Depuis notre article original sur les réformes du paiement rapide au Canada publié en mai 2018, plusieurs évolutions ont eu lieu dans diverses régions concernant la réforme des lois sur le paiement rapide et le privilège dans le domaine de la construction.
En Ontario, la première tranche de modifications est entrée en vigueur le 1er juillet 2018 (appelée la « modernisation », elle actualise la chronologie des privilèges et celle des retenues, les dispositions sur les fiducies et le cautionnement obligatoire pour les projets publics). La deuxième tranche comportant les dispositions sur les paiements rapides et sur l’arbitrage intermédiaire va très bientôt entrer en vigueur (1er octobre 2019). La province a en outre répondu à de nombreux commentaires d’acteurs de ce secteur concernant la première tranche de modifications en modifiant plus avant le projet de loi 57 (entrées en vigueur en décembre 2018) et a actualisé les règlements et les formulaires (qui seront bientôt finalisés et publiés). Les entreprises de construction, les juristes, les propriétaires et les acteurs de ce secteur en général font tous de leur mieux pour mettre en œuvre des processus et procédures visant à faciliter autant que possible la transition. Les réformes de l’Ontario comportent des règles transitoires relativement complexes qu’il importe de suivre à la lettre : si un contrat a été passé ou un processus d’approvisionnement commencé à l’égard d’une amélioration avant le 1er octobre 2019, les règles sur le paiement rapide et sur l’arbitrage intermédiaire ne s’appliqueront pas.
La réforme législative au niveau du gouvernement fédéral lancée par le dépôt du projet de loi S-224, s’est traduite par la demande et la publication d’un à l’été 2018. Après avoir examiné le rapport, le gouvernement fédéral a commencé à rédiger la législation à l’automne 2018. Le processus de rédaction n’a cependant pas progressé aussi rapidement que prévu. La législation sur le paiement rapide a été publiée dans le projet de loi budgétaire du gouvernement, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures. Le projet de loi est la première loi majeure dans le domaine de la construction au niveau fédéral. Elle demeure cependant assujettie à un grand nombre de dispositions « à venir » dont les détails seront fixés par voie réglementaire, y compris une grande partie du régime de règlement des différends et des dispositions concernant l’autorité des intervenants experts même. Le projet de loi est largement taillé sur le modèle de celui de l’Ontario, y compris l’ajout d’une définition des réparations majeures pour bien cerner la portée du texte, la définition de la facture en règle et le fait d’en faire le déclencheur pour la chronologie du paiement, et l’utilisation de l’effet de domino des obligations de paiement façonné sur le modèle 28-7-7-7 qui part du propriétaire pour passer à l’entrepreneur, puis au sous-traitant, etc., ainsi que la création d’un processus de recours à un intervenant expert pour régler les différends. Selon certains éléments dignes de mention,
- le propriétaire dispose de 21 jours pour fournir à l’entrepreneur un avis de non-paiement (ON – 14, SASK – 14),
- une option de retenue inférieure ou égale au montant prévu par la province dans laquelle les travaux sont effectués a été introduite,
- une période de 21 jours est donnée pour lancer une procédure d’arbitrage à partir de moments précisés,
- la décision de l’intervenant expert lie les parties, sauf si celles-ci parviennent à une entente couchée par écrit ou si une décision judiciaire ou arbitrale l’annule.
Les dispositions transitoires obligent à une certaine gymnastique mentale : la Loi s’appliquera, un an après le jour de son entrée en vigueur, aux contrats passés par un entrepreneur après le jour de l’entrée en vigueur de la Loi.
La Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse ont également déposé chacune leur projet de loi depuis la rédaction de notre premier article. Le projet de loi 152, The Builders’ Lien (Prompt Payment) Amendment Act, 2018 de la Saskatchewan, déposé en novembre 2018, est à l’étape de la troisième lecture et sera bientôt promulgué. Les dispositions du projet de loi ressemblent à la plupart de celles sur le paiement rapide, l’arbitrage intermédiaire et les chronologies énoncées dans la loi ontarienne, y compris l’effet de domino des obligations de paiement façonné sur le modèle 28-7-7-7, les formulaires prescrits pour les litiges, les dispositions portant sur le règlement des litiges et la création d’un intervenant expert1. La Nouvelle-Écosse a également déposé un projet de loi qui, après la deuxième lecture, est passé à l’étape de l’examen par un comité2. La législation de la Nouvelle-Écosse comprend un grand nombre des dispositions similaires à celles des lois de l’Ontario, de la Saskatchewan et de la législation fédérale concernant le paiement rapide et le règlement des différends. Toutefois, les différentes chronologies seront déterminées par voie de règlements qui ne sont pas encore disponibles3.
Le Manitoba est la seule province encore en plein changement législatif. En novembre 2018 la Commission de réforme du droit a publié son rapport final sur la modernisation de la loi, et il est fort probable que la législation suivra en 2019 ou 2020. Ce qu’il adviendra du projet de loi 218 demeure peu clair4.
La situation au Nouveau-Brunswick n’a pas changé depuis l’élection en 2018 et aucun nouveau Bulletin de la réforme du droit n’a été publié depuis mai 2018 alors que la participation des intervenants battait son plein.
Andrew J. O’Brien est directeur, Risque lié à la caution, Travelers Canada, et Ted Betts est associé dans le cabinet Gowlings WLG.