4.7. Santé

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Le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible

[TRADUCTION] « Le droit de l’enfant à des services de soins de santé [Article 24] doit recevoir une interprétation large, et on doit prêter attention à tous les facteurs pouvant influer sur l’exercice d’un tel droit. Puisque les droits de la personne sont interdépendants, l’exercice du droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible touche l’exercice de ses autres droits et est touché par celui-ci. Ainsi, si un enfant est malade, n’a pas accès à des services de soins de santé et n’est pas en mesure de fréquenter l’école, cela aura une incidence négative sur son droit à l’éducation. De même, si d’autres droits en lien avec la Convention, comme le droit d’être protégé contre toute forme de violence (article 19), ne sont pas respectés, les conséquences sur le droit de l’enfant à la santé seront immédiates. Parmi les autres droits intrinsèquement liés à la réalisation du droit à la santé figurent le droit à la vie, à la survie et au développement (article 6), le droit à l’égalité et à la non-discrimination (article 2), le droit de l’enfant de n’être astreint à aucun travail comportant des risques de nuire à sa santé (article 32), le droit de protection de l’enfant contre toutes les formes d’exploitation sexuelle et de violence sexuelle (article 34) et le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 37). Le droit de se livrer au jeu (article 31) est également primordial, car le jeu est essentiel à la santé émotionnelle et physique de l’enfant, et à son bien-être.

L’obligation de rendre des comptes est un élément essentiel pour garantir la jouissance du droit de l’enfant à la santé, et les mécanismes nationaux de reddition de comptes doivent être efficaces et transparents. De tels mécanismes adéquats comprennent des systèmes de plainte, des recours judiciaires et des organes de contrôle indépendants. Avec l’engagement actif du gouvernement, de communautés, de la société civile et des enfants, les mécanismes nationaux de reddition de comptes doivent viser à tenir tous les acteurs responsables de leurs actes. ».

Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme
Genève, mars 2013, p. 7 et 20

Convention relative aux droits de l’enfant).  L’article 24 de la Convention appuie le droit de chaque enfant de jouir du meilleur état de santé possible. On doit interpréter ce droit de manière large en reconnaissant tous les facteurs, ainsi que les autres droits qui peuvent influer sur son exercice, tels que le droit d’être protégé contre toute forme de violence (article 19). Les États parties à la Convention sont encouragés à assurer l’accès à des soins de santé de qualité tout au long de la vie de l’enfant, y compris des soins préventifs, et à des conseils destinés aux parents. Des mesures doivent être prises afin d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé de l’enfant. Diverses observations générales du Conseil des droits de l’enfant des Nations Unies portent sur la santé de l’enfant, dont l’Observation générale no 4, qui porte sur la santé et le développement de l’adolescent.

Le droit de l’enfant de participer à des décisions relatives aux traitements médicaux est reconnu dans le droit canadien, mais il varie d’un ressort à l’autre. Des lois provinciales ou territoriales abordent la question du consentement à un traitement médical, comme la loi Infants Act de la Colombie-Britannique et la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé de l’Ontario. La Cour suprême du Canada a également indiqué que la norme relative à l’intérêt supérieur de l’enfant doit être appliquée d’une façon qui tient compte de plus en plus du point de vue de l’enfant, conformément à son degré de maturité, dans les décisions relatives aux traitements médicaux (voir l’affaire A.C c. Manitoba (Directeur des services à l’enfance et à la famille) 2009 SCC 30 [2009] 2 S.C.R. 181. En outre, des lois provinciales et territoriales sur la vie privée abordent la question de la protection des renseignements personnels sur les soins prodigués à l’enfant et sur la gestion des données.

Droit international

Convention relative aux droits de l’enfant

CRC Article 6

Article 6 de la Convention :

  1. Les États parties reconnaissent que tout enfant a un droit inhérent à la vie.
  2. Les États parties assurent dans toute la mesure possible la survie et le développement de l’enfant.

CRC Article 24

Article 24 de la Convention :

  1. Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible et de bénéficier de services médicaux et de rééducation. Ils s’efforcent de garantir qu’aucun enfant ne soit privé du droit d’avoir accès à ces services.
  2. Les États parties s’efforcent d’assurer la réalisation intégrale du droit susmentionné et, en particulier, prennent les mesures appropriées pour :
    1. Réduire la mortalité parmi les nourrissons et les enfants;
    2. Assurer à tous les enfants l’assistance médicale et les soins de santé nécessaires, l’accent étant mis sur le développement des soins de santé primaires;
    3. Lutter contre la maladie et la malnutrition, y compris dans le cadre de soins de santé primaires, grâce notamment à l’utilisation de techniques aisément disponibles et à la fourniture d’aliments nutritifs et d’eau potable, compte tenu des dangers et des risques de pollution du milieu naturel;
    4. Assurer aux mères des soins prénatals et postnatals appropriés;
    5. Faire en sorte que tous les groupes de la société, en particulier les parents et les enfants, reçoivent une information sur la santé et la nutrition de l’enfant, les avantages de l’allaitement au sein, l’hygiène et la salubrité de l’environnement et la prévention des accidents, et bénéficient d’une aide leur permettant de mettre à profit cette information;
    6. Développer les soins de santé préventifs, les conseils aux parents et l’éducation et les services en matière de planification familiale.
  3. Les États parties prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants.
  4. Les États parties s’engagent à favoriser et à encourager la coopération internationale en vue d’assurer progressivement la pleine réalisation du droit reconnu dans le présent article. À cet égard, il est tenu particulièrement compte des besoins des pays en développement.

Articles liés de la Convention : 2, 3, 6, 8, 9, 12, 13, 19, 24, 28, 29, 31, 37, 42

Autres normes et instruments internationaux

Sources d’interprétation

Droit canadien

Lois fédérales

(Voir les sections de la présente trousse d’outils portant sur la Charte et sur la vie privée pour obtenir de plus amples renseignements.)

Lois provinciales ou territoriales

Un grand nombre de lois provinciales ou territoriales abordent la question du consentement à un traitement médical, comme la loi Infants Act de la Colombie-Britannique et la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé de l’Ontario. Des lois provinciales et territoriales sur la vie privée abordent la question de la protection des renseignements personnels sur les soins prodigués à l’enfant et sur la gestion des données. Consulter l’annexe sur l’âge et les droits en matière de soins de santé et l’annexe sur l’âge minimum pour les directives en matière de soins de santé pour plus d’informations sur les lois en vigueur dans les provinces et les territoires.

En 2023 et 2024, les gouvernements provinciaux du Nouveau-Brunswick, de la Saskatchewan et de l’Alberta ont annoncé des politiques et des modifications législatives visant à restreindre les droits des personnes transgenres et, plus précisément, à empêcher les jeunes transgenres de recevoir certaines formes de traitement médical confirmant leur sexe et à empêcher ces jeunes de participer à des activités sportives. Le gouvernement fédéral ainsi que de nombreuses ONG ont exprimé leur avis, affirmant que ces lois et politiques provinciales violent les droits des enfants et des jeunes que garantit la Charte. L’Association médicale canadienne et l’Association des psychiatres du Canada se sont opposées à ces réformes, affirmant qu’elles compromettaient les droits aux traitements médicaux auxquels les enfants ont droit. Au moment de la rédaction du présent rapport, la façon dont les contestations fondées sur la Charte se produiront et le moment où elles auront lieu sont toujours nébuleuses. Il est clair, cependant, que ces lois provinciales ne sont pas en harmonie avec les protections de la santé prévues par la Convention.

Jurisprudence

A.C c. Manitoba (Directeur des services à l’enfance et à la famille), [2009] 2 RCS 181 – Cette affaire concernait l’arrestation d’une enfant âgée de près de 15 ans souffrant de saignements du tractus gastro-intestinal causés par la maladie de Crohn alors qu’elle refusait une transfusion sanguine en raison du fait qu’elle était témoin de Jéhovah. Le paragraphe 25(8) de la Loi sur les services à l’enfant et à la famille du Manitoba permet à la Cour d’autoriser des traitements médicaux qu’elle juge être dans l’intérêt de l’enfant, et le paragraphe 25(9) précise que l’intérêt supérieur d’un enfant âgé d’au moins 16 ans est mieux servi en acceptant que son point de vue soit déterminant, à moins qu’il soit démontré que l’enfant ne peut pas comprendre la décision ou ses conséquences. Les dispositions suivantes de la Charte ont été soulevées : le paragraphe 2(a) (conscience et religion), le paragraphe 7 (vie, liberté et sécurité de la personne et aucune privation de ces droits, sauf si elle est conforme aux principes de justice fondamentale) et le paragraphe 15(1) (Égalité). La Cour a examiné la common law pour les adultes et a conclu que la Loi conduit à une interprétation de « l’intérêt supérieur » de l’enfant qui est compatible avec les normes internationales, les développements récents en common law et la réalité de la protection de l’enfance et des enfants (paragraphes 80). La Cour a jugé que les dispositions législatives de la Loi sont constitutionnelles et que, bien que la maturité soit difficile à définir en raison de son caractère évolutif et contextuel, « le droit des adolescents matures à ne pas être injustement privés de la possibilité de prendre de façon autonome des décisions médicales commande que l’évaluation soit effectuée avec respect et rigueur » (paragraphe 96). Par conséquent, la Cour a posé une liste de questions qui ne prétend pas être une formule, mais qui vise à aider les tribunaux à déterminer dans quelle mesure les volontés exprimées par l’enfant reflètent des choix véritables, durables et autonomes.

Auton (Tutrice à l’instance de) c. Colombie-Britannique (Procureur général), 2004 CSC 78 – Les requérants étaient des nourrissons autistes qui, avec l’aide de leurs parents en tant que tuteurs légaux soutenaient que le fait que le gouvernement provincial n’avait pas financé la thérapie comportementale appliquée violait leurs droits à l’égalité en vertu de la Charte. Le traitement inégal résidait dans le fait que les enfants ou les adultes non handicapés recevaient des services de santé mentale financés par la province tandis que les enfants autistes se voyaient refuser la thérapie comportementale appliquée, même si la province reconnaissait l’importance d’une intervention, d’un diagnostic et d’un traitement précoces pour l’autisme. La juge de première instance et la Cour d’appel de la Colombie-Britannique ont estimé que la province avait enfreint les droits d’égalité des enfants. Cependant, la Cour suprême du Canada ne s’est pas montrée de cet avis en soutenant qu’il n’y a pas eu de violation du fait que la province était seulement tenue, en vertu de la loi applicable, de financer des services requis ou nécessaires fournis par des médecins, et que ces derniers n’incluent pas les services en question. La Cour a insisté sur la nécessité d’examiner les questions relatives à l’égalité en fonction de la réalité et du contexte, mais elle n’a pas fait mention à la Convention dans les motifs qu’elle a invoqués. Son analyse de l’égalité a reposé sur la question de savoir si les services constituaient un avantage prévu par la loi et, dans la négative, si l’avantage prévu par la loi a été accordé à un groupe de comparaison semblable.

Il convient de remarquer qu’un argument similaire soulevé plus récemment par le Canada, selon lequel les enfants autochtones vivant dans une réserve ne doivent pas être comparés aux enfants hors réserve, a été rejeté par le Tribunal canadien des droits de la personne relativement à une plainte sur l’aide à l’enfance des Premières Nations (Docket : T1340/7708).

B. (R.) v. Children’s Aid Society of Metropolitan Toronto, [1995] 1 SCR 315 – La Cour suprême du Canada a rejeté les arguments avancés par des parents de Toronto, témoins de Jéhovah, qui prétendaient que leurs droits garantis par la Charte avaient été violés lorsque leur fille en bas âge avait reçu une transfusion sanguine ordonnée par le tribunal malgré leurs objections pour motifs religieux. La Cour a conclu que la liberté de religion d’un parent, telle qu’elle est garantie en vertu du paragraphe 2(a) de la Charte, est nécessairement limitée par l’article 1 en ce sens qu’elle ne comprend pas le droit d’imposer des pratiques religieuses à un enfant pouvant nuire à sa sécurité, à sa santé et à sa vie. Dans cette affaire, l’enfant était trop jeune pour avoir adhéré à la foi de ses parents. En conséquence, le refus des parents de permettre qu’elle reçoive une transfusion sanguine empiétait sur sa liberté de conscience. En principe, la liberté de religion d’une personne, y compris un parent, ne comprend pas les activités d’une personne qui nient catégoriquement la liberté de conscience d’une autre personne, y compris lorsque cette autre personne est son enfant.

Canada c. Médecins canadiens pour les soins aux réfugiés et les autres, 2014 CF 651 (appel interjeté et subséquemment retiré) – En juin 2012, le gouvernement fédéral du Canada a procédé à des réductions dans son régime d’assurance maladie, de sorte que l’assurance maladie fournie aux demandeurs d’asile en vertu du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI) a été supprimée. Les demandeurs cherchaient à obtenir un examen judiciaire de la décision. Le 4 juillet 2014, la Cour a jugé que les réductions ont donné lieu à la violation de deux dispositions de la Charte l’article 12 (Traitements ou peines cruels et inusités) et 15 (Traitement différent selon la catégorie des pays d'origine désignés). En septembre 2014, le Canada a interjeté appel de la décision, mais, après l’élection fédérale de 2015, l’appel a été retiré.

Enquête du coroner sur le décès d’Ashley Smith, verdict du jury du coroner – Loi sur les coroners –Province de l’Ontario, décembre 2013 – Il s’agissait d’une enquête médico-légale concernant le décès d’Ashley Smith, une jeune femme âgée de 19 ans détenue par le système correctionnel fédéral en 2007. Le jury a conclu que les circonstances du décès étaient un homicide. Il s’agissait de la première fois qu’un verdict d’homicide d’un détenu ou d’une détenue dans le système correctionnel canadien était commis par une personne qui n’était pas un autre détenu ou une autre détenue. Ashley Smith avait été placée sous garde à l’âge de 14 ans dans un établissement pour jeunes pendant un mois en 2003, pour avoir lancé des pommettes à un employé des postes. Une fois placée sous garde, Smith a commis des centaines d’infractions disciplinaires et a accumulé des accusations criminelles en raison de son comportement. Elle a ensuite été placée sous garde pendant plus de quatre ans, presque entièrement en isolement, avant d’être transférée dans un établissement de détention pour adultes, où elle est décédée en 2007. Smith s’est enlevé la vie au moyen d’une corde, pendant que les gardiens de première ligne se sont contentés de la regarder pendant environ 45 minutes avant d’intervenir. En détention, Smith était détenue dans un espace clos. Ses plaintes officielles étaient ignorées, et ses droits régulièrement bafoués. Elle a été transférée dans un établissement de détention pour adultes, alors qu’elle venait d’avoir 18 ans, puis transférée 17 autres fois dans huit établissements différents. Le verdict a condamné le défaut du système judiciaire et du système correctionnel canadiens d’assurer des soins, des traitements, des mesures de soutien et des protections favorables à l’exercice des droits des adolescents détenus et fournissait diverses recommandations visant à résoudre des problèmes systémiques présents dans le système correctionnel canadien, où les jeunes détenus ne reçoivent pas un soutien ou un traitement humain adéquat.

Hamilton Health Sciences Corp. v. D.H., 2014 ONCJ 603 (CanLII) – Un hôpital a déposé une requête contre une société d’aide à l’enfance pour obliger une fillette âgée de 11 ans à poursuivre une chimiothérapie pour traiter une leucémie. Les parents de l’enfant, d’origine autochtone, ont choisi de ne pas poursuivre la chimiothérapie et de recourir à un autre traitement en Floride. Ils ont qualifié ce traitement de compatible aux pratiques autochtones et ont donc soutenu qu’il s’agissait d’un droit autochtone de l’enfant de choisir un traitement alternatif au lieu des soins de santé occidentaux. La Cour de l’Ontario a jugé que l’hôpital ne pouvait pas obliger la jeune fille à reprendre un traitement de chimiothérapie parce que la Constitution protège le droit de la mère de traiter son enfant au moyen d’une médecine traditionnelle autochtone.

Considérations spéciales

  • Consentement et capacité – Le droit d’un enfant de participer à la prise de décisions concernant les soins de santé peut comprendre le consentement à un traitement médical, mais les règles varient d’un ressort à l’autre.
  • Les enfants autochtones ont des droits protégés par la Constitution et des traités, de même que des droits culturels en vertu de la Convention, qui peuvent influer sur les décisions relatives aux traitements médicaux (affaire Hamilton Health Sciences Corp. v. D.H., 2014 ONCJ 603 (CanLII))

Pratiques essentielles

  • Si vous êtes avocat ou avocate de société pour les hôpitaux :
    • recommandez que des politiques et des protocoles soient mis en place pour s’assurer que les enfants participent à la prise de décisions concernant les soins de santé à des niveaux propices à leur développement et conformément à la loi applicable;
    • assurez-vous que des politiques et des protocoles sont mis en place de manière à ce que les professionnels de la santé comprennent que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la considération primordiale dans toutes les décisions concernant les soins de santé prodigués aux enfants.
  • Assurez-vous que les enfants sont informés sur leur droit à des services de soins de santé et que, s’ils sont aptes à exprimer leurs points de vue, qu’ils ont l’occasion de prendre part aux décisions qui les concernent.
  • Assurez-vous également que le droit de l’enfant à la vie privée est respecté et soigneusement protégé.

Ressources

Ressources médicales