Remarque : Cet article a été publié pour la première fois en anglais dans le blogue Alexander Holburn blog le 14 mai 2019. Il est reproduit et traduit avec autorisation.
Alors que les mĂ©dias populaires abordent le plus souvent le sujet de l’utilisation de drones sous l’angle de la mise en garde, l’application commerciale de ces aĂ©ronefs s’est traduite par l’apparition d’un secteur en rapide expansion ayant des applications partout au Canada. Transports Canada estime que 193 500 drones sillonnent le ciel canadien par rapport Ă seulement 37 000 aĂ©ronefs « traditionnels ». On estime que la communautĂ© des utilisateurs de drones Ă usage rĂ©crĂ©atif Ă©tait forte de 140 800 personnes en 2018, et l’on prĂ©voit que ce nombre atteindra 225 500, d’ici 2025.
Le rapide accroissement des chiffres, de pair avec le caractère limitĂ© des compĂ©tences et des connaissances d’un grand nombre d’utilisateurs, a causĂ© un certain nombre d’incidents dangereux. Par consĂ©quent, Transports Canada a rĂ©cemment publiĂ© un nouveau règlement destinĂ© Ă Ă©tablir un cadre rĂ©glementaire Ă la fois prĂ©visible et souple tout en rĂ©duisant les coĂ»ts administratifs pour les entreprises. L’un des avantages de la nouvelle rĂ©glementation est qu’elle rĂ©duit ostensiblement le fardeau administratif pesant sur les entreprises commerciales qui utilisent des drones.
Le nouveau règlement est entrĂ© en vigueur le 1er juin 2019. Dans un effort visant Ă rendre la terminologie plus neutre, le règlement n’utilise plus les termes et expressions « drone », « vĂ©hicule aĂ©rien non habitĂ© » (unmanned air vehicle) et « unmanned aircraft system ». Ces aĂ©ronefs sont dĂ©sormais appelĂ©s « systèmes d’aĂ©ronefs tĂ©lĂ©pilotĂ©s » (SATP).
Le nouveau règlement rĂ©git deux genres d’opĂ©rations rĂ©alisĂ©es par des SATP ayant une masse maximale au dĂ©collage situĂ©e entre 250 grammes et 25 kilogrammes. Les personnes ayant au moins 14 ans et qui ont obtenu un certificat de pilote Ă l’issue d’un examen thĂ©orique en ligne peuvent effectuer les « opĂ©rations de base ». Ces dernières doivent ĂŞtre rĂ©alisĂ©es hors de l’espace aĂ©rien contrĂ´lĂ©, Ă plus de 30 mètres de toute personne (horizontalement, quelle que soit l’altitude) et Ă plus de 3 miles marins d’un aĂ©roport (ou 1 mile marin d’un hĂ©liport). L’altitude de vol du SATP ne doit pas excĂ©der 400 pieds.
Des personnes ayant au moins 16 ans, qui ont obtenu un certificat de pilote Ă l’issue d’un examen thĂ©orique en ligne et se sont soumises Ă une rĂ©vision de vol effectuĂ©e par un instructeur approuvĂ© par Transports Canada, peuvent effectuer les « opĂ©rations avancĂ©es ». Ces dernières peuvent ĂŞtre rĂ©alisĂ©es dans l’espace aĂ©rien contrĂ´lĂ© (mais exclusivement sous rĂ©serve d’une approbation du service de contrĂ´le de la circulation aĂ©rienne), entre 30 et 5 mètres de toute personne (horizontalement, quelle que soit l’altitude), au-dessus des gens (Ă moins de 5 mètres de distance) et dans les 3 miles marins d’un aĂ©roport (ou 1 mile marin d’un hĂ©liport). L’altitude de vol pour les opĂ©rations avancĂ©es est Ă©galement plafonnĂ©e Ă 400 pieds.
Toute autre opĂ©ration d’un SATP, si elle n’est pas couverte par les deux catĂ©gories susmentionnĂ©es, ne peut ĂŞtre rĂ©alisĂ©e que si l’utilisateur a demandĂ© et obtenu un certificat d’opĂ©ration aĂ©rienne spĂ©cialisĂ©e (COAS). Il faudra obtenir ce certificat, par exemple pour les vols effectuĂ©s lors d’un « Ă©vĂ©nement annoncĂ© » (dĂ©fini comme tout Ă©vĂ©nement en plein air qui est annoncĂ© au grand public, notamment un concert, un festival, un marchĂ© ou un Ă©vĂ©nement sportif). L’utilisation d’un SATP de plus de 25 kilogrammes et celles Ă une altitude excĂ©dant 400 pieds sont Ă©galement sujettes Ă l’obtention d’un COAS.
Le nouveau règlement interdit en outre aux utilisateurs de survoler un pĂ©rimètre de sĂ©curitĂ© Ă©tabli par un pouvoir public en rĂ©ponse Ă une situation d’urgence, sauf rares exceptions. Les propriĂ©taires de SATP devront dĂ©sormais inscrire leur aĂ©ronef auprès de Transports Canada et y apposer clairement et visiblement leur numĂ©ro d’inscription. En outre, les fabricants de SATP qui effectuent des opĂ©rations avancĂ©es doivent fournir une dĂ©claration Ă Transports Canada pour confirmer que le SATP est conforme Ă la norme de sĂ©curitĂ© 922 de Transports Canada. Cette norme comporte des exigences minimales pour l’exactitude de la position latĂ©rale et de l’altitude.
Il est intĂ©ressant de noter que dans le nouveau règlement, l’exigence actuelle selon laquelle tout propriĂ©taire de SATP doit acheter une couverture d’assurance responsabilitĂ© ayant une limite d’au moins 100 000 dollars a Ă©tĂ© Ă©liminĂ©e. Cela a Ă©tĂ© fait sciemment en raison des prĂ©occupations liĂ©es au coĂ»t de l’assurance et au manque de disponibilitĂ© de produits d’assurance couvrant l’utilisation des SATP.
Cette Ă©limination de l’exigence de l’assurance responsabilitĂ© est une Ă©volution prĂ©occupante, particulièrement lorsqu’on envisage les risques liĂ©s Ă la responsabilitĂ© en cas d’incident ou d’accident impliquant un SATP. Dans une affaire rĂ©cente dĂ©coulant de blessures subies par une invitĂ©e Ă un mariage causĂ©es par le drone d’un photographe (Philadelphia Indemnity Insurance Company v. Hollycal Production, Inc. (United States District Court, Californie), le photographe avait souscrit une police d’assurance commerciale, mais elle excluait la couverture pour des blessures causĂ©es par l’utilisation d’un aĂ©ronef, quel qu’il soit (soulignons que la plupart des polices d’assurance propriĂ©taires occupants excluent, elles aussi, la couverture pour les aĂ©ronefs). L’invitĂ©e au mariage allĂ©guait avoir subi une grave blessure Ă un Ĺ“il qui s’Ă©tait traduite par une perte d’acuitĂ© visuelle. Par consĂ©quent, il semble que le photographe se retrouvera dans la peu enviable position de risquer de devoir acquitter les frais de justice et d’assumer la responsabilitĂ© lĂ©gale affĂ©rente aux blessures avĂ©rĂ©es de l’invitĂ©e au mariage.
Michael Dery est associĂ© dans le cabinet Alexander Holburn Beaudin + Lang LLP Ă Vancouver. Il assume la fonction de secrĂ©taire au sein du ComitĂ© de direction de la Section du droit aĂ©rien et spatial de l’ABC.