2. Utilisation de l’intelligence artificielle dans la pratique du droit : un aperçu

2.1 Utilisation de l’IA intégrée à un outil par rapport à la décision consciente d’utiliser l’IA

L’IA (sous ses diverses formes) est maintenant intégrée aux plateformes traditionnelles plus anciennes utilisées dans l’exercice des fonctions juridiques (y compris, sans s’y limiter, les anciens moteurs de recherche, les navigateurs, les bases de données judiciaires et autres outils [p. ex., Thomson Reuters Casetext, Westlaw, entre autres]).

Principaux éléments à retenir : Vous utilisez probablement déjà l’IA dans le cadre de l’exercice de vos fonctions juridiques.

Au fur et à mesure que l’IA devient progressivement et souvent intégrée d’une façon qui ne peut être détectée à des plateformes et à des outils plus connus, les professionnels du droit doivent comprendre qu’ils peuvent utiliser l’IA (avec tous les risques qu’elle comporte) sans le savoir, en l’absence d’une surveillance diligente et constante.

2.2 Utilisation consciente de l’IA : Quelques options

2.2.1 Recherche juridique

Depuis de nombreuses années, l’IA aide les juristes à effectuer des recherches juridiques. Toutefois, grâce aux modèles de langage de grande taille, l’IA générative permet d’effectuer une recherche conversationnelle. Après avoir entamé une telle recherche, les juristes obtiennent un résumé de la réponse à leur demande de renseignements, ou ils peuvent utiliser les résultats de leur recherche pour faire des prédictions.

Comme nous l’avons déjà mentionné, l’IA générative n’a pas été conçue, à l’origine, pour être utilisée dans le cadre de l’exercice des fonctions juridiques ni pour exécuter des tâches juridiques précises et offrir des mesures de protection appropriées afin d’atténuer les risques inhérents à son utilisation. Au fur et à mesure que de plus en plus d’outils sont élaborés spécialement pour les juristes, nous nous attendons à ce que des mesures de protection supplémentaires soient intégrées aux outils dans le but de réduire les risques liés à l’utilisation des outils d’IA générative dans le cadre de l’exercice des fonctions juridiques.

2.2.2 Production de documents juridiques

Les juristes consacrent une grande partie de leur temps à rédiger des documents. Il est possible de gagner du temps en appliquant l’IA et la technologie novatrice à la rédaction de documents. À l’aide d’un outil fiable alimenté par l’IA générative, les juristes peuvent automatiser certaines tâches de rédaction et produire des versions préliminaires de documents d’une façon très efficace, ce qui leur laisse davantage de temps pour établir des stratégies et accroître leur capacité à fournir des services juridiques. Par exemple, certains outils d’IA générative examineront et proposeront des libellés pour les contrats, vérifieront s’il manque des dispositions et trouveront des modalités contradictoires.

2.2.3 Communication préalable/examen de premier niveau des documents

Les juristes qui ont recours à la preuve électronique savent comment utiliser la technologie de façon à rendre le processus d’examen des documents plus facile à gérer. Certains veulent savoir comment utiliser l’IA générative pour atténuer la lourde tâche qu’est l’examen des documents.

Dans le but de mieux comprendre les caractéristiques actuelles de l’IA générative, en particulier celles de l’outil GPT-4, pour la preuve électronique, un cabinet juridique international a collaboré avec une entreprise mondiale de technologie juridique dans le cadre d’une évaluation expérimentale visant à évaluer le rendement de l’outil GPT-4 standard en matière de codage des documents pour en vérifier la réactivité1.

Les résultats ont amené les chercheurs à conclure que : [TRADUCTION] « l’IA générative pourrait entraîner un changement radical dans un avenir assez rapproché en ce qui concerne la façon dont le travail connexe à la preuve électronique est effectué. Plus précisément, les capacités d’évaluation et de réactivité de ChatGPT pourraient remplacer ou accroître avec succès les fonctions qui sont historiquement exécutées par des juristes ou par des outils d’évaluation traditionnels comme l’examen assisté par la technologie (EAT). »2

Comparativement à la réalisation de l’examen manuel de documents, l’utilisation d’un logiciel d’EAT rend l’examen de gestion des documents beaucoup moins chronophage, plus facile à gérer, précis et uniforme, Pour une explication détaillée sur les outils d’EAT et leur évolution, voir le Sedona Conference TAR Case Law Primer et les définitions qui y sont contenues.3

Bien qu’ils aient affirmé que l’IA générative pourrait créer un changement radical, les chercheurs ayant mené l’expérience référencée ont souligné que la capacité du GPT-4 était quelque peu limitée quant au codage exact de certains documents, et ils ont également fait remarquer que le GPT-4 analyse les documents à un rythme beaucoup plus lent que les outils d’EAT actuels, bien que nous nous attendions à ce que les vitesses s’améliorent considérablement au fil du temps4.

2.2.4 Robots conversationnels et assistants virtuels

Le maintien et la gestion d’un cabinet juridique prennent du temps. Certains cabinets examinent comment l’IA générative, grâce aux robots conversationnels et aux assistants virtuels, peut les aider à fixer des rendez-vous et à fournir des renseignements de base sur les activités du cabinet ou sur les services juridiques qu’il offre. L’utilisation de tels outils peut aider les cabinets juridiques qui traitent un grand volume de demandes de renseignements de la part des clients, ou les petits cabinets où les juristes doivent souvent s’occuper de l’aspect commercial de leur entreprise tout en gérant l’exercice de leurs fonctions juridiques.

Principaux éléments à retenir : L’IA générative peut offrir plusieurs avantages aux juristes dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions juridiques. Elle peut leur permettre de simplifier les processus ou de réaliser des gains d’efficacité. L’automatisation des tâches courantes qui sont onéreuses ou fastidieuses devrait accroître les occasions pour les juristes de se concentrer sur des tâches juridiques haut de gamme qui peuvent les aider à éviter l’épuisement professionnel, ou à réduire son avènement.

Principaux éléments à retenir : À l’origine, l’IA générative n’a pas été conçue pour être utilisée dans le cadre de l’exercice des fonctions juridiques des juristes ni pour exécuter des tâches juridiques précises. Elle ne comporte pas de mesures de protection adéquates visant à atténuer les risques inhérents à son utilisation. Lorsqu’ils déterminent s’il y a lieu d’utiliser l’IA générative dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions juridiques, les juristes et les cabinets juridiques doivent faire preuve de diligence raisonnable, vérifier l’exactitude des données, comprendre les risques et les façons de les atténuer, y compris, sans s’y limiter, assurer une veille prudente.

Endnotes

1 American Lawyer. (13 décembre 2023). Replacing Attorney Review: Sidley’s Experimental Assessment of GPT-4’s Performance in Document Review. Consulté le 31 octobre 2024.

2 Idem.

3 The Sedona Conference. (2023). TAR Case Law Primer, 2nd Edition. Consulté le 31 octobre 2024.

4 Précité, note 12.