Rater-la-cible

  • 03 septembre 2024

Chère Advy,

Je siège Ă  la direction d’un comitĂ© de santĂ© et de bien-ĂŞtre de mon cabinet et, dernièrement, il est presque impossible de convaincre des gens de faire du bĂ©nĂ©volat et de se joindre au groupe. Un avocat principal est tenu d’assister aux rĂ©unions, mais je crains que le manque de participation aux activitĂ©s et Ă©vĂ©nements que nous organisons (dĂ®ner-causeries et yoga) ne contraigne cet avocat principal Ă  dire Ă  ses associĂ©s de la direction que ce comitĂ© n’est peut-ĂŞtre pas nĂ©cessaire, et je crois vraiment que nous en avons besoin plus que jamais. Ma question comporte deux volets : premièrement, comment puis-je amener les employĂ©s du cabinet Ă  participer davantage; deuxièmement, pouvez-vous m’indiquer des ressources existantes que je peux utiliser? Peut-ĂŞtre que ce que nous offrons est Ă  cĂ´tĂ© de la plaque.

Sincèrement,
Rater-la-Cible


Chère Rater-la-Cible,

Ce sont là deux questions intéressantes avec lesquelles des cabinets (et des services juridiques) de partout au pays doivent composer.

Première question :
Comment puis-je amener les employés du cabinet à participer davantage?

Je vais faire ce qui rend tous les juristes fous, c’est-Ă -dire rĂ©pondre Ă  votre question par une question. Qu’essayez-vous exactement d’accomplir avec ce comitĂ©? Tentez-vous d’amĂ©liorer la culture de votre lieu de travail de façon gĂ©nĂ©rale afin qu’elle favorise davantage une bonne santĂ© mentale? Le but est-il de fournir un espace sĂ©curitaire oĂą les employĂ©s peuvent obtenir du soutien pour guĂ©rir ou se rĂ©tablir? De prĂ©coniser des changements prĂ©cis Ă  des politiques et pratiques du cabinet auprès de la direction? De rĂ©duire la stigmatisation associĂ©e Ă  la santĂ© mentale et Ă  la maladie mentale en gĂ©nĂ©ral? Est-ce une combinaison de ces choses? Ou est-ce quelque chose de totalement diffĂ©rent?

Laissez-moi vous raconter une petite histoire pour illustrer ce que je veux dire. Lors d’une balade en campagne, un homme passe devant une grange sur laquelle des cibles sont peintes. Au centre de chaque cible, il remarque des trous de balle, ce qui l’amène Ă  croire que le propriĂ©taire de la grange est possiblement le meilleur tireur de l’histoire! En tournant le coin, il aperçoit le propriĂ©taire, l’interpelle, lui fait part de son admiration et lui demande comment il est devenu si bon tireur. « Eh bien, le secret est de peindre la cible après avoir tirĂ©. »

Contrairement Ă  cette histoire, votre inquiĂ©tude est que, une fois que vous aurez tirĂ© vos coups de feu, quelqu’un de la direction du cabinet peigne la cible loin de l’endroit oĂą vous visiez et rĂ©duise Ă  nĂ©ant tout votre dur labeur. Je peux comprendre pourquoi. Cependant, pour vraiment savoir si vous touchez la cible, vous devez d’abord savoir quelle est votre cible. Cela vous permettra non seulement de mesurer votre succès, mais aussi d’Ă©tablir un objectif clair au moment de communiquer avec les membres de votre cabinet qui ressentent peu d’enthousiasme Ă  l’Ă©gard du travail que vous effectuez.

Ayez une conversation franche avec la direction. Ils n’ont peut-ĂŞtre pas beaucoup rĂ©flĂ©chi Ă  l’idĂ©e de crĂ©er ou d’approuver eux-mĂŞmes un comitĂ© de bien-ĂŞtre. Vous avez peut-ĂŞtre une idĂ©e de ce que vous tentez de rĂ©aliser, mais cela ne correspond pas aux attentes de la direction. Vous avez besoin d’une image plus prĂ©cise de ce qu’ils vous demandent d’accomplir avec ce comitĂ©. Demandez-leur ce qu’ils considĂ©reraient comme une rĂ©ussite. Quel changement considèrent-ils comme urgent ou important? Quels problèmes ĂŞtes-vous censĂ©e rĂ©soudre? Quels rĂ©sultats devriez-vous viser? OĂą ont-ils peint la cible sur la grange? Se trouve-t-elle Ă  l’endroit oĂą vous pensez qu’elle est?

Une fois que vous aurez Ă©tabli un ensemble d’objectifs clair et que vous les communiquerez de façon cohĂ©rente aux membres du cabinet, vous serez mieux outillĂ©e pour affronter les deux problèmes auxquels vous avez Ă©tĂ© confrontĂ©e jusqu’ici :

  1. la complaisance;
  2. la stigmatisation.

Certains membres de votre cabinet ne font tout simplement pas grand cas de ce comitĂ©. Ils ont des objectifs de facturation Ă  atteindre, des mĂ©moires Ă  dĂ©poser, des contrats Ă  rĂ©diger, des Ă©chĂ©ances Ă  respecter et beaucoup d’autres problèmes immĂ©diats. En Ă©laborant un ou plusieurs objectifs qui sont en harmonie avec les prioritĂ©s de votre cabinet, vous aurez une bonne rĂ©ponse Ă  la question « pourquoi devrais-je consacrer du temps Ă  cela? ». Donnez aux gens une raison convaincante de se prĂ©senter, et ce, dès maintenant.

Certains membres du cabinet peuvent rester Ă  l’Ă©cart des Ă©vĂ©nements que vous organisez en raison de la grande stigmatisation, toujours aussi prĂ©sente, associĂ©e Ă  la santĂ© mentale. Il n’y a pas de solution rapide et facile pour lutter contre la stigmatisation. La seule façon de la surmonter est de normaliser le fait de parler de santĂ© mentale. Tout comme une personne qui a des dents peut avoir divers problèmes de santĂ© dentaire Ă  diffĂ©rents moments de sa vie, la santĂ© mentale de toute personne qui a un cerveau fluctue avec le temps. Parlez de votre propre santĂ© mentale et de ce que vous faites pour vous en occuper. Votre cerveau est, après tout, l’usine de votre cabinet juridique. Il est essentiel de conserver un cerveau sain pour assurer le succès de votre cabinet. Il n’y a rien d’anormal ou d’Ă©trange Ă  faire des choses pour veiller Ă  ce que votre cerveau, d’oĂą sortent les idĂ©es dont dĂ©pend votre cabinet, soit en bon Ă©tat de fonctionnement. Parlez-en aux gens pour qu’il semble moins Ă©trange pour eux d’en parler aussi.

La plupart des employĂ©s qui hĂ©sitent Ă  participer au comitĂ© le sont en raison d’une combinaison de stigmatisation et de complaisance. Vous pouvez toucher ces deux types de personnes en leur expliquant les raisons pour lesquelles le cabinet aborde cet enjeu important et les raisons pour lesquelles vous le faites personnellement. Rappelez-vous que les gens Ă  qui vous transmettez ce message ont entendu pendant la majeure partie de leur vie que la santĂ© mentale est quelque chose dont on ne parle pas. Faites preuve de patience. Il y a peut-ĂŞtre des gens que vous ne convaincrez jamais avec cet argument, mais avec un peu de temps et de patience, vous devriez ĂŞtre en mesure de faire entendre raison Ă  un plus grand nombre de collègues qu’en ce moment.

Seconde question :
Pouvez-vous m’indiquer certaines ressources existantes que je peux utiliser?

Il existe de nombreuses ressources que vous pouvez utiliser. La meilleure ressource est celle qui correspond au problème que vous tentez de résoudre.

L’heure du bien-ĂŞtre de l’ABC propose des mĂ©thodes novatrices de structurer le travail juridique pour soutenir le bien-ĂŞtre. Certains programmes s’adressent aux femmes, aux juristes de groupes racisĂ©s, aux juristes autochtones (et Ă  ceux qui travaillent avec des juristes autochtones), aux jeunes juristes et Ă  d’autres professionnels. Vous pouvez en apprendre davantage sur l’Ă©puisement professionnel et la lutte contre la stigmatisation en milieu de travail, mais aussi sur le yoga. Il a mĂŞme un tout nouvel Ă©pisode qui traite prĂ©cisĂ©ment de la façon de commencer Ă  apporter des changements dans votre milieu de travail! Si vous ĂŞtes membre de l’ABC, ces ressources sont gratuites. Si vous ne l’ĂŞtes pas, vous pouvez toujours y avoir recours en payant une somme modique, mais vous constaterez probablement que votre abonnement se paie rapidement.

Toujours en ce qui a trait Ă  l’ABC, il existe d’autres ressources de bien-ĂŞtre Ă  l’intention des juristes. Vous trouverez du matĂ©riel de perfectionnement professionnel, des articles, des liens vers diverses sources d’aide et bien d’autres choses qui pourraient vous ĂŞtre utiles. Je devrais ajouter que, parfois, la simple lecture des articles de la prĂ©sente chronique vous aidera Ă  vous sentir moins seule. Vous pouvez voir les questions que posent des gens qui Ă©prouvent des difficultĂ©s semblables aux vĂ´tres.

Vous pouvez aussi communiquer avec votre programme d’aide aux juristes local. Plusieurs articles comprennent des conseils et du soutien qui peuvent s’adapter aux besoins de votre cabinet. Jetez aussi un coup d’Ĺ“il Ă  ce que votre barreau a Ă  offrir, bien que la page de l’ABC que j’ai mentionnĂ©e plus tĂ´t regroupe des ressources provenant de nombreuses sources, y compris d’organismes de rĂ©glementation, de sorte que vous les aurez peut-ĂŞtre dĂ©jĂ  consultĂ©es au moment de visiter la page d’accueil de votre organisme de rĂ©glementation.

Envisagez de suivre la formation en milieu de travail de l’Association canadienne pour la santĂ© mentale et le programme de premiers soins en santĂ© mentale de la Commission de la santĂ© mentale du Canada. Ces programmes de formation sont utiles en soi, mais lorsqu’un cabinet prend en charge les formations offertes Ă  l’Ă©chelle de l’organisation, cela peut agir comme un catalyseur pour changer les normes de santĂ© mentale et de bien-ĂŞtre. Si votre objectif est un changement de culture global, il peut ĂŞtre très utile de suivre une formation en groupe.

Ce n’est qu’un dĂ©but, mais un très bon dĂ©but.

Prenez bien soin de vous.
Advy

[0] Commentaires

Les membres de l’ABC peuvent commenter ce billet.