Au Canada, nos différences sont le fruit de notre richesse.
Il en va de même pour nos institutions, dont la magistrature. Plus nous sommes inclusifs, plus nous avons une vision élargie et plus éclairées sont les décisions que nous prenons.
Aussi, lorsque des citoyens sentent que les plus hautes sphères du système de justice reflètent qui ils sont, ils sont plus enclins à avoir confiance en ce système. Ce phénomène peut avoir encore plus de poids dans les communautés raciales qui, depuis des décennies, sont sous-représentées dans la profession juridique et surreprésentées dans le système de justice pénale.
À cet égard, les Néo-Écossais peuvent maintenant entrevoir l’avenir avec optimisme.
La Cour de la famille et la Cour provinciale ont récemment nommé les juges néo-écossais d’origine africaine Ronda van der Hoek, Rickcola Brinton et Samuel Moreau, ainsi que les juges Catherine Benton – première femme Mi’kmaq de la province élue à la magistrature – et Amy Sakalauskas, une lesbienne. Au cours de la dernière année, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a eu le plaisir de d’accueillir Timothy Gabriel, un autochtone ayant occupé un banc à la Cour provinciale, ainsi que Lester Jesudason, un Canadien d’origine sri-lankaise qui préside maintenant la Division de la famille.
Les gouvernements fédéral et provincial ont fait part de leurs intentions de poursuivre leur engagement d’améliorer la diversité au sein de nos magistratures.
Nous, les juges et juges en chef de la Nouvelle-Écosse, avons pris un engagement semblable. En janvier 2016, nous nous sommes demandé si la magistrature avait un rôle à jouer dans l’amélioration de la diversité, reconnaissant le fait que, évidemment, le gouvernement est responsable des nominations.
À cette fin, nous avons demandé à Linda Lee Oland, juge de la cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, de mener une enquête et de formuler des recommandations. Cela faisait suite au travail de la magistrature avec la professeure Michelle Williams, directrice de l’initiative des Autochtones Noirs et Mi’kmaq de la Faculté de droit Schulich.
Après le travail énorme qu’elle a accompli, notamment plusieurs entrevues avec des chefs de file en quête d’équité, issus de la communauté juridique et d’ailleurs, la juge Oland nous a remis une liste de recommandations éclairées et pratiques que les juges en chef de la Nouvelle-Écosse ont appuyée sans réserve.
La mise en œuvre de ces initiatives va bon train. Question d’apporter notre contribution, nous avons fait appel à un éventail de juges, de juristes, d’universitaires et de leaders de la collectivité, qui veilleront à ce que la diversité soit une priorité absolue au sein de la magistrature et de son personnel.
Plus de 25 ans après que la Commission d’enquête parlementaire chargée de la poursuite pénale de Donald Marshall Jr. ait cerné le besoin d’une plus grande représentation autochtone et raciale dans le système, nous commençons à constater de réels progrès.
Les nominations judiciaires des dernières années ont enrichi la magistrature. Je ne me fais pas dire que des banalités, je parle d’avantages réels et concrets.
Par le passé, les décisions du système judiciaire étaient généralement l’affaire de gens partageant les mêmes antécédents et la même vision du monde. Emma Halpern, agente d’équité à la Nova Scotia Barristers’ Society, fait remarquer que cette approche peut être contraignante. Je suis d’accord.
[traduction] « En fin de compte, nous ne pouvons ignorer notre vécu et la vision du monde que nos expériences ont façonnée en nous », écrivait-elle dans un article publié en 2009 sur le legs de Donald Marshall Jr. « Nos expériences passées jouent un rôle majeur dans notre façon de voir le monde et, par conséquent, elles ont des répercussions sur les décisions que nous prenons. Ainsi, il s’ensuit que pour bâtir une profession juridique équitable, l’un des aspects essentiels consiste à veiller à ce que les décisionnaires soient des gens aux antécédents et points de vue diversifiés ».
Il suffit de jeter un coup d’œil au rapport d’enquête de l’affaire Marshall ou de lire les histoires du grand chef Sylliboy et de Viola Desmond pour comprendre que les Néo-Écossais d’origine africaine et les Mi’kmaq ont connu un parcours difficile en Nouvelle-Écosse. Il importe de connaître leurs points de vue sur la magistrature et j’espère que notre nouvelle initiative de mentorat encouragera plus de juristes de ces collectivités à présenter leur candidature.
Évidemment, nos points de vue personnels, quoiqu’ils soient uniques, ne peuvent se limiter à de simples réflexions. À l’instar de nos nouveaux juges, toutes les personnes qui présentent leur candidature doivent posséder de l’expérience et des connaissances juridiques, et faire preuve d’intelligence, de bon sens, d’équité, de patience et de courage. Ces critères font en sorte que seuls les gens les plus brillants et compétents sont sélectionnés.
Il y a eu de nombreuses discussions sur la nécessité d’une profession juridique riche et diversifiée. Toutefois, simplement en parler n’est pas suffisant. Il est essentiel que nous passions de la parole aux actes. Je suis convaincu que cette initiative constitue un premier pas important pour la magistrature.
L’honorable J. Michael MacDonald est juge en chef de la Nouvelle-Écosse.