifs de mesures prises par des adultes.
- Elle a pour but de comprendre comment l’affaire évaluée contribuera ou nuira au plein exercice des droits de l’enfant et à son bien-être de manière à ce que les répercussions positives soient maximisées et que les répercussions négatives soient évitées ou, à tout le moins, atténuées.
Trois étapes pour faire une ERDE
Une ERDE doit être simple et significative. L’UNICEF - utilise trois étapes de base pour examiner des mesures ou des décisions proposées ou existantes :
- Faire une sélection préliminaire et analyser la portée de l’évaluation
- cerner ce qui peut être évalué et ce qui sera évalué
- examiner des groupes de droits en vertu de la Convention pour simplifier le processus
- si une loi ou une politique existe déjà, l’ERDE peut être conçue comme un processus de surveillance et d’évaluation afin de cerner les effets et les répercussions inattendues sur les enfants
- Évaluer
- Analyser les lois, les politiques ou la réglementation et cerner les répercussions potentielles sur les enfants à partir de diverses sources comme la documentation universitaire, des experts (y compris des enfants et des organisations de la société civile), la jurisprudence, les observations générales et les observations finales du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies
- Utiliser différents outils, tout dépendamment du calendrier d’exécution et de la profondeur de l’analyse, tels que la modélisation détaillée des répercussions potentielles sur les enfants
- Mobiliser les ministères concernés, responsables des politiques ou des lois en cause
- Évaluer les principaux droits de l’enfant en jeu :
- les quatre principes directeurs de la Convention : la non-discrimination; l’intérêt supérieur de l’enfant; le droit inhérent à la vie, la survie et le développement de l’enfant; et la participation *(articles 2, 3, 6 et 12)
- d’autres articles pertinents de la Convention cernés durant le processus de sélection préliminaire
- Formuler des recommandations (en partenariat avec des ministères clés ou des ordres de gouvernement concernés par l’élaboration et la mise en œuvre de la politique); établir des modifications potentielles, des améliorations ou des politiques de rechange afin de répondre à toute préoccupation qui pourrait être soulevée durant le processus de l’ERDE.
- Communiquer
- Publiciser et communiquer les résultats de l’ERDE, ainsi que les recommandations afin d’influencer le processus de prise de décisions, d’encourager l’appropriation des résultats et de favoriser la transparence
- Communiquer à l’interne ou à l’externe avec le gouvernement de manière coordonnée, le plus possible, en fonction du stade du processus de la prise de décisions ou de la mesure
Droit international
- Articles 4 et 42 de la Convention : Les rôles du Canada, des provinces et des territoires en lien avec les mesures générales de la mise en œuvre des droits de l’enfant
Sources d’interprétation
- Observation générale no 5 et Observation générale no 14 du Comité des droits de l’enfant [lien vers les observations générales en vertu des principes fondamentaux]
- Observations finales sur les troisième et quatrième rapports périodiques du Canada, soumis en un seul document, adoptées par le Comité des droits de l’enfant (décembre 2012)
- Modèles d’ERDE ailleurs dans le monde : Flandre (Belgique); Écosse; Irlande du Nord; Suède; pays de Galles; Australie-Occidentale; Nouvelle-Zélande
Exemple de cas
L’ERDE et le projet de loi sur les victimes et les témoins en Écosse
- Le gouvernement écossais a présenté un projet de loi visant à aider les victimes et les témoins en lien avec une enquête ou une procédure criminelle et à créer un forum national pour les enfants confiés à des adultes ou placés en institution.
- Une des dispositions du projet de loi prévoyait que les déclarations d’une victime âgée de moins de 14 ans soient faites par une personne prenant soin de l’enfant.
- L’ERDE a mis l’accent sur les paragraphes 3(1) (intérêt supérieur de l’enfant) et 12(1) (participation) de la Convention et a estimé que la disposition violait le paragraphe 12(1), en plus d’être incompatible avec l’Age of Legal Capacity Act (Écosse, 1991), loi en vertu de laquelle une personne âgée de 12 ans ou plus possède la capacité de tester, y compris la capacité juridique d’exercer un pouvoir de nomination au moyen d’un document testamentaire.
- Des recommandations ont été formulées dans l’ERDE visant à renforcer le projet de loi, notamment en abaissant l’âge de 14 ans à 12 ans.
Droit canadien
Les ERDE sont relativement nouvelles au Canada, mais elles ont été utilisées par tous les ordres de gouvernement, ainsi qu’au Nouveau-Brunswick, en Saskatchewan et en Nouvelle-Écosse, alors que des initiatives ont été entreprises au Québec, en Ontario, en Alberta et au Yukon.
Exemple de cas
Le modèle d’ERDE du Nouveau-Brunswick, adopté en février 2013, exige que toutes les notes de service soumises au conseil exécutif après février 2013, qui proposent de modifier des lois ou des décisions stratégiques importantes, ou d’adopter de nouvelles lois ou de nouvelles décisions stratégiques portées à l’attention du Cabinet soient assujetties à une ERDE. L’outil, qui a également été appliqué aux processus de prise de décisions stratégiques au niveau ministériel, est utilisé par le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse aux fins de la préparation de ses propres examens externes d’ERDE. Un guide sur le modèle d’ERDE du Nouveau-Brunswick et des examens d’ERDE publiés par le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse sont disponibles sur le site Web de ce dernier.
Jurisprudence
L’affaire Inglis v. British Columbia (Minister of Public Safety), 2013 BCSC 2309, est un exemple où des violations de droits de l’enfant pourraient ne pas avoir eu lieu si une ERDE avait été faite avant la prise d’une décision stratégique publique. La cause concernait le programme de soutien mère-enfant au Centre correctionnel Alouette pour les femmes (ACCW), qui était offert aux femmes donnant naissance à des enfants pendant qu’elles étaient incarcérées et qui permettait à leurs nourrissons de rester avec elles. Le programme a été aboli en avril 2008. La cour a jugé qu’une telle suppression violait les droits des bébés et des mères de demeurer ensemble durant l’incarcération, en vertu de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, et que le système correctionnel était obligé d’établir des accommodements et de respecter de tels droits. La cour a estimé que les thèmes suivants contenus dans la Convention étaient pertinents relativement à son analyse (paragraphe 364) :
- la famille en tant qu’unité sociale fondamentale a droit à la protection de l’État;
- une protection spéciale doit être offerte à la mère, avant et après un accouchement, ainsi qu’à son enfant;
- l’intérêt supérieur de l’enfant est une considération primordiale dans toutes les mesures prises par l’État concernant les enfants;
- un enfant ne doit pas être séparé de ses parents contre leur gré, sauf par l’application régulière de la loi ou si cette séparation est nécessaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant;
- sauf pour ce qui est des limitations qui sont évidemment rendues nécessaires par leur incarcération, les personnes incarcérées doivent continuer à jouir de leurs droits et de leurs libertés fondamentales;
- les responsabilités de l’État relativement aux prisonniers seront assumées en harmonie avec les responsabilités fondamentales qui lui incombent de promouvoir le bien-être et l’épanouissement de tous les membres de la société.
Considérations spéciales
- Les enfants peuvent participer directement au processus des ERDE, en particulier si les ERDE peuvent s’avérer très efficaces pour mobiliser des enfants et des jeunes issus de minorités ou marginalisés.
- Les ERDE peuvent être indépendantes ou faire partie d’autres types d’évaluations des répercussions (par exemple, des répercussions environnementales), doivent être adaptées à votre niveau de prise de décisions, mais non réduites à une simple liste de vérification.
- Il n’existe pas un seul plan ou un seul modèle d’ERDE, bien que de nombreuses caractéristiques communes se retrouvent dans les plans et les modèles d’ERDE qui ont été élaborés jusqu’ici.
- Une ERDE est un outil précieux pour les ministères qui ne desservent pas les enfants, puisque ceux-ci ne se retrouvent pas souvent sous le radar des ministères.
- Le contenu d’une ERDE peut être ou ne pas être dévoilé publiquement, par exemple en raison du privilège avocat-client ou d’un privilège du Cabinet.
- Les répercussions des droits des enfants autochtones peuvent être mesurées et abordées.
Pratiques essentielles
- Les ERDE peuvent être des sources d’information utiles pour renforcer vos causes, quand elles sont requises.
- L’approche utilisée dans les ERDE peut aider à élaborer une analyse fondée sur les droits de l’enfant devant des tribunaux, ainsi que des organismes de prise de décisions ou des organes de politiques publiques.
- Assurez-vous de suivre un processus séquentiel prescrit lors de la préparation d’une ERDE : mesurez et évaluez l’efficacité de la méthodologie utilisée.
- Adaptez les ERDE à votre niveau de prise de décisions.
- Une ERDE ne doit pas être réduite à une simple liste de vérification, puisqu’une telle liste ne convient pas à l’établissement de la portée des répercussions ou à une analyse de qualité.
- Les outils et les manuels d’ERDE sont conçus pour aider l’utilisateur, et non pas pour se substituer à son jugement professionnel; divers outils et manuels peuvent être consultés et adaptés selon des situations et des besoins particuliers.
- Examinez l’importance que vous devez accorder à diverses répercussions : directes ou indirectes, légères ou graves, à court terme ou à long terme, etc.
Ressources
- CRIA Template (available upon request)
- UNICEF, “Child Rights Impact Assessment - Community of Practise” (2015) online.
- Various Panel Presentations, (delivered at the Symposium on Child Rights Impact Assessment, Bringing Children In From The Margins, University of Ottawa, 14-15 May 2013), online.
- Marv Bernstein & Pat Convery, “Ensuring Children`s Well-Being: Analyzing Policies and Practices through a Child Rights Lens” (2015) 50: 1 Ontario Association of Children's Aid Societies Journal 12, online.
- UNICEF, “Implementation Handbook for the Convention on the Rights of the Child”, E.07.XX.11 (2007) online.
- UNICEF, Child Rights Toolkit: Integrating Child Rights in Development Cooperation, (2014) online.
- UNICEF, “Manuel sur les droits de l’enfant: Intégrer les droits de l'enfant dans la coopération pour le développement” (2014) en ligne.