Nous avons fait beaucoup de chemin. Au fil du temps, les sociétés ainsi que les attitudes envers certains comportements évoluent. Même s’il faut plus de temps pour modifier certaines lois plutôt que d’autres, une fois qu’une conduite est mieux acceptée du point de vue social, petit à petit, les lois qui la régissent sont abandonnées.
Cependant, il en est tout autre pour les condamnations prononcées sous le régime de ces lois.
Nombreux sont les membres de la communauté LGBTQ2S qui détiennent toujours un dossier judiciaire par suite d’activités qui sont légales depuis longtemps. C’est justement ces personnes que le projet de loi C-66, Loi sur la radiation de condamnations constituant des injustices historiques, est censé aider.
Dans une lettre adressée au Comité sénatorial des droits de la personne, la Section du droit pénal et la Section de la communauté sur l’orientation et l’identité sexuelles de l’ABC affirment qu’elles appuient l’objectif du projet de loi, mais elles soulignent 7 points qu'il faudrait améliorer.
- Le projet de loi devrait exiger spécifiquement que les critères pour la radiation comprennent également la prise en compte du droit du consentement et de l’âge du consentement au moment de la condamnation afin d'éviter que les dispositions en question « se traduisent par le fait que les personnes pourraient ne pas être admissibles à la radiation en vertu du projet de loi C-66 en dépit du fait que leur comportement aurait été légal au moment, ne serait-ce la discrimination même visée par le projet de loi ».
- Le projet de loi devrait prévoir qu’une demande de radiation puisse être déposée au nom d’une personne frappée d’incapacité si cela ne semble pas contrevenir à ses souhaits.
- S’agissant des personnes qui seraient autorisées à déposer une demande de radiation au nom d’une autre personne, les sections sont d’avis que l’expression « tout autre individu » devrait être définie dans la Loi ou dans son règlement d’application. De plus, cette définition devrait être aussi inclusive que possible puisque de nombreux membres de la communauté LGBTQ2S n’ont pas de liens familiaux ou communautaires « traditionnels ».
- La radiation du dossier judiciaire devrait aussi comprendre la destruction de l’intégralité des dossiers et empreintes connexes à la condamnation dont dispose le Centre d'information de la police canadienne. « La définition de la radiation devrait être assez ouverte pour suivre le rythme des évolutions de la technologie et des innovations dans le domaine de la tenue de registres et dossiers sous forme numérique. »
- Il faudrait que le projet de loi prévoie des conséquences dans le cas de non-respect de la loi par les membres de la GRC, du CIPC et des services de police.
- Le règlement d’application devrait limiter et guider la façon dont la Commission des libérations conditionnelles effectue ses enquêtes. « Cela signifie de respecter la nature confidentielle et délicate de la situation, et de ne pas s’arrêter inutilement sur tous les faits et renseignements connexes aux incidents et aux personnes visées. »
- La liste des infractions énumérées dans l’annexe est plus courte que celle qui a été suggérée au départ, selon les sections, et elle « limite la mesure réparatoire par rapport à ce qui est juste et nécessaire. L’histoire illustre le fait que les personnes LGBTQ2S ont été poursuivies sur la foi de toute infraction possible, et non simplement celles qui sont évidentes en 2018 ».
De pair avec les excuses présentées par le premier ministre, le projet de loi C-66 constitue un important premier pas vers « le redressement des torts causés aux personnes LGBTQ2S au Canada par la législation, les politiques et les pratiques fédérales, plus particulièrement ceux causés aux personnes qui ont été injustement accusées et condamnées de crimes en vertu de lois et mesures inéquitables » déclarent les sections.