Développements sur la scène internationale touchant le Canada
Le domaine de l’EDP est fondĂ© sur le droit et les politiques internationaux. Des PDNU aux tendances liĂ©es aux lois et aux mesures obligatoires dans le domaine des entreprises et des droits de la personne, le paysage canadien est fortement influencĂ© par les dĂ©veloppements qui se produisent Ă l’Ă©chelle internationale.
Les praticiens et les entreprises doivent s’attendre Ă ce que les Ă©volutions internationales en cours se traduisent par d’autres exigences de conformitĂ©. Ces exigences prendront la forme de l’intĂ©gration de politiques sur les droits de la personne et de l’amĂ©lioration continue de systèmes de gestion qui prĂ©viennent, attĂ©nuent ou règlent les incidences nĂ©gatives potentielles sur les droits de la personne.
Le message clĂ© pour les juristes est qu’ils doivent tenir compte de deux niveaux d’analyse en ce qui concerne les entreprises et les droits de la personne :
- Comment les PDNU s’appliquent aux activitĂ©s et aux relations d’affaires d’une entreprise particulière.
- Le contenu normatif des questions de droits de la personne qui sont importantes pour cette entreprise (disponible uniquement en anglais).
Les Ă©volutions substantielles ont trait Ă l’assurance que les protections des droits de la personne dans le droit international des droits de la personne sont intĂ©grĂ©es dans la rĂ©glementation et les politiques du Canada en matière d’EDP. Le contenu normatif de la responsabilitĂ© d’entreprise Ă respecter les droits de la personne est dĂ©fini par la Charte internationale des droits de l’homme, la DĂ©claration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et d’autres instruments internationaux liĂ©s aux droits de la personne qui protègent les droits des groupes vulnĂ©rables.
Trois exemples de la façon dont les évolutions internationales influent sur le droit et les politiques au Canada se trouvent dans les droits des enfants, les droits des peuples autochtones et la non-discrimination.
i) Exemple 1 : Principes régissant les entreprises et les droits des enfants
La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant est le traitĂ© fondamental sur les droits de la personne le plus largement et le plus rapidement ratifiĂ© de l’histoire. Par consĂ©quent, les droits des enfants ont Ă©tĂ© un domaine d’intĂ©rĂŞt important pour les entreprises et les droits de la personne Ă l’Ă©chelle internationale et au Canada.
Une initiative particulièrement importante a Ă©tĂ© l’Ă©laboration des Principes de l’UNICEF rĂ©gissant les entreprises dans le domaine des droits des enfants, le Pacte mondial des Nations Unies et Save the Children. Ces principes ont Ă©tĂ© lancĂ©s en 2012, relativement peu après l’adoption des PDNU. Le gouvernement du Canada a Ă©tĂ© l’un des premiers pays Ă appuyer les Principes rĂ©gissant les entreprises dans le domaine des droits des enfants, qui s’inscrivent dans les efforts du gouvernement du Canada pour lutter contre le travail des enfants Ă l’Ă©tranger.
Principes de l’UNICEF rĂ©gissant les entreprises dans le domaine des droits des enfants
Les dix Principes rĂ©gissant les entreprises dans le domaine des droits des enfants invitent les entreprises Ă examiner comment leurs activitĂ©s et leurs relations d’affaires affectent les garçons et les filles. Plus prĂ©cisĂ©ment, toute entreprise doit :
- Assumer sa responsabilitĂ© de respect des droits de l’enfant et s’engager Ă dĂ©fendre les droits humains de l’enfant.
- Contribuer Ă l’Ă©limination du travail des enfants, dans l’ensemble des activitĂ©s de l’entreprise et de ses relations commerciales.
- Proposer un travail décent à tout jeune travailleur, parent et tuteur.
- Assurer la protection et la sĂ©curitĂ© des enfants dans l’ensemble des activitĂ©s et des Ă©tablissements de l’entreprise.
- Garantir la sĂ©curitĂ© des produits et services, et Ă travers eux, s’efforcer de dĂ©fendre les droits de l’enfant.
- Mener des actions de marketing et de publicitĂ© qui respectent et dĂ©fendent les droits de l’enfant.
- Respecter et dĂ©fendre les droits de l’enfant en matière d’environnement et d’acquisition ou d’utilisation de terrains.
- Respecter et dĂ©fendre les droits de l’enfant dans les dispositifs de sĂ©curitĂ©.
- Contribuer Ă protĂ©ger les enfants touchĂ©s par les situations d’urgence.
- Renforcer les efforts de la communautĂ© et du gouvernement pour protĂ©ger et faire respecter les droits de l’enfant
ii) Exemple 2 : DĂ©claration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
Les évolutions internationales liées à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) revêtent une grande importance pour les entreprises canadiennes et la société canadienne dans son ensemble.
En particulier, les questions liĂ©es Ă la consultation effective des peuples autochtones et au droit au consentement prĂ©alable, donnĂ© librement et en connaissance de cause (CPLCC) sont particulièrement complexes et ont donnĂ© lieu Ă de nombreuses causes judiciaires nationales, Ă des requĂŞtes auprès d’organismes des Nations Unies chargĂ©s des droits de la personne, Ă des manifestations et Ă des retards dans les projets, particulièrement en ce qui concerne les ressources naturelles et les projets linĂ©aires qui ont d’importantes incidences sur les terres traditionnelles des peuples autochtones du Canada. Cette observation a amenĂ© le Groupe de travail des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme Ă conclure que « l’un des enjeux clĂ©s pour le Canada rĂ©sidera dans la façon d’harmoniser le cadre existant de l’obligation de consulter avec le principe du CLPÉ Ă©noncĂ© dans la dĂ©claration UNDRIP. »
Depuis, le gouvernement du Canada a publiĂ© de nouveaux Principes rĂ©gissant la relation du gouvernement du Canada avec les peuples autochtones. Ces principes tĂ©moignent de l’engagement de mettre en Ĺ“uvre la DNUDPA au Canada par une rĂ©vision des lois et des politiques, et en prenant d’autres initiatives et mesures de collaboration. Le gouvernement canadien a explicitement exigĂ© un engagement significatif auprès des peuples autochtones qui vise Ă obtenir leur CPLCC lorsque le Canada propose de prendre des mesures qui pourraient avoir une incidence sur eux et sur leurs droits, y compris leurs terres, territoires et ressources.
En juin 2021, la Loi concernant la DĂ©claration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones du Canada est entrĂ©e en vigueur. Cette loi exige que le gouvernement prenne des mesures pour s’assurer que les lois sont compatibles avec la DNUDPA, mette en Ĺ“uvre un plan pour atteindre les objectifs de la DNUDPA et rende compte des progrès rĂ©alisĂ©s.
Il faudra du temps pour harmoniser l’obligation lĂ©gale de consulter avec les interprĂ©tations en Ă©volution du CPLCC Ă l’Ă©chelle internationale. Pour les juristes et leurs clients, comprendre le CPLCC dans l’optique des DPNU les aidera Ă voir au-delĂ de l’obligation lĂ©gale de consulter pour crĂ©er et mettre en Ĺ“uvre des pratiques exemplaires pour les entreprises, qui respectent les droits des peuples autochtones.
Des orientations ont Ă©tĂ© Ă©noncĂ©es pour aider les entreprises Ă respecter les peuples autochtones dans le Guide de rĂ©fĂ©rence des entreprises sur la DĂ©claration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones du Pacte mondial des Nations Unies de 2013. Ă€ l’instar des orientations Ă©noncĂ©es dans les Principes rĂ©gissant les entreprises dans le domaine des droits des enfants, ces orientations harmonisent les exigences des PDNU et la substance de la DNUDPA.
Guide de référence des entreprises sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
ENGAGEMENT DE SOUTIEN PAR L’ENTREPRISE
Outre la responsabilitĂ© de l’entreprise de respecter les droits de la personne, les Principes du Pacte mondial des Nations Unies encouragent les entreprises Ă prendre d’autres mesures volontaires visant Ă promouvoir et faire progresser les droits de la personne (y compris les droits des peuples autochtones). Cela implique les droits des peuples autochtones par le biais des activitĂ©s principales, des investissements stratĂ©giques et sociaux, par le mĂ©cĂ©nat, la sensibilisation et l’engagement de soutien public, de mĂŞme que par le partenariat et l’action collective. Les actions volontaires pour soutenir et dĂ©fendre les droits des peuples autochtones doivent ĂŞtre complĂ©mentaires et non se substituer aux mesures prises pour respecter leurs droits (ce qui est la norme minimale pour toutes les entreprises). Ces actions doivent ĂŞtre guidĂ©es par les principes de base des droits des peuples autochtones, dont l’autodĂ©termination et le CPLCC, ainsi que la participation pleine et effective Ă la prise de dĂ©cision.
Toutes les entreprises devraient prendre les mesures fondamentales suivantes, certaines d’entre elles devant ĂŞtre prises en collaboration avec les gouvernements locaux et des États pour rĂ©pondre Ă la responsabilitĂ© qui leur incombe de respecter les droits des peuples autochtones :
- Adopter et mettre en Ĺ“uvre une politique formelle (que ce soit sur une base autonome ou dans le cadre d’une politique plus large des droits de la personne) en faveur des droits des peuples autochtones, engageant l’entreprise Ă respecter et protĂ©ger ces droits.
- Mener une diligence raisonnable pour identifier les incidences nĂ©gatives rĂ©elles ou potentielles sur les droits des peuples autochtones, intĂ©grer les rĂ©sultats et prendre les mesures qui s’imposent, suivre et communiquer en externe sur la performance.
- Consulter de bonne foi les peuples autochtones sur les questions qui les touchent ou qui affectent leurs droits.
- Obtenir (et conserver) le consentement libre, prĂ©alable et Ă©clairĂ© des peuples autochtones, pour les projets qui affectent leurs droits, conformĂ©ment Ă l’esprit de la DĂ©claration de l’ONU.
- Établir des processus légitimes ou coopérer par leur biais pour remédier à toute incidence négative sur les droits des peuples autochtones.
- Établir un mécanisme de plaintes efficace et culturellement approprié.
iii) Exemple 3 : Intersectionnalité et lois et revendications internationales contre la discrimination
Le dernier exemple de cette section concerne les Ă©volutions internationales qui influent sur notre comprĂ©hension du droit Ă la non-discrimination au Canada. Au cours des 20 dernières annĂ©es, une approche plus contextualisĂ©e du droit Ă la non-discrimination s’est dĂ©veloppĂ©e, qui met moins l’accent sur les caractĂ©ristiques individuelles et davantage sur la rĂ©ponse de la sociĂ©tĂ© Ă la personne. Elle tient Ă©galement compte du dĂ©savantage historique subi par le groupe auquel la personne appartient. Cette approche plus contextuelle est appelĂ©e intersectionnalitĂ©.
Ă€ l’Ă©chelle internationale, il y a une plus grande sensibilisation (disponible uniquement en anglais) et une discussion plus ouverte sur la valeur de l’intersectionnalitĂ© dans la lutte contre l’inĂ©galitĂ© entre les sexes, la stigmatisation, les stĂ©rĂ©otypes, les prĂ©jugĂ©s, la discrimination et la violence. Au Canada, le concept d’intersectionnalitĂ© commence Ă apparaĂ®tre (disponible uniquement en anglais) dans les poursuites judiciaires et les dĂ©cisions des tribunaux ainsi que dans les travaux des commissions des droits de la personne et des groupes de la sociĂ©tĂ© civile (disponible uniquement en anglais). L’importance Ă©mergente de l’intersectionnalitĂ© ne peut ĂŞtre nĂ©gligĂ©e dans le contexte actuel de sensibilisation et d’action Ă l’Ă©chelle mondiale en rĂ©ponse Ă diffĂ©rentes formes de discrimination (p. ex. #MeToo, Black Lives Matter, HeForShe).
Pour les juristes et les entreprises, les mesures proactives en matière de lutte contre la discrimination consistent Ă dĂ©noncer publiquement la discrimination, le harcèlement et le racisme. Il s’agit d’une façon pour les entreprises d’utiliser leur influence et d’exercer un leadership en matière de droits de la personne Ă l’Ă©gard des enjeux systĂ©miques, en accord avec les DPNU.
Parmi les autres moyens, mentionnons l’Ă©laboration et l’intĂ©gration de politiques organisationnelles plus robustes en matière de diversitĂ© et d’inclusion, ainsi que le renforcement des mĂ©canismes de règlement des recours pour les travailleurs et les autres intervenants touchĂ©s afin de soulever les problèmes et de les rĂ©gler de façon sĂ©curitaire et confidentielle. Ă€ cet Ă©gard, la rĂ©cente Convention sur la violence et le harcèlement no 190 de l’OIT et sa recommandation complĂ©mentaire no 206 (2019) sont des rĂ©fĂ©rences importantes pour les entreprises.