Chère Advy,
Je suis avocate exerçant le droit de la famille au sein d’un cabinet de taille moyenne. J’ai toujours aimé ce domaine de pratique et je pense faire du bon travail. Le problème est que je vis actuellement un divorce très difficile et que, par conséquent, je m’identifie un peu trop aux causes de mes clients et que leurs histoires m’ébranlent. Le droit de la famille est déjà assez prenant et je n’ai vraiment pas besoin d’un bouleversement émotionnel tous les après-midi. Avez-vous des idées sur la façon dont je pourrais continuer à pratiquer efficacement (je ne changerai certainement pas de domaine!) sans prendre chaque cause trop personnellement?
- Avocate en instance de divorce
Chère Avocate en instance de divorce,
Mes conseils comportent trois volets :
- Limites
- Limites
- Limites
Je sais, vous dire de fixer des limites c’est un peu comme crier à quelqu’un qui a une crise d’hyperventilation de respirer plus lentement. Alors, comment établir des limites dans une situation bien réelle comme la vôtre?
1. Limites
Il est normal que vous voyiez des points en commun entre ce que vos clients vivent et ce que vous traversez. Mon premier conseil est de ne pas vous autoflageller parce que vous remarquez ces choses. Le problème n’est pas là. Le problème est votre réaction au moment de les remarquer. Votre travail consiste d’abord et avant tout à vous rendre compte de ces réactions.
Envisagez d’utiliser des outils de pleine conscience pour gérer ces réactions. Lorsque vous remarquez que le problème d’un client reflète l’un de vos propres problèmes, prenez-en note. Il peut être utile de garder un journal près de votre espace de travail pour prendre des notes afin d’y réfléchir plus tard. Il est étonnant de voir à quel point il est facile de dompter votre turbulent subconscient lorsque vous lui garantissez que vous vous pencherez sur ce qui le chicote au moment présent. Comme outil d’autogestion, il est beaucoup plus efficace de se dire « je réfléchirai plus tard à mes inquiétudes, obsessions ou pensées sur ce sujet » que « je devrais toujours éviter ces inquiétudes, obsessions ou réflexions ». Sinon, c’est un peu comme si vous vous lanciez dans un régime éclair alors que votre objectif est de perdre du poids. Votre subconscient enquiquinant trouvera le moyen de mettre la main dans le sac de biscuits cognitifs si vous le privez totalement de ce qu’il veut, alors qu’il est beaucoup plus simple de contrôler rationnellement la quantité de biscuits-pensées que vous pouvez manger.
Maintenant, afin de préserver votre crédibilité auprès de votre subconscient, développez l’habitude de prendre le temps d’analyser les réflexions que vous avez consignées dans un cadre approprié. La pensée elle-même n’est pas mauvaise et elle pourrait même vous donner un aperçu de votre vie ou de votre pratique. Le fait de noter les points en commun peut être un moyen de vous améliorer dans ce que vous faites si vous gérez la situation de la bonne manière. Préparez-vous une tasse de thé, asseyez-vous dans un fauteuil confortable et ouvrez votre journal pour écrire des réflexions supplémentaires sur votre réalisation. Vous trouverez probablement cela moins bouleversant et plus instructif que vous ne l’aviez d’abord cru.
Essayez de noter l’heure et les circonstances entourant cette pensée troublante. Si vous ne pouvez pas le faire au début du processus, ne vous en faites pas, mais il ne fait aucun doute que cela vous aidera à beaucoup mieux fixer vos limites au fil du temps.
2. Limites
Voici un autre avantage de vous donner une occasion de prendre du temps en votre compagnie et d’analyser le déclencheur : vous pouvez remarquer que les problèmes que vous rencontrez et les soucis dont vous font part vos clients ne sont pas les mêmes. Aucune personne, aucune famille et aucun divorce n’est identique à un autre. Si vous commencez à remarquer que les émotions qui se manifestent en premier lieu sont souvent erronées, il est possible que vous développiez la capacité de voir ces différences au moment où ces émotions surgissent. Cela aura un effet salutaire sur votre capacité à aider vos clients. Si vous leur donnez des conseils qui se fondent sur ce que vous vivez dans votre vie personnelle et non sur leurs besoins, vous leur donnerez probablement de mauvais conseils ou, à tout le moins, vous ne les écouterez plus. Tout ce qui peut vous nuire dans l’exercice de l’écoute active peut constituer un problème.
Utilisez les réflexions de votre journal comme une façon de résister à cette petite voix intérieure qui tente de vous convaincre que tout tourne autour de vous.
3. Limites
Vous pouvez maintenant remarquer d’autres choses au sujet de ces émotions qui surgissent. Existe-t-il un patron par rapport au moment où elles apparaissent? À la façon dont elles apparaissent? Je remarque que vous avez parlé de l’après-midi. Est-ce que vous vivez généralement ces situations vers la même heure de la journée? S’agit-il normalement d’un type semblable d’appel téléphonique, de courriel ou de vidéoconférence? Y a-t-il un genre de cas ou de problème qui déclenche plus intensément ces pensées? Recherchez des patrons. Si vous le pouvez, demandez à une personne de confiance d’y jeter un coup d’œil et de vous indiquer si elle remarque des patrons que vous ne voyez peut-être pas. Cela ne sera peut-être pas possible, mais si vous avez cette possibilité, assurez-vous d’y avoir recours.
Imaginons que vous constatez que ces situations se présentent normalement vers 14 h 30 ou 15 h. Quand avez-vous l’habitude de dîner? Avez-vous faim, êtes-vous fatigué, avez-vous mal au cou lorsque vous avez des vidéoconférences tout au long de la journée?
Devenez votre meilleur ami et demandez-vous ce que vous pouvez faire pour vous assurer que vous êtes moins vulnérable à l’anxiété, à la dépression et au bouleversement à ces moments-là. Que pouvez-vous faire pour aider la personne que vous serez demain à respecter ces limites?
- Êtes-vous en contact avec d’autres personnes en dehors du travail ou êtes-vous socialement isolé?
- Obtenez-vous suffisamment de sommeil de qualité?
- Pourriez-vous réduire votre semaine de travail?
- Pourriez-vous réduire le nombre d’heures que vous travaillez tous les jours?
- Pourriez-vous prendre des vacances?
- Y a-t-il certains types de dossiers que vous devriez peut-être laisser de côté pendant une période parce qu’ils ressemblent trop à ce que vous vivez personnellement? Comme l’a dit un jour un sage, pour éviter de glisser, évitez les surfaces glissantes.
Prenez une collation devant l’ordinateur. Faites une sieste. Faites une promenade juste avant (ou juste après) cette période critique. Regardez des photos mignonnes de votre chien. Faites jouer du Gloria Gaynor sur votre lecteur de musique de prédilection, fermez votre porte et dansez en faisant du lip-sync. Même si vous pouvez seulement danser avec vos épaules à votre bureau, bougez d’une façon qui vous permet de dominer le rythme effréné de vos pensées.
Vous sentirez-vous ridicule au début? Certainement! Imaginez le malaise que je ressens en vous avouant que j’écoute de la musique disco des années 70. [À ma défense, j’ai renoncé sans hésiter à installer une boule disco dans mon bureau. Il faut des limites, quand même!] En fait, vous ne vous sentirez pas ridicule à tout jamais et vous n’aurez pas à recourir à ce processus à tout jamais. Il s’agit simplement d’une habitude pour garder la tête haute et vous n’aurez pas besoin de cette aide pour le reste de votre vie.
Même si c’était le cas, vous aurez découvert un nouveau talent inné pour offrir des prestations spectaculaires de karaoké. Ne recherchiez-vous pas justement une excuse pour prendre un bandeau de paillettes de toute façon? Peut-être que je m’éloigne du sujet.
Bref, il vaut la peine de prendre soin de vous, même si vous êtes maintenant la seule personne à le faire. Pensez à la version de vous qui est sur le point de se manifester et décidez maintenant de la façon dont vous allez aider cette personne avec compassion. L’utilisation de ces techniques vous aidera à soutenir plus efficacement cette future version de vous-même.
Prenez bien soin de vous,
- Advy