L’ABC est fort satisfaite des deux jugements rendus vendredi par la Cour suprĂŞme du Canada, lesquels rĂ©affirment l’importance du secret professionnel de l’avocat.
L’Association est intervenue dans les affaires Canada (Revenu national) c. Thompson et Canada (Procureur gĂ©nĂ©ral) c. Chambre des notaires du QuĂ©bec, soutenant que l’exigence de la Loi de l’impĂ´t sur le revenu voulant que les avocats (et les notaires, au QuĂ©bec) divulguent des renseignements privilĂ©giĂ©s de leurs clients sans leur consentement empiĂ©tait sur le privilège et faisait fi de l’article 8 de la Charte.
[TRADUCTION] « Que l’article 232 de la Loi de l’impĂ´t sur le revenu puisse ĂŞtre interprĂ©tĂ© de façon Ă ne pas supprimer le secret professionnel de l’avocat signifie qu’il doit ĂŞtre interprĂ©tĂ© de cette façon. Autrement, on empiète sur ce privilège en se fondant sur des dispositions qui sont moins que “claires et explicites”, ce qui serait contraire aux directives de la Cour dans l’arrĂŞt Blood Tribe », a indiquĂ© l’Ă©quipe de l’ABC, menĂ©e par Mahmud Jamal d’Osler Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L./s.r.l., dans son mĂ©moire (disponible uniquement en anglais) relatif Ă l’audience de dĂ©cembre 2014 pour l’affaire Thompson.
Dans son mĂ©moire (disponible uniquement en anglais) sur l’affaire Chambre des notaires, l’Ă©quipe agissant bĂ©nĂ©volement au nom de l’ABC (et dirigĂ©e ici aussi par Me Jamal), Ă©crivait :
[TRADUCTION] Le privilège des communications entre client et avocat est un « droit civil et juridique fondamental » qui est « essentiel au bon fonctionnement du système juridique ». La vitalitĂ© de l’administration de la justice dĂ©pend de l’existence d’une zone protĂ©gĂ©e oĂą les clients peuvent communiquer librement et en toute confiance avec leurs conseillers juridiques, sans crainte d’une divulgation. Faire abstraction de cette protection viendrait refroidir les communications entre l’avocat et son client, rĂ©duire la confiance du public dans le système juridique, et compromettre l’accès Ă la justice.
La Cour suprĂŞme, semble-t-il, partage cet avis.
« L’exception relative aux relevĂ©s comptables d’un avocat prĂ©vue Ă la dĂ©finition du “privilège des communications entre client et avocat” qui figure au par. 232(1) de la LIR est inconstitutionnelle et invalide », conclut-elle dans l’arrĂŞt Chambre des notaires.
« Le secret professionnel de l’avocat a Ă©voluĂ©, passant d’abord d’une simple règle de preuve Ă une règle de fond puis, aujourd’hui, Ă un principe de justice fondamentale. L’atteinte au secret professionnel de l’avocat n’est permise que si elle est absolument nĂ©cessaire Ă la rĂ©alisation des objectifs de la loi habilitante », ajoutent les juges dans l’arrĂŞt Thompson.
Et ce n’est pas du tout le cas pour la Loi de l’impĂ´t sur le revenu, affirment-ils dans l’affaire Chambre des notaires. Le rĂ©gime des demandes pĂ©remptoires « poursuit un but lĂ©gitime », confirment les juges, « mais l’existence d’un objectif important ne peut justifier de faire abstraction des protections qu’offre l’art. 8 de la Charte ».
Lorsque l’intĂ©rĂŞt en jeu est le secret professionnel du conseiller juridique – un principe de justice fondamentale et de droit de la plus haute importance –, l’exercice d’Ă©valuation habituellement entrepris au regard de l’art. 8 ne s’avèrera pas particulièrement utile. Il faut adopter des normes rigoureuses pour assurer la protection du secret professionnel. Sera donc qualifiĂ©e d’abusive toute disposition lĂ©gislative qui porte atteinte au secret professionnel plus que ce qui est absolument nĂ©cessaire.
En l’espèce, plusieurs lacunes rendent abusives et contraires Ă l’art. 8 les demandes pĂ©remptoires adressĂ©es Ă un notaire ou Ă un avocat en ce qui concerne l’information protĂ©gĂ©e par le secret professionnel, soit : l’absence d’avis au client de la demande pĂ©remptoire, le fardeau inopportun placĂ© uniquement sur les Ă©paules du notaire et de l’avocat visĂ©, l’absence de nĂ©cessitĂ© absolue de forcer la divulgation recherchĂ©e et l’absence de mesures pour favoriser une attĂ©nuation des atteintes au secret professionnel.