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Le chemin le moins fréquenté : le service extérieur du Canada comme choix de carrière, pourquoi pas?

01 juillet 2015 | Kim Nayyer

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Plus tôt cette année, dans l'article Oui, le diplôme en droit mène à tout, j’ai recensé les différentes carrières qu’ont choisies mes anciens camarades de la faculté de droit : j’ai trouvé parmi eux des hommes et des femmes politiques (dont une première ministre), un chef, des doyens, des juges, des professeurs de droit, et j’en passe.

J’ai d’ailleurs revu récemment une de mes amies mentionnées dans l’article, Sameena Quresh. Peu après son entrée au barreau, elle s’est jointe à ce qui s’appelle maintenant le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD). Cet emploi l’a conduite à Prague, à Milan, à Rome et à Beyrouth… outre des destinations moins exotiques : Edmonton et Ottawa. J’ai discuté avec Sameena et Cyril Borlé, l’un de ses collègues, qui m’ont parlé de leur travail, de leurs cheminements respectifs et de leurs perspectives d’avenir.

Ni Sameena ni Cyril n’avaient l’intention de devenir fonctionnaires des Affaires étrangères, et ni l’un ni l’autre n’avait donc choisi d’étudier en droit dans cette optique. Pourtant, les deux conviennent sans hésitation que leur formation a constitué un avantage pour leurs carrières respectives et leur servira de levier pour la suite, qu’importe le chemin qu’ils choisissent. « Une formation en droit mène à tout, affirme Cyril. Ce n’est pas une question de contenu, mais de méthode : on y apprend à penser de manière rationnelle. » Ayant commencé à travailler pour la division politique du ministère, il a vite été choisi comme liaison avec la division juridique.

Comme beaucoup d’entre nous, Sameena et Cyril ont choisi le droit non pas en poursuivant un rêve précis, mais plutôt avec l’objectif général de faire quelque chose d’utile et d’intéressant qui leur apporte au moins une certaine sécurité financière. Sameena avait toujours été intéressée par l’international. Elle se souvient d’une séance d’information sur les choix de carrière pendant sa première année à Osgoode : sa curiosité avait été piquée par une présentation du MAECI (le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international – son nom à l’époque) sur les choix de carrière pour les diplômés en droit. Néanmoins, une fois son diplôme en poche, elle choisit de rester à Toronto et d’y faire son stage pour ensuite devenir associée. « Je me voyais là longtemps, se rappelle Sameena. J’aimais ce que faisait le cabinet, j’y croyais et je croyais à son approche. »

C’est là que l’option des affaires étrangères montre à nouveau le bout de son nez. En effet, durant la première année de Sameena au cabinet, une entreprise lui offre un contrat de rêve à l’étranger. Elle part avec la bénédiction de son employeur, qui lui laisse la porte ouverte si elle décide de revenir. Dans le cadre de ce contrat, elle se rendra dans divers pays où elle séjournera chaque fois plusieurs mois. À son retour, elle a repris goût aux affaires internationales. Grâce à une rencontre fortuite, elle apprend que le MAECI recrute activement des avocats. Elle se porte candidate et, huit ans après sa collation des grades, elle peut « marier » sa formation en droit, son intérêt redécouvert pour les affaires internationales et « de nouvelles compétences linguistiques » dans une carrière au MAECI. (Plus tard, en fonction de ses affectations, le ministère lui fournira des cours de français, d’italien et de tchèque.)

L’aventure de Cyril part aussi de son intérêt pour le vaste monde : quelques années après être sorti de la faculté de droit, Cyril se rappelle avoir fait les examens d’entrée du MAECI lorsqu’il était étudiant de premier cycle, mais avoir abandonné cette option au profit du droit. Il avait choisi l’Université de Victoria pour son programme d’alternance travail-études, qui lui permettait apparemment d’aller vivre et travailler dans une autre ville, voire à l’étranger, pendant ses études. Comme il ne savait pas vraiment quel aspect du droit l’attirait, il se disait que ce programme l’aiderait à se faire une idée. C’est ainsi qu’il a été amené à travailler dans des ministères provinciaux et fédéraux et dans deux cabinets : l’un en Ontario et l’autre en Thaïlande.

Ce dernier emploi sera déterminant. Ayant obtenu son diplôme, Cyril fait son stage en Alberta. À cette époque, il voudrait devenir avocat de société ou pratiquer le droit des sociétés ou le droit commercial dans un cabinet. Mais la Thaïlande l’appelle. Cyril retourne donc travailler pour le cabinet thaïlandais qui l’avait accueilli pendant ses études. (Comme il n’était pas membre du barreau de Thaïlande, il occupera un poste de conseiller.) C’est là-bas qu’il rencontre sa future femme, et lorsqu’ils rentrent au Canada, Cyril repense aux examens du MAECI.

Que ce serait-il passé s’il avait poursuivi la carrière traditionnelle qu’il avait envisagée? « Je me serais établi quelque part et j’aurais peut-être gagné plus d’argent, mais je n’aurais pas eu autant de plaisir et j’aurais moins eu l’impression d’être au cœur de l’action, » suppose Cyril. Quelques exemples : il a vécu trois ans à La Haye, où il jouait un rôle d’intermédiaire entre la Cour pénale internationale et des tribunaux; au début de son cheminement, il a été affecté pendant 18 mois à la force opérationnelle en Afghanistan, où il travaillait de près avec le service juridique du MAECD lorsque la question des détenus est apparue. Il s’est retrouvé à Kaboul pendant deux semaines, « une expérience professionnelle unique. »

Autant Cyril que Sameena soulignent la multiplicité des affectations rendue possible par leur courte durée. « C’est un développement professionnel continu : les gouvernements changent et les événements politiques se succèdent. Nous vivons dans un creuset en perpétuelle transformation, » s’émerveille Sameena. « La description de poste change tous les deux à quatre ans, mais un événement international peut la changer du jour au lendemain, » ajoute Cyril en citant l’exemple de l’Afghanistan.

« Nous sommes des généralistes avec une sous-spécialisation, » explique Sameena. « Pour quelqu’un qui cherche la variété, qui s’intéresse au chemin le moins fréquenté, c’est intéressant. » Ce travail ne conviendrait peut-être pas à ceux qui veulent faire une carrière dans une sphère précise du droit, « mais on peut créer son propre travail, » indique Cyril. « Concentrez-vous sur vos préférences. On peut faire évoluer sa propre carrière dans des directions différentes et changeantes. »

Les deux conviennent que le travail pour le MAECD est un choix de style de vie et conseillent à ceux qui ont une famille ou un conjoint ayant aussi une carrière active à y penser à deux fois. Cela dit, les enfants de Cyril, aujourd’hui adolescents, sont heureux d’avoir vécu à La Haye leurs premières années du secondaire. « Il y a un bon équilibre entre le travail et la vie personnelle dans les affaires étrangères. »

Enfin, Sameena et Cyril soulignent qu’ils sont au service de l’État. « On est fier de représenter son pays », explique Sameena. Lors de rencontres internationales, « on prend place dans le fauteuil? Canada, » renchérit Cyril. « Personne d’autre ne peut être là. »

À propos de l'auteur

Kim Nayyer est bibliothécaire universitaire associée en droit et professeure agrégée adjointe à l’Université de Victoria.