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L'honorable Anne S. Derrick

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Quel a été votre cheminement dans le monde du droit et de la magistrature?

Je ne connaissais aucun juriste, mais à la fin de mon adolescence, j’ai compris que les juristes pouvaient défendre les intérêts des personnes marginalisées et promouvoir le changement social. À l’obtention de mon diplôme de premier cycle, je me suis donc inscrite en droit. Je voulais acquérir les outils et les références qui me permettraient de faire avancer la cause de la justice sociale et de lutter contre les inégalités structurelles. Je me suis spécialisée dans les dossiers concernant l’intérêt public et l’égalité, dans le droit pénal, notamment comme avocate de la défense, et dans la promotion de la justice sociale. Je me suis déclarée féministe tout au long de mes études et de ma carrière en droit. Le féminisme a éclairé ma vision du monde et ma décision d’exercer le droit avec d’autres juristes féministes. Au moment d’être nommée juge, j’avais passé plus de 24 ans à travailler dans le cadre de litiges, d’examens et d’enquêtes au nom (et avec) des membres et des représentants d’un large éventail de communautés marginalisées. J’ai postulé à la magistrature parce que j’y voyais une occasion d’apporter à la fonction judiciaire cette richesse d’expériences personnelles et professionnelles. Tout au long de mon parcours en droit, j’ai été très consciente de mon privilège et de la façon dont il m’a ouvert des possibilités inaccessibles aux personnes que je représentais en tant qu’avocate et aux personnes qui comparaissent devant moi en tant que juge.

Que souhaitez-vous que le public sache au sujet du système de justice?

Le système de justice, et le système de justice pénale en particulier, exerce une fascination sur le public, mais il est mal compris. Nous avons été mal servis en tant que société par la réduction de la couverture médiatique de nos tribunaux. Une société informée est essentielle à une démocratie saine. Le public a du mal à apprécier à leur juste valeur les composants essentiels de notre démocratie constitutionnelle, régie par la primauté du droit, et le rôle crucial d’un pouvoir judiciaire indépendant. Il y a une idée préconçue, souvent exprimée dans les commentaires publics, selon laquelle les juges usurpent le rôle du législateur. Il s’agit d’une vision erronée : interpréter et appliquer les principes de la Charte et de la common law sont des fonctions essentielles de la magistrature qui permettent de protéger, de promouvoir et de faire respecter les libertés et les droits fondamentaux. La primauté du droit ne s’arrête d’ailleurs pas aux portes de la prison : elle s’applique même à ceux qui ont été privés de liberté pour des transgressions contre l’ordre public.

Le système de justice, en particulier le système de justice pénale, est appelé à faire face à de formidables problèmes et enjeux sociaux. Notre échec continu comme société à éliminer la pauvreté, le racisme, la misogynie et les nombreuses autres formes de désavantages qui pèsent sur les choix et les possibilités des gens a porté les effets de cet échec devant les tribunaux. Les tribunaux ne peuvent pas faire grand-chose pour réparer ce qui reste brisé dans la société, mais ils ont l’obligation de jouer un rôle constructif et positif.