Retarder davantage l’admissibilité à l’aide médicale à mourir (AMM) des personnes dont les troubles mentaux constituent le seul problème médical invoqué est profondément préoccupant et ne devrait pas avoir lieu. C’est ce qu’affirme en substance une lettre (disponible uniquement en anglais; les citations qui en sont tirées sont des traductions) adressée au ministre de la Justice, David Lametti, et au ministre de la Santé, Jean-Yves Duclos, par le Groupe de travail sur la fin de vie de l’Association du Barreau canadien (ABC).
L’engagement de l’ABC à clarifier le droit sur la prise de décision en fin de vie remonte à près d’une décennie. « L’ABC appuie l’AMM pour les personnes souffrant de maladies mentales, les mineurs matures et les demandeurs exprimant leur volonté de manière anticipée, en présence de dispositifs de protection adéquats. » L’ABC est constamment revenue à la charge avec des recommandations à cet effet au fil des ans.
La lettre réitère la conviction du groupe de travail selon laquelle refuser l’AMM aux personnes dont les troubles mentaux constituent le seul problème médical invoqué est probablement inconstitutionnel. « Les personnes vivant avec une maladie mentale ont droit à l’autonomie et à l’autodétermination quant à leur santé, sans discrimination, et à la reconnaissance du fait que leur souffrance n’est pas moins réelle que celle des personnes atteintes d’une maladie physique », peut-on y lire.
En outre, forcer les personnes dont les troubles mentaux constituent le seul problème médical invoqué à contester la constitutionnalité de leur exclusion de l’AMM « impose un fardeau déraisonnable qui est incompatible avec le principe fondamental de l’égalité d’accès à la justice ».
La lettre cite des données de Mourir dans la dignité Canada révélant que plus du tiers des appels reçus par cet organisme sont liés à des troubles psychiatriques. « Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs confirmé que la mise en œuvre retardée de l’AMM avait encore accru leur souffrance et leur désespoir. »
Une situation préoccupante, d’autant que ces personnes risquent d’envisager d’autres façons de mettre fin à leurs jours, dont des méthodes « dangereuses et indignes ».
C’est pourquoi le groupe de travail de l’ABC exhorte le gouvernement à « consacrer le temps et les ressources nécessaires pour garantir que l’admissibilité à l’AMM des personnes dont les troubles mentaux constituent le seul problème médical invoqué ne soit plus retardée » et qu’elle entre en vigueur d’ici mars 2024.
De plus, le gouvernement, de concert avec ses partenaires provinciaux et territoriaux, « doit s’assurer de la collaboration des organismes de réglementation, des médecins praticiens et des infirmières praticiennes pour établir des normes et des garanties pour l’évaluation des demandes d’AMM ».
La souffrance des personnes atteintes d’une maladie mentale est tout aussi réelle et grave que la souffrance des personnes atteintes d’une maladie physique. Le cadre législatif doit traiter chacune de ces personnes sur un pied d’égalité et reconnaître son droit à prendre ses propres décisions en matière de santé, y compris celle de recourir à l’AMM.