4.8. Droit de l’immigration et droit des réfugiés

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Le principe le plus fondamental du droit de l’immigration est que les non-citoyens n’ont pas un droit absolu d’entrer au Canada ou d’y rester. La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) précise qu’elle doit être interprétée et mise en œuvre conformément à la Charte et qu’elle doit être conforme aux instruments internationaux portant sur les droits de la personne dont le Canada est signataire, y compris la Convention.

Aux termes de l’article 3 de la Convention, l’intérêt supérieur de l’enfant est une considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants, y compris celles des institutions publiques, des autorités administratives et des tribunaux. Bien que diverses dispositions de la LIPR prescrivent la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et que la Cour suprême du Canada ait souligné clairement qu’une attention particulière doit être accordée à l’intérêt supérieur et aux besoins de l’enfant dans certaines décisions relatives à l’immigration, il n’existe pas de considérations absolues liées à l’intérêt de l’enfant dans le droit de l’immigration et le droit des réfugiés.

Par exemple, le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant ne s’applique pas au regroupement familial dans le cas des enfants réfugiés dont les parents résident dans d’autres pays. Il manque aussi au Canada un cadre stratégique clair, compatible avec l’intérêt supérieur des mineurs non accompagnés qui demandent l’asile. De plus, des parents peuvent parrainer leurs enfants à charge, mais les enfants ne peuvent pas faire venir leurs parents au Canada, et les enfants qui restent dans leur pays d’origine ne sont pas autorisés à rejoindre leurs parents au Canada, si ceux-ci ne les ont pas désignés comme personnes à charge dans leur demande de résidence permanente. Des enfants doivent attendre de longues périodes avant de rejoindre leurs parents résidents et, souvent, ils ne peuvent pas rendre visite à un parent qui réside au Canada, contrairement à des dispositions particulières de la Convention concernant la non-séparation des enfants de leurs parents (à moins qu’elle soit nécessaire à leur intérêt supérieur) et contrairement à l’exigence selon laquelle les demandes soumises aux fins d’un regroupement familial doivent être traitées dans un esprit positif, avec humanité et diligence (articles 9 et 10).

Le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies a exprimé des préoccupations particulières et importantes concernant le fait que le Canada n’a pas appliqué adéquatement le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans les situations de demande d’asile, de détention de réfugiés ou d’immigrants. Le Conseil a exhorté le Canada à rendre ses lois sur l’immigration et l’asile pleinement conformes à la Convention et à d’autres normes internationales.

Compétence

L’immigration est reconnue comme relevant de compétences simultanées en vertu de la Constitution, ce qui signifie que les compétences sont partagées entre le gouvernement fédéral et les provinces. Toutefois, le gouvernement fédéral a la compétence exclusive en matière d’admission et de naturalisation des ressortissants étrangers, ce qui lui permet d’établir le nombre d’immigrants admis au Canada et le critère de sélection tel qu’il est défini dans la LIPR et sa réglementation, bien qu’il collabore avec les provinces pour établir les objectifs et les politiques en matière d’immigration.

Les provinces exercent aussi des pouvoirs clés dans les politiques d’immigration dans la prestation de services sociaux et éducatifs, conformément à la répartition des compétences en vertu de la Constitution. À ce titre, les provinces jouent un rôle important dans les services d’établissement des immigrants tels que le logement, la formation en cours d’emploi et l’enseignement des langues. Le gouvernement fédéral participe également à ces sphères de compétence par le truchement de programmes et de services financés par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).

Droit international

Résumé d’articles de la Convention portant sur l’immigration

Principes généraux – Article 2 (non-discrimination); article 3 (intérêt supérieur de l’enfant en tant que considération primordiale); article 6 (droit inhérent à la vie, survie et développement de l’enfant); article 12 (droit de l’enfant d’exprimer librement son opinion « sur toute question l’intéressant », ses opinions devant être dûment prises en considération)

Autres articles

Article 8 (droit de l’enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses liens familiaux); article 9 (non-séparation des parents ou droit de l’enfant d’entretenir des relations régulières avec ses deux parents s’il est séparé de l’un d’eux ou des deux, à moins que cela ne soit pas dans son intérêt supérieur); article 10 (réunification familiale); article 11 (mesures pour lutter contre les déplacements et les non-retours illicites d’enfants à l’étranger); article 20 (responsabilité de l’État de fournir une protection spéciale ou une aide à tout enfant privé de son milieu familial); article 21 (garanties dans le cas d’une adoption à l’étranger); article 22 (mesures de protection appropriées dans le cas de tout enfant réfugié); article 24 (droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible); article 27 (droit de l’enfant à un niveau de vie suffisant); article 28 (droit à l’éducation); article 29 (respect de l’identité culturelle, de la langue et des valeurs); article 30 (droit d’avoir sa propre vie culturelle, de pratiquer sa religion et d’utiliser sa langue); article 32 (droit d’être protégé contre l’exploitation économique); article 23 (soins spéciaux et aide aux enfants handicapés); article 34 (droit d’être protégé contre toutes les formes d’exploitation sexuelle et de violence sexuelle); article 35 (mesures pour empêcher l’enlèvement, la vente ou la traite d’enfants à quelque fin que ce soit); article 36 (protection contre toutes les autres formes d’exploitation); article 37 (protection contre la torture, les traitements cruels, inhumains ou dégradants, les châtiments et la privation de liberté); article 38 (droit de tout enfant n’ayant pas atteint l’âge de 15 ans de ne pas être enrôlé dans des forces armées); article 39 (mesures visant à faciliter la réadaptation physique et psychologique de tout enfant victime de violence sous toutes ses formes)

Sources d’interprétation

Droit canadien

  • Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR) : article 3, paragraphe 25(1), article 25.1, alinéa 28(2)(c), article 60, alinéa 67(1)(c), paragraphe 68(1), paragraphe 69)2), paragraphe 167(1) et paragraphe 167(2)

    Principales dispositions de la LIPR qui peuvent être citées dans la défense des droits de l’enfant :

    • L’article 3 établit l’objet de la Loi, notamment la réunification des familles au Canada (alinéa 3(1)(d)).
    • Parmi les autres objectifs, mentionnons les suivants : reconnaître que le programme pour les réfugiés vise avant tout à sauver des vies et à protéger les personnes de la persécution; remplir les obligations en droit international du Canada relatives aux réfugiés; faire bénéficier ceux qui fuient la persécution d’une procédure équitable reflétant les idéaux humanitaires du Canada; offrir l’asile à ceux qui craignent avec raison d’être persécutés; mettre en place une procédure équitable et efficace qui soit respectueuse, d’une part, de l’intégrité du processus canadien d’asile et, d’autre part, des droits de la personne et des libertés fondamentales reconnus à tout être humain – alinéas 3(2)(a), (b), (c), (d) et (e)).
    • Aux termes des alinéas 3(3)(d) et (f) de la LIPR, l’interprétation et la mise en œuvre de la Loi doivent avoir pour effet d’assurer que les décisions prises en vertu de la présente loi sont conformes à la Charte, notamment en ce qui touche les principes d’égalité et de protection contre la discrimination, et qu’elles se conforment aux instruments internationaux portant sur les droits de la personne dont le Canada est signataire.

    Bien qu’il n’existe pas de considérations absolues liées à l’intérêt de l’enfant dans le contexte du droit de l’immigration et du droit des réfugiés, diverses dispositions de la LIPR prescrivent la prise en compte de l’évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant, dont les suivantes :

    • paragraphe 25(1) – Séjour pour motif d’ordre humanitaire à la demande de l’étranger;
    • article 25.1 – Séjour pour motif d’ordre humanitaire à l’initiative du ministre;
    • alinéa 28(2)(c) – le constat que des circonstances d’ordre humanitaire relatives au résident permanent justifient le maintien du statut et rend inopposable l’inobservation de l’obligation précédant le contrôle
    • article 60 – En vertu de la section 6 de la Partie I de la Loi, la détention des mineurs doit n’être qu’une mesure de dernier recours, compte tenu des autres motifs et critères applicables, y compris l’intérêt supérieur de l’enfant
    • alinéa 67(1)(c), paragraphe 68(1) et paragraphe 69(2) – procédure de la Section d’appel de l’immigration lorsque des appels sont fondés (alinéa 67(1)(a)); sursis à la mesure de renvoi (paragraphe 68(1)); rejet de l’appel du ministre (paragraphe 69(2)) sur preuve qu’il y a des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché

Représentation:

Jurisprudence

Intérêt supérieur de l’enfant / application de la Convention

  • Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817 – Un agent de l’immigration doit-il examiner soigneusement l’intérêt supérieur de l’enfant dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire qui pourrait avoir une incidence sur lui, dans le contexte d’une demande de résidence permanente pour des raisons d’ordre humanitaire? Oui. La Cour suprême du Canada a examiné la Convention, de même que l’importance des droits et de l’intérêt supérieur de l’enfant accordée dans d’autres instruments internationaux portant sur les droits de l’homme ratifiés par le Canada, en soulignant que les valeurs associées aux droits de la personne internationaux peuvent influer sur l’approche contextuelle en matière d’interprétation des lois et de contrôle judiciaire. Quand l’intérêt des enfants est minimisé, d’une manière incompatible avec la tradition humanitaire du Canada et les directives du ministre, la décision est déraisonnable. La Cour a estimé que l’agent d’immigration « devrait considérer l’intérêt supérieur des enfants comme un facteur important, lui accorder un poids considérable, et être réceptif, attentif et sensible à cet intérêt ».
  • L’affaire Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2015] 3 RCS 909, 2015 CSC 61 (CanLII) est importante à maints égards. Elle interprète et renforce le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, en plus d’établir que la notion de difficultés inhabituelles et injustifiées ne saurait généralement s’appliquer aux difficultés alléguées par un enfant à l’appui de sa demande de dispense pour considérations d’ordre humanitaire. La Cour d’appel du Canada a accueilli le pourvoi et renvoyé le dossier pour réexamen parce qu’elle a jugé que la décision de l’agente d’immigration était déraisonnable, en soulignant la nécessité de tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant « directement touché » et que cet intérêt représente « une considération singulièrement importante dans l’analyse ». Les instruments internationaux portant sur les droits de la personne dont le Canada est signataire, y compris la Convention relative aux droits de l’enfant, soulignent l’importance de l’intérêt supérieur de l’enfant. Cela comprend la nécessité de décider de ce qui, dans les circonstances, paraît le plus propice à la création d’un climat qui permettra le plus possible à l’enfant d’obtenir les soins et l’attention dont il a besoin, ainsi que de tenir compte de la « multitude de facteurs » qui peuvent avoir une incidence sur l’intérêt supérieur de l’enfant, de l’âge de l’enfant, de ses capacités, de ses besoins et de son degré de maturité.
  • L’affaire M.M. c. États‑Unis d’Amérique, [2015] 3 RCS 973, 2015 CSC 62 (CanLII) ne s’est pas déroulée strictement dans le contexte de l’immigration, mais elle est importante eu égard à la manière dont les instruments internationaux relatifs aux droits des enfants apportent un éclairage sur le rôle de l’intérêt supérieur des enfants dans la décision du ministre de la Justice d’extrader une mère et sur les répercussions qu’elle peut avoir sur ses trois enfants mineurs. La Cour suprême du Canada a examiné l’intérêt supérieur des enfants dans le contexte de l’extradition en comparaison avec une demande de résidence permanente pour des raisons d’ordre humanitaire dans le contexte de l’immigration. Les juges majoritaires ont cité la Convention et d’autres instruments qui reconnaissent l’importance de la sensibilité aux droits des enfants et à leur intérêt supérieur dans les décisions qui touchent leur avenir. Ils ont aussi déclaré que de tels instruments militent en faveur de la reconnaissance de l’obligation du ministre d’examiner attentivement l’intérêt supérieur de l’enfant qui est susceptible d’être touché par l’extradition d’une personne ou qui le sera. Cependant, la Cour a indiqué que le contexte criminel de l’extradition distingue le pouvoir dont le ministre est alors investi du pouvoir discrétionnaire d’ordre humanitaire qu’il exerce dans le contexte de l’immigration. En dernier ressort, ledit contexte établit que les conséquences de la mère faisant face à des accusations criminelles à l’étranger ne peuvent pas en elles-mêmes être perçues comme injustes ou oppressives. Les juges minoritaires ont estimé que le ministre n’a pas dûment pris en compte l’intérêt supérieur des enfants et que, eu égard à ses conclusions quant à la possibilité d’invoquer la défense visée par le Code criminel, sa décision d’ordonner l’extradition de la mère était déraisonnable. L’incertitude du ministre au sujet de l’intérêt supérieur des enfants aurait dû l’amener à se ranger du côté du droit des enfants d’être avec un parent aimant, et non du côté de l’extradition de la mère pour qu’elle réponde de ses actes dans un processus pénal dans un autre pays, où un moyen de défense clé ne peut être invoqué.
  • L’affaire Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] 2 RCF 555, 2002 CAF 475 (CanLII) a souligné que, selon les circonstances de chaque cas, on peut satisfaire à l’exigence selon laquelle l’intérêt supérieur de l’enfant doit être pris en compte en évaluant le degré de difficultés auquel le renvoi du père ou de la mère exposera l’enfant. Le concept de « difficultés injustifiées » n’est pas approprié lorsqu’il s’agit d’évaluer les difficultés auxquelles s’exposent les enfants innocents. Les enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés. En dernier ressort, les juges majoritaires ont estimé que l’agente d’immigration ne s’est pas montrée réceptive, attentive et sensible à l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans une opinion concordante, ils ont confirmé une jurisprudence antérieure selon laquelle l’intérêt supérieur de l’enfant devait être « bien identifié et défini ».
  • L’affaire de Guzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] 3 RCF 655, 2005 CAF 436 (CanLII) a examiné les répercussions de la LIPR sur les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne dont le Canada est signataire, dont la Convention. L’affaire concernant un appel interjeté par l’appelante à l’égard du refus d’un agent des visas de délivrer des visas à ses fils à titre de membres de la catégorie du regroupement familial. L’appelante avait omis de révéler leur existence dans sa demande de résidence permanente au Canada. Ses deux fils vivaient alors aux Philippines avec leur père. La Cour d’appel fédérale a jugé que l’alinéa 3(3)f) de LIPR attribue aux instruments internationaux portant sur les droits de l’homme dont le Canada est signataire « un rôle qui ne se limite pas à celui d’une source d’interprétation contextuelle pouvant être consultée pour résoudre les ambiguïtés ». Le tribunal a conclu qu’un instrument international portant sur les droits de la personne qui est juridiquement contraignant et dont le Canada est signataire, tel que la Convention, « est déterminant quant à la façon d’interpréter et de mettre en œuvre la LIPR, en l’absence d’une intention législative contraire ».

Droits d’un enfant réfugié dans le cadre de la Convention de La Haye

  • L’affaire A.M.R.I. v K.E.R., 106 O.R. (3d) 1, 2011 ONCA 417 (C.A.) a examiné l’interaction entre les obligations du Canada en vertu de divers instruments internationaux, y compris la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et la Convention relative au statut des réfugiés. La Cour d’appel de l’Ontario a examiné la Convention relative aux droits de l’enfant et jugé que le poids à accorder à l’intérêt supérieur de l’enfant dans cette dernière appuyait fortement la conclusion selon laquelle un juge de l’application de la Convention relative au statut des réfugiés doit traiter le statut de l’enfant en tant que réfugié, donnant ainsi lieu à une présomption réfutable d’un risque de persécution, si l’enfant est forcé de retourner dans son pays d’origine. La Cour a également fait référence à l’article 12 de la Convention à l’appui de sa conclusion suivant laquelle, dans le contexte d’un enfant réfugié, le point de vue de celui-ci revêt une plus grande importance. Étant donné l’intérêt en jeu, le tribunal a estimé plus particulièrement que, alors que le retour proposé de l’enfant a trait aux droits conférés par l’article 7 de la Charte, une protection procédurale importante doit être accordée à l’enfant, y compris une représentation juridique. Le fait qu’un enfant ne soit pas partie à la procédure ne porte pas atteinte à son droit d’être entendu.

Couverture en matière de soins de santé

  • L’affaire Canada c. Médecins canadiens pour les soins aux réfugiés et les autres, 2014 CF 651 a souligné que les décrets ayant réduit considérablement le niveau de couverture en matière de soins de santé fournie à des demandeurs d’asile en vertu du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI) étaient incompatibles avec les articles 12 et 15 de la Charte et que les modifications apportées au PFSI n’étaient pas justifiées en vertu de l’article premier, puisque leurs importants effets préjudiciables l’ont largement emporté sur leurs objectifs salutaires. La Cour fédérale a jugé que, bien que les conséquences négatives des modifications apportées au PFSI soient loin de toucher exclusivement les enfants de demandeurs d’asile au Canada, la cruauté engendrée par ces modifications est en particulier évidente dans le sens où celles-ci affectent les enfants. La Cour a également soutenu que, bien que les enfants doivent parfois subir les conséquences des actes de leurs parents, cela ne doit pas les exposer à des souffrances inutiles et avoir pour conséquence « que leurs vies pourraient être en danger en raison des choix faits par leurs parents ». Par ailleurs, la Cour a mentionné que le droit interne canadien reconnaît que l’intérêt supérieur des enfants devrait toujours être pris en compte et prévoit l’exercice, au besoin, de la compétence parens patriae afin de veiller à ce que les intérêts supérieurs des enfants soient protégés.

Sursis à l’exécution d’une mesure de renvoi et intérêt supérieur de l’enfant

  • L’affaire Martinez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1341 (CanLII) concernait une demande visant à surseoir à l’exécution d’une mesure de renvoi pour des raisons d’ordre humanitaire pendant que la demande de résidence permanente d’un père était en attente. La Cour fédérale a jugé qu’il était contraire à la Convention de « séparer le demandeur et ses enfants avant qu’une décision ne soit prise concernant la demande » pour des raisons d’ordre humanitaire « parce que ce n’est que pendant l’examen de cette demande que l’intérêt supérieur des enfants peut être pleinement étudié et traité comme une considération primordiale » en vertu de l’article 3 de la Convention. Autrement dit, il s’agit de savoir si l’existence de la demande pendante pour des raisons humanitaires constitue un empêchement au renvoi du demandeur parce que l’étude de ladite demande doit être complétée pour que soient remplies les obligations qu’a le Canada en vertu de la Convention.

Représentants désignés

  • Affaire Hillary c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CAF 51 (CanLII) – Un représentant désigné est-il nécessaire? La Cour d’appel fédérale a souligné que le paragraphe 167(2) de la LIPR reconnaît que, si leur intérêt doit être adéquatement protégé lors d’une procédure devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, les mineurs et les autres intéressés qui ne sont pas en mesure de comprendre la nature de la procédure, peuvent chercher de l’aide auprès d’un représentant désigné sensible à leurs besoins particuliers et à leur intérêt supérieur. En conséquence, le défaut de la Commission de se conformer aux obligations procédurales expresses et implicites que lui impose la LIPR constitue un manquement à un principe de justice naturelle. Si elle n’est pas représentée, la personne peut ne pas être en mesure de participer efficacement au processus décisionnel, en particulier lorsqu’elle affronte un adversaire plus puissant, comme un ministère.
  • Affaire Duale c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 150 (CanLII) – Est-ce qu’un mineur a besoin à la fois d’un conseil et d’un représentant désigné? Bien qu’elle ait été représentée par un conseil lors de l’audience, l’adolescente a franchi chaque étape de la procédure, à l’exception de l’audience même, sans l’aide qu’un représentant commis d’office était censé lui assurer. Cela est contraire au but et à l’esprit de la LIPR, des Règles aux directives du président de la Commission (Directives numéro 3 du président : Les enfants qui revendiquent le statut de réfugié), ainsi qu’aux Commentaires sur les Règles publiés par la Commission. Le besoin de désigner un représentant s’applique à la totalité de l’instance relativement à une revendication du statut de réfugié, et non pas seulement à l’audition même de la revendication. Par conséquent, l’obligation imposée au conseil d’aviser la Section de la protection des réfugiés que la personne « en cause » (dans l’affaire) est mineure s’applique au statut de la personne lors des conférences, des demandes, des entrevues et autres.

Autres affaires pertinentes relatives à l’intérêt supérieur de l’enfant dans le contexte des considérations d’ordre humanitaire :

Considérations spéciales

  • Il n’existe pas de droit à la représentation juridique pour les enfants dans le droit de l’immigration et le droit des réfugiés.
  • La section de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié doit désigner un représentant à l’intéressé qui n’a pas dix-huit ans (paragraphe 167(2) de la LIPR.
  • Le regroupement familial d’un parent réfugié avec sa conjointe ou son conjoint et ses parents peut être envisagé, mais il n’y a pas de regroupement familial dans le cas d’un enfant réputé être un réfugié avec ses parents et frères et sœurs (paragraphes 1(3) et 176(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés).
  • La citoyenneté acquise par filiation repose sur un lien génétique avec un parent canadien (la maternité de substitution par le truchement de donneurs anonymes n’est pas admissible (voir l’alinéa 3(1)(b) de la Loi sur la citoyenneté, ainsi que l’affaire Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Kandola, 2014 CAF 85 (CanLII).
  • Les mineurs non accompagnés peuvent être pris en charge par une autorité provinciale responsable de la protection de l’enfance, mais la définition d’un mineur n’est pas la même d’un ressort à l’autre au Canada. Par exemple, en Ontario, un enfant doit être âgé de moins de 16 ans lors de l’engagement initial d’un organisme de protection de l’enfance (paragraphe 37(1) de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille, L.R.O. 1990, chap. C.11; en Colombie-Britannique, des services de protection peuvent être fournis jusqu’à l’âge de 19 ans, conformément à l’article premier de la Child, Family and Community Service Act, [RSBC] Ch. 46.
  • L’enfant mineur qui se trouve au Canada est autorisé à y étudier au niveau préscolaire, au primaire ou au secondaire, à l’exception de celui du résident temporaire non autorisé à y exercer un emploi ou à y étudier (paragraphe 30(2) de la LIPR; voir aussi l’article 49.1 de la Loi sur l’éducation (de l’Ontario), L.R.O. 1990, chap. E.2, qui précise ce qui suit : « toute personne âgée de moins de dix-huit ans qui a par ailleurs le droit d’être admise à une école ne doit pas se faire refuser l’admission parce qu’elle-même ou son père, sa mère ou son tuteur se trouve illégalement au Canada ».
  • Le Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI) fournit différents niveaux de couverture des soins de santé à diverses catégories de réfugiés ou de demandeurs d’asile, y compris des enfants, et à d’autres demandeurs de statut à risque à l’intérieur du système d’immigration ou de réfugiés.

Pratiques essentielles

  • Les plaidoiries écrites et les plaidoiries orales soulignent les objectifs axés sur l’enfant et la famille de la LIPR (paragraphes 3(1) et 3(2)) et font référence à l’exigence particulière selon laquelle les décisions doivent être conformes à la Charte et aux instruments internationaux dont le Canada est signataire, dont la Convention (paragraphe 3(3)).
  • Examinez la possibilité de nommer un représentant désigné le plus tôt possible dans la procédure d’immigration ou de demande d’asile.
  • Recommandez la nomination d’un représentant désigné qualifié qui comprend son rôle et ses responsabilités à l’égard de l’enfant. La nomination prématurée d’un parent en tant que représentant désigné d’un enfant accompagné peut ne pas être pertinente dans des situations de violence familiale, de violence fondée sur le sexe ou sur l’honneur ou de mariage forcé, ou lorsque l’orientation sexuelle ou l’identité sexuelle d’un adolescent peut être une source de persécution et lorsque le soutien parental n’a pas été obtenu.
  • Assurez-vous que les enfants sont accompagnés par un adulte responsable lors de toutes les entrevues d’immigration, idéalement un conseil ou son représentant désigné (voir les motifs concourants de la juge Trudel, J.C.A dans l’affaire Kisana c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2010] 1 RCF 360, 2009 CAF 189 (CanLII), paragraphes 66-69)).
  • Examinez la possibilité de chercher ou de demander des pièces d’identité pour l’enfant le plus tôt possible.
  • Si vous agissez au nom d’un enfant dans un autre contexte (droit de la famille, protection de l’enfance, procédure dans le cadre de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, etc.), examinez l’incidence de toute ordonnance émise concernant le statut d’immigration de l’enfant et établissez des liens avec le conseiller juridique en immigration.
  • Examinez la possibilité d’une participation du ministre (en l’occurrence le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) à une procédure ne relevant pas de l’immigration en lien avec l’alinéa 50(a) de la LIPR qui prévoit qu’il y a sursis de la mesure de renvoi, notamment dans le cas où « une décision judiciaire a pour effet direct d’en empêcher l’exécution, le ministre ayant toutefois le droit de présenter ses observations à l’instance ».
  • Adoptez une approche prudente en matière d’échange d’information provenant d’une autre procédure avec les agents d’immigration en ce qui concerne les questions de protection des renseignements, de confidentialité et de cohérence de l’information.
  • Examinez tout problème particulier de nature linguistique, culturelle ou développementale que l’enfant peut avoir, de même que tout traumatisme qu’il a pu avoir subi et le besoin de services de soutien.
  • Plaidez en faveur de la mise en œuvre des recommandations relatives aux enfants demandeurs d’asile et réfugiés, contenues dans le rapport du 6 décembre 2012 du Comité des droits de l’enfant (CDE) des Nations Unies portant sur ses observations finales concernant les progrès accomplis par le Canada (CRC/C/CAN/CO/3-4, aux paragraphes 73 et 74). Dans son rapport, le CDE a examiné la conformité du Canada avec la Convention, notamment la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les procédures d’immigration et de demande d’asile; le recours à la détention seulement dans des situations exceptionnelles, sous réserve d’un contrôle judiciaire; l’établissement accéléré de tutelles pour les mineurs non accompagnés; et le traitement expéditif des demandes d’asile.

Ressources 

  • Caterina E. Tempesta, « Background document on “Immigration and Refugee Law » (2016)
  • James C. Hathaway & Michelle Foster, « The Law of Refugee Status », 2nd edition, (Cambridge: Cambridge University Press, 2014) en ligne.
  • Leigh Salsberg, « The Child as Immigrant » dans Jeffery Wilson et al., eds, Wilson on Children and the Law (LexisNexis Canada, 1994) (QL)
  • Michael Battista. & Kelly D Jordan « Canadian Family and Immigration Law: Intersections Developments and Conflicts », (Toronto: Carswell, 2015).
  • L'Association du Barreau canadien, « Designated Representatives in Immigration and Refugee Matters: Using Them to the Fullest Potential », Submission to the IRCC, (Ottawa: December 2015), en ligne.

Facta and Precedents

  • Kanthasamy v. Canada (Citizenship and Immigration), 2015 SCC 61 (Factum of the Intervener Justice for Children and Youth) (Factum of the Intervener, Justice for Children and Youth) en ligne.
  • ZH (Tanzania) (FC) v. Secretary of State for the Home Department, [2011] UKSC 4 en ligne.
  • Immigration Precedent – 2011 BIOC subs after UK case of ZH Tanzania
  • Immigration Precedent – EW Judicial Review Factum (redacted)
  • Immigration Precedent – Child Refugee (stigmatized health condition) oral submissions to RPD redacted 2012
  • Immigration Precedent – HC Submissions BIOC redacted
  • Immigration Precedent –BIOC JR Submissions

Relevant Guidelines, including Immigration Operational Guidelines

Education (Ontario) 

Social Science Articles and Books 

  • Jon G Allen, Coping with Trauma, Second Edition: Hope Through Understanding (American Psychiatric Association, 2004). 
  • Judith L Herman, Trauma and Recovery (Basic Books, 1997). 
  • Laura Simich  & Lisa Andermann  eds, Refuge and Resilience: Promoting Resilience and Mental Health among Resettled Refugees and Forced Migrants, (Springer Netherlands, 2014). 
  • Lisa Andermann L. & Hung-Tat (Ted) Lo, “Cultural Competence in Psychiatric Assessment” dans Davud Goldbloom, ed, Psychiatric Clinical Skills (Toronto: Centre for Addiction and Mental Health, 2010). 
  • Cultural Consultation Service, Guidelines for Cultural Assessment and Cultural Formulation(2016) en ligne. 
  • Cultural Formulation Interview DSM-V (APA Press) en ligne.