Le précontrôle ne devrait pas empiéter sur les droits de la population canadienne

20 décembre 2017

En décembre, l’ABC a comparu devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense pour réitérer ses préoccupations quant au projet de loi C-23, Loi sur le précontrôle (2016).

C’était en mars que la Section du droit de l’immigration, la Section du droit pénal et la Section de la taxe à la consommation, des douanes et du commerce de l’ABC ont souligné leurs maintes préoccupations au sujet du projet de loi proposé. Elles les ont ensuite résumées dans une lettre adressée au comité sénatorial en décembre.

Les sections disent appuyer le concept de précontrôle et reconnaître les avantages économiques que produirait une circulation plus libre des personnes et des marchandises entre le Canada et les États-Unis, mais déclarent ne pouvoir appuyer le projet de loi sous sa forme actuelle.

« Nous réitérons que le projet de loi C-23 porte une atteinte inutile et injustifiée aux droits et aux libertés des voyageurs canadiens, et nous insistons pour qu’il soit modifié afin de remédier à la situation. »

Les sections nourrissent cinq préoccupations majeures à l’égard du projet de loi et offrent autant de recommandations pour y remédier.

  1. Préoccupation : Le libellé actuel augmente considérablement les pouvoirs des contrôleurs américains, leur accordant une vaste capacité pratiquement illimitée de soumettre les voyageurs à des interrogatoires. Quiconque refuserait de réponse à ces questions pourrait être détenu et interrogé indéfiniment.
    Recommandation : Modifier le projet de loi afin de permettre à un contrôleur américain de n’interroger un voyageur qu’aux fins de son identification ou de l’obtention des raisons de sa décision de se soustraire à l’interrogatoire.
  2. Préoccupation : Les contrôleurs américains, qui n’ont aucune formation dans les domaines de la législation et des droits au Canada, pourraient soumettre les voyageurs canadiens à des fouilles à nu en l’absence de tout personnel de l’Agence des services frontaliers du Canada.
    Recommandation : Modifier le projet de loi afin d’exiger que toutes les fouilles à nu soient effectuées par un agent de l’ASFC ou, si aucun agent n’est disponible, qu’elles soient effectuées par un agent de la paix du Canada.
  3. Préoccupation : Les agents canadiens pourraient refuser l’entrée au Canada aux résidents permanents qui passent par une zone de précontrôle.
    Recommandation : Modifier le projet de loi afin d’autoriser les résidents permanents à entrer au Canada sans entrave en vertu du droit que leur confère la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
  4. Préoccupation : En raison des rapides avancées de la technologie, les agents frontaliers ont de beaucoup plus nombreuses et vastes occasions de recueillir et de communiquer des renseignements au sujet des voyageurs transfrontaliers, particulièrement au moyen des téléphones intelligents transportés par la plupart d’entre eux; téléphones qui peuvent s’avérer de riches sources de renseignements personnels confidentiels. Le projet de loi C-23 décuplerait cette capacité, ce qui causera probablement un problème particulier dans le cas d’avocats qui transportent, sous forme électronique ou sur papier, des documents protégés par le secret professionnel.
    Recommandation : Le Canada devrait négocier avec les États-Unis pour qu’ils étendent la protection de la Privacy Act américaine de 1974 à la population canadienne, et pour qu’ils adoptent une politique transparente en matière de fouille des documents et des appareils électroniques cadrant avec les lois canadiennes sur la protection de la vie privée. Il devrait en outre exister un processus simplifié pour les documents protégés par le secret professionnel de l’avocat en zone de précontrôle.
  5. Préoccupation : Les voyageurs dont les droits sont violés dans les zones de précontrôle ne disposent que de recours limités.
    Recommandation : Mettre en place un mécanisme efficace de surveillance et de traitement des plaintes.

Les sections exhortent le gouvernement à entreprendre des consultations approfondies et à modifier le projet de loi pour répondre à ces préoccupations.