Un tribunal est-il un lieu ou un service? La pandémie de COVID-19 a réduit à néant la notion traditionnelle des tribunaux; un grand nombre d’entre eux ayant été forcés de fermer leurs portes. Toutefois, en Colombie-Britannique, le Civil Resolution Tribunal (CRT) en ligne a continué à fonctionner sans aucun problème puisqu’il le faisait déjà à distance avant la pandémie. Il devrait servir de modèle mondial pour rendre la justice en ligne.
Le CRT de la Colombie-Britannique est le premier et le seul tribunal en ligne du Canada. Il tranche des litiges concernant les petites créances de moins de 5 000 dollars. Avant sa complète entrée en service en 2017, les parties devaient comparaître devant la Cour des petites créances.
Les demandeurs auprès du CRT utilisent Solution Explorer, un outil en ligne gratuit, anonyme et confidentiel qui pose des questions au sujet du litige et fournit des renseignements juridiques fondés sur les réponses qu’on lui donne. Il catégorise les litiges et fournit au demandeur le formulaire de demande en ligne approprié.
Les parties téléchargent leurs éléments de preuve en ligne, et le dossier est confié à un membre du tribunal. Si une audience orale est nécessaire, elle est tenue au moyen d’une vidéoconférence. La majorité des litiges font l’objet d’un règlement, et un faible nombre progresse vers l’étape de l’arbitrage; les décisions sont mises à la disposition du public.
Le tribunal a été particulièrement utile pour les participants qui ont de jeunes enfants, vivent dans des régions rurales ou appartiennent à des populations vulnérables. La pandémie de COVID-19 n’a eu aucune incidence sur la capacité du CRT à fonctionner, si l’on compare avec les tribunaux traditionnels, puisque le personnel travaille intégralement à distance. « Nous avons pu rester ouverts et fonctionner normalement », dit Shannon Salter qui préside le CRT.
Le règlement des différends en ligne acquiert une certaine popularité partout au monde. Une nouvelle initiative fondée sur le modèle du CRT de la Colombie-Britannique prend son essor au Royaume-Uni. « S’il peut aider » d’autres ressorts à mettre en œuvre des solutions en ligne, le tribunal le fera, dit Me Salter. Richard Susskind, l’auteur le plus cité au monde dans le domaine de l’avenir des services juridiques, se penche sur le CRT dans son ouvrage intitulé Online Courts and the Future of Justice1.
En tant qu’étudiant en droit qui fait du bénévolat dans des cliniques juridiques, j’ai vu de mes yeux à quel point il est facile, pour les personnes qui souhaitent que justice soit rendue, d’avoir recours au CRT. Le système accompagne l’utilisateur de très près, pose les questions appropriées et suggère les formulaires applicables devant être soumis.
Les données suggèrent que la plupart des utilisateurs ont une expérience positive; 97 % convenant que le CRT était facile à utiliser et 81 % déclarant dans le sondage le plus récent mené en décembre 2020 sur la satisfaction des participants (site disponible uniquement en anglais) que le CRT avait traité leur dossier en temps opportun.
Les tribunaux sont un service public et en tant que tels devraient adopter les progrès technologiques. La justice peut devenir plus accessible et moins coûteuse au fil du temps grâce à l’élimination des frais administratifs et à l’accroissement de l’efficacité du règlement. Tout comme les professionnels de la médecine ont adopté la télésanté, les professionnels du droit du monde entier devrait s’enquérir des approches efficaces préconisant la technologie pour rendre la justice et la rendre plus accessible, et les mettre en œuvre.
Tatum Miller étudie le droit à l’Université de Victoria et préside la UVic LawTech Society.
Notes en page
1 Lire aussi cet article (uniquement en anglais) dans la revue Canadian Lawyer.