Voir vert : l’ABC répond au document de consultation sur la sécurité nationale

05 décembre 2024

Lorsque le gouvernement précédent a promulgué sa Loi antiterroriste de 2015, mieux connue dans certains cercles comme le très controversé projet de loi C-51, les libéraux ont voté en sa faveur, disant qu’ils corrigeraient les erreurs qu’elle contient une fois élus.

Un an après avoir assumé le pouvoir, le gouvernement libéral a commencé à s’acquitter de sa promesse sous la forme du dépôt du projet de loi C-22, pour créer un Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et de la publication de son Livre vert sur la sécurité nationale l’automne dernier pour stimuler la discussion sur la question et sur les politiques, procédures et lois qui doivent être mises en place pour lutter contre le terrorisme.

S’agissant du projet de loi C-51, l’ABC a convenu qu’il importe de protéger la population canadienne contre les actes de terrorisme. Cependant, c’était l’un des rares terrains d’entente avec un projet de loi qui, selon elle, était à certains importants égards, inconstitutionnel.

Dans sa réponse au Livre vert, l’ABC exprime son inquiétude quant au fait que le gouvernement actuel pourrait ne pas apporter de solution à ses préoccupations.

Selon l’ABC, le Livre vert comporte un grand nombre de scénarios qui questionnent sur les réponses appropriées de l’État face à des menaces supposées. Il n’indique pas la façon dont la législation proposée pourrait nuire aux droits civils, présentant par conséquent une vue déséquilibrée qui ne permet pas au lecteur de prendre des décisions en pleine connaissance de cause.

[TRADUCTION] « L’ABC convient que la protection de la sécurité des Canadiens et des Canadiennes et la protection des valeurs constitutionnelles de la population du Canada sont des responsabilités du gouvernement fédéral tout aussi fondamentales l’une que l’autre », affirme le mémoire (disponible uniquement en anglais).

« Malheureusement, les scénarios présentés dans le Livre vert semblent favoriser la mise en œuvre des articles les plus controversés du projet de loi C-51, malgré l’engagement du gouvernement à le réexaminer minutieusement ».

Le mémoire de l’ABC présente 23 recommandations dans des domaines incluant la responsabilisation, la prévention de la radicalisation, les incidences du partage des renseignements sur les droits à la vie privée, et les mesures de lutte contre le terrorisme ajoutées au Code criminel par la Loi antiterroriste de 2015.

Le mémoire exhorte à la mise en place de solides mécanismes de contrôle des agences de sécurité nationale du Canada et d’un « mécanisme complet d’examen de l’infrastructure de sécurité nationale dans son ensemble ». Il exhorte en outre le gouvernement à modifier les dispositions sur le mandat  judiciaire prévues dans la Loi antiterroriste de 2015 « pour que les mandats délivrés par le SCRS ne puissent en aucun cas violer la Charte » et à modifier la Loi de façon à ce que le SCRS ne puisse ni détenir arbitrairement des personnes, ni leur infliger des sévices psychologiques; deux catégories de mesures qui ne font actuellement, ni l’une ni l’autre, l’objet d’interdictions expresses.

Tout comme le mémoire de 2015 au sujet du projet de loi C-51, le récent mémoire de l’ABC signale que les organismes de bienfaisance enregistrés peuvent considérer la législation antiterroriste comme « excessivement vaste et peu claire ».

[TRADUCTION] « Les représentants des organismes de bienfaisance qui opèrent sur la scène internationale signalent fréquemment qu’un manque de règles ou de directives claires venant du gouvernement fédéral se traduit par le fait qu’ils ne savent pas avec certitude comment se conformer à la législation antiterroriste canadienne », affirme le mémoire. « Les juristes ne peuvent pas assurer aux organismes de bienfaisance en toute sécurité que le fait d’adopter, de mettre en œuvre et de respecter une politique complète de lutte contre le terrorisme qui impose aux projets, aux partenaires et aux donateurs de faire preuve de la diligence requise constituera une défense suffisante face à des allégations de facilitation du terrorisme, directement ou indirectement. »

Le mémoire présente un certain nombre de recommandations concernant l’apport de modifications pour régler ce problème, y compris la mise en place « d’une exigence claire de mens rea », c’est-à-dire que l’organisme de bienfaisance doit savoir que ses ressources seront utilisées à mauvais escient, et l’établissement de directives qui leur permettront de « prouver la diligence requise dans le cadre de la conformité à la législation antiterroriste ».