Brûlée-et-épuisée

09 août 2022

Chère Advy, 

Je suis avocate salariée principale en pratique privée en matière de litiges. J’adore la pratique privée, mais il m’arrive parfois d’être confrontée à du sexisme typique de la part de mes collègues et des associés masculins. Ce qui me surprend et me déstabilise énormément, c’est qu’un grand nombre des remarques sexistes dont je fais l’objet sur une base régulière (et bien plus fréquente) est émis par des associées féminines en pratique privée. Certaines sont des mentores extraordinaires qu’il est formidable de côtoyer, mais d’autres agissent comme si le nombre de femmes pouvant se retrouver « au sommet » était limité et ainsi intimident activement des avocates salariées féminines ou leur refusent des possibilités (qui sont par la suite accordées à des hommes). Il est incroyablement décevant de constater que des femmes ayant suivi le même parcours et ayant probablement été confrontées aux mêmes obstacles agissent d’une manière aussi arriérée. Quelle est la meilleure façon de gérer les situations d’intimidation basée sur le genre en milieu de travail? 

Sincères salutations,
Brûlée-et-épuisée


Chère Brûlée-et-épuisée,

Ce genre de situation peut être assez délicat.
Les femmes devraient être les meilleures alliées des femmes, mais la triste réalité est que ce n’est malheureusement pas toujours le cas, et ce, dans toutes professions. Je ne cherche pas à excuser ce type d’intimidation, mais il peut arriver que les hommes et les femmes occupant des postes d’envergure aient l’impression qu’ils ont dû se battre afin d’obtenir ces rôles et croient à tort que les femmes qui marchent sur leurs traces devraient se buter aux mêmes types d’embûches qu’eux. 

Vous avez raison, il ne devrait pas en être ainsi. Il s’agit toutefois de la réalité avec laquelle nous devons composer, alors voici mes suggestions. Vous devez déterminer s’il s’agit d’un incident isolé ou d’un problème récurrent. Dans ce dernier cas, je vous recommande de noter les détails de chacun des incidents. Demandez-vous s’il s’agit d’un problème récurrent qui nuira à votre carrière. Si vous avez l’impression que cette situation vous empêche d’évoluer dans le cadre de votre pratique, je vous recommande d’en parler avec l’une des mentores positives dans votre entourage. Lors de cette conversation, assurez-vous de ne pas simplement accuser les intimidateurs et de ne pas trop mettre l’accent sur la façon dont vous avez été traitée, mais demandez plutôt des conseils sur la meilleure manière de faire progresser votre carrière. Mentionnez des possibilités précises qui vous ont été refusées et demandez à votre mentore ce qu’elle vous recommande de faire pour que votre candidature soit considérée la prochaine fois qu’une telle opportunité se présentera. Il est fort probable que votre mentore soit au courant de la situation, c’est pourquoi je souhaite insister sur le point suivant : il est essentiel de vous assurer de ne pas transformer la conversation en une séance de dénigrement d’autres juristes (et ce, même si votre mentore tient les premiers propos du genre). Conservez une attitude professionnelle et concentrez-vous sur votre avancement professionnel, et non sur les intimidateurs.

Vous pouvez aussi considérer discuter de la situation en toute confidentialité avec une associée principale ou un associé principal en qui vous avez confiance. Les cabinets ont avantage à régler ces situations. Sans quoi, ils portent atteinte à la confiance de leurs employés et peuvent même la perdre. Les cabinets souhaitent retenir les jeunes juristes de talent comme vous.

Je vous suggère aussi de vous renseigner sur les politiques de votre cabinet en matière d’intimidation. Il est possible qu’une politique des RH en place permette de remédier discrètement à la situation, auquel cas vous n’aurez pas à réinventer la roue.

Pour ce qui est de trouver un équilibre entre votre bien-être et les interactions avec ces personnes difficiles au quotidien, vous devez accepter qu’il est impossible de changer la manière dont elles agissent; vous pouvez seulement changer votre façon de réagir à leurs actions. Si vous souhaitez rester au cabinet juridique où vous travaillez actuellement, je vous suggère d’adopter des mécanismes d’adaptation sains. Parlez à votre fournisseur du programme d’aide aux juristes local pour trouver des stratégies vous permettant de mieux faire face à la situation. Prenez le temps de faire de l’exercice chaque jour, même si vous ne faites le tour de votre immeuble qu’une ou deux fois. Vous arrêter pour respirer et vous éloigner du bureau, même pour quelques instants, peut avoir un effet bénéfique considérable sur votre humeur et votre niveau de stress. Prenez soin de vous de toutes les manières possibles afin de protéger votre propre santé mentale. Songez également à consulter un conseiller professionnel pour savoir comment protéger votre santé et établir un plan pour régler le problème sous-jacent. Il est aussi important de comprendre que vous servez sans doute simplement de bouc émissaire pour les intimidateurs. Ces comportements proviennent habituellement de problèmes personnels avec lesquels les intimidateurs luttent intérieurement.

Si vous pensez que ces suggestions ne vous aideront pas à améliorer votre situation actuelle et que vous avez épuisé toutes les possibilités, vous pourriez envisager de changer d’emploi. N’oubliez pas que vous pourriez toutefois être confrontée à une situation semblable ailleurs également. Vous pouvez aussi considérer avoir recours aux services d’un juriste à ce point.

Si vous quittez votre emploi, assurez-vous de rester en contact avec les juristes qui ont été d’excellents mentors. Développez un réseau de mentors qui vous appuieront tout au long de votre parcours et concentrez-vous sur l’énergie positive qu’ils vous envoient, et non sur les aspects négatifs de votre travail. 

Je termine cette lettre en vous rappelant que vous pouvez choisir de bien agir et d’être une meilleure mentore lorsque votre tour viendra et que vous occuperez un rôle d’envergure. Donnez l’exemple en étant une juriste qui excelle dans sa pratique ainsi qu’une mentore exceptionnelle pour les futures juristes afin que les intimidateurs deviennent l’exception et non la norme.

Prenez bien soin de vous et ne baissez pas les bras,
Advy

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