Le 8 novembre 2021, la chambre commerciale de la Cour supérieure du Québec (la Cour) a rendu sa décision dans l’affaire Bloom Lake. Le juge Michel A. Pinsonnault a déterminé que les réclamations de crédits et de remboursements de taxe sur intrants aux fins de la TPS et de la TVQ (CTI et RTI) en lien avec le paiement de dommages au titre de contrats résiliés dans le cadre des procédures prévues par la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) étaient survenues après le délai de dépôt (c’est-à-dire après la date de dépôt de la requête en procédures en vertu de la LACC, soit la date où a été rendue l’ordonnance originale en application de la LACC). Cette décision a été prononcée dans la foulée de celle rendue par la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Kitco, selon laquelle l’administration fiscale n’avait pas le droit d’opérer compensation d’une dette fiscale contractée avant le délai de dépôt en lui affectant des CTI et RTI datant d’après le délai de dépôt dans le contexte de procédures de restructuration sous le régime de la LACC.
- La Cour n’a pas autorisé l’Agence du revenu du Québec (agissant aussi au nom de l’Agence du revenu du Canada dans cette instance; collectivement l’administration fiscale) à compenser une dette fiscale née avant le dépôt de la requête en procédures de liquidation en y affectant les CTI et RTI postérieurs à ce dépôt, alors que le contribuable était sous la protection de la LACC.
- La Cour a jugé que la limpidité du paragraphe 182(1) de la Loi sur la taxe d’accise (LTA) et de l’article 318 de la Loi sur la taxe de vente du Québec (LTVQ) lui permettait de trancher sans équivoque. Le droit du requérant de réclamer les CTI et RTI ne s’appliquait que lorsque la TPS et la TVQ étaient réputées avoir été affectées au paiement des dommages, soit après le dépôt de la requête en l’espèce.
- Citant à ce propos la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire 9354-9186 Québec inc. c. Callidus Capital Corp., la Cour a rejeté l’argument de l’administration fiscale selon lequel le principe appliqué dans l’affaire Kitco ne valait que pour les procédures de restructuration lancées en vertu de la LACC, et non pour les procédures de liquidation sous le régime de cette même loi. Elle a conclu que rien dans la LACC ni dans la jurisprudence ne permettait d’assujettir ces deux types de procédures à des règles distinctes.
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Jean-Guillaume Shooner et Joseph Reynaud sont tous deux des associés du cabinet Stikeman Elliott LLP, le premier faisant partie du groupe Fiscalité, et le second, du groupe Litige et règlement de différends. William Rodier-Dumais est un avocat au sein du cabinet, travaillant au bureau de Montréal et se spécialisant principalement dans les restructurations, le droit bancaire et des sociétés et les litiges commerciaux.
L’auteur tient à remercier Alexandra Fedor, stagiaire en droit, pour son aide et sa contribution