Au fil des ans, des juristes, des étudiants en droit et d’autres personnes me demandent souvent s’ils devraient suivre une formation en médiation. La plupart s’intéressent à la médiation, plusieurs prennent part à des processus de médiation en tant que juristes, mais ils ne sont qu’une poignée à vouloir exercer la médiation à temps plein. Ma réponse habituelle est qu’une formation en médiation peut servir à tout le monde, car elle permet l’acquisition de compétences de vie essentielles qui sont utiles dans plusieurs aspects de notre quotidien, pas seulement dans notre carrière juridique. Une formation en médiation nous apprend les dynamiques du comportement humain et nous dote d’aptitudes fondamentales dont nous avons besoin pour affronter de façon saine des conflits inévitables, et pour éviter que ces conflits prennent de l’ampleur et mettent fin à des relations. Pourquoi donc se priver de telles connaissances?
J’ignorais à quel point je sous-estimais la valeur d’une formation en médiation! Un récent article de périodique de Deborah A. Malizia et Jessica Katz Jameson ainsi qu’un article sur un sujet connexe de Mme Jameson fournissent des preuves empiriques qu’une formation en médiation améliore également le mieux-être d’une personne (articles uniquement en anglais). À une époque où plusieurs membres de la profession juridique doivent relever un éventail de défis en matière de mieux-être, cette nouvelle tombe à point.
Les auteurs font valoir que plusieurs des problèmes auxquels doivent faire face les juristes (et d’autres gens) entretiennent un lien avec une question de perspective (faire preuve d’ouverture et de curiosité, être apte à voir les choses du point de vue de l’autre personne), de connaissance de soi et de maîtrise de soi. Jessica Jameson affirme que les compétences que l’on acquiert dans une formation en médiation ont le potentiel de réduire les risques liés à la santé mentale tout en favorisant la résilience et le bien-être général. Ces articles examinent trois volets de la recherche et de la théorie :
- Études des répercussions de la médiation par les pairs sur les étudiants préuniversitaires :
[TRADUCTION] « Des études de programmes de médiation par les pairs ont démontré que les étudiants et étudiantes qui reçoivent une formation en médiation tirent grandement profit de ces programmes. Notamment, ils réussissent mieux à l’école, acquièrent des compétences sociales et émotionnelles accrues, possèdent une meilleure estime de soi, ont des comportements moins agressifs et font l’objet de moins de mesures disciplinaires. » Ces avantages se manifestent aussi bien à court terme qu’à long terme.
- Études des répercussions de l’apprentissage social et affectif, de la pratique de la pleine conscience et de la maîtrise des émotions sur le comportement :
[TRADUCTION] « La pleine conscience englobe la maîtrise de la concentration... et une tendance à l’ouverture, à la curiosité et à l’acceptation. » En outre, une étude publiée en 2017 suggère que [TRADUCTION] « les personnes qui aident les autres à gérer leurs émotions sont les moins susceptibles de souffrir de dépression ». Ces compétences, que l’on apprend et pratique dans les formations en médiation, peuvent toutes être mises en application pour améliorer nos propres vies émotionnelles.
- Fondement théorique de la science neurologique :
Les auteurs déclarent que [TRADUCTION] « neuf fonctions du cortex préfrontal sont des aspects essentiels de la résilience et du bien-être. Les aptitudes de médiation sont étroitement liées à six de ces fonctions : (1) communication harmonisée; (2) équilibre affectif; (3) empathie; (4) conscience morale; (5) flexibilité réactionnelle; (6) intuition. »
À la fin de l’article, les auteurs mentionnent que les étudiants en droit et les juristes praticiens sont des groupes qui profiteraient particulièrement d’une formation en médiation et de la pratique de la médiation. Ils font allusion au rapport troublant qu’a publié en 2016 l’American Bar Association et à d’autres statistiques qui confirment les très hauts taux de dépression, d’anxiété, de stress ainsi que d’abus d’alcool ou d’autres drogues au sein de la profession juridique. Les préoccupations sont du même ordre au Canada.
En nous appuyant sur les résultats de cette recherche, je suggère que nous considérions les formations en médiation comme une façon de renverser ces tendances et d’améliorer le mieux-être des étudiants et étudiantes en droit, des juristes et des autres spécialistes de la profession juridique. Elles sont déjà disponibles, accessibles et agréables. Qui sait, elles ont peut-être aussi le pouvoir de faciliter notre accès aux efforts qui sont déployés pour transformer le système de droit afin de le rendre plus collaboratif et plus axé sur les clients.
Je serais ravie de recevoir des commentaires, particulièrement de gens qui ont suivi une formation en médiation.
Kari D. Boyle est une coordonnatrice au Family Justice Innovation Lab de la Colombie-Britannique.