L’indĂ©pendance de la magistrature est essentielle pour la promotion des amĂ©liorations de l’administration de la justice et le maintien d’un système de justice de haut niveau au Canada. Dans un mĂ©moire rĂ©digĂ© pour aider la sixième Commission quadriennale d’examen de la rĂ©munĂ©ration des juges alors qu’elle dĂ©termine la juste rĂ©munĂ©ration des juges et des protonotaires, l’Association du Barreau canadien et son Sous-comitĂ© des questions judiciaires poursuivent une longue tradition de dĂ©fense de l’indĂ©pendance de la magistrature et de mise en garde contre de possibles ingĂ©rences politiques dans le traitement et la rĂ©munĂ©ration des juges au Canada.
Dans ses remarques adressĂ©es lors de l’audience de la Commission quadriennale d’examen de la rĂ©munĂ©ration des juges qui a eu lieu le 11 mai 2021, le prĂ©sident de l’ABC, Brad Regehr, a expliquĂ© : [TRADUCTION] « L’ABC est une observatrice objective. Nous ne reprĂ©sentons pas les juges ni le gouvernement ni aucune autre partie. Nous voulons aider la Commission Ă faire son travail pour dĂ©terminer la rĂ©munĂ©ration des juges de façon Ă©quitable afin de rĂ©pondre Ă l’impĂ©ratif d’une rĂ©munĂ©ration des juges qui soit appropriĂ©e. Notre seul et unique intĂ©rĂŞt est la protection et la promotion de l’indĂ©pendance judiciaire dans le contexte de l’administration de la justice ».
Une magistrature indĂ©pendante est une magistrature au sein de laquelle les juges bĂ©nĂ©ficient d’une sĂ©curitĂ© financière appropriĂ©e, et une magistrature solide exige que la rĂ©munĂ©ration accordĂ©e soit suffisante pour attirer les candidatures les meilleures reflĂ©tant le plus haut niveau de qualification.
[TRADUCTION] « D’un point de vue pratique, la population canadienne veut savoir que lorsqu’elle comparaĂ®t, le juge sera impartial, a dit Brad Regehr. La population canadienne doit ĂŞtre certaine que lorsque des dĂ©cisions sont prises, les juges n’ont aucun intĂ©rĂŞt financier dans le rĂ©sultat », ce qui signifie que les juges ne devraient pas avoir Ă s’inquiĂ©ter que leurs dĂ©cisions puissent ne pas plaire au gouvernement qui les rĂ©munère.
L’ABC reconnaĂ®t que les avantages financiers ne devraient pas ĂŞtre le seul ou le principal facteur justifiant l’intĂ©rĂŞt de candidats et candidates exceptionnels souhaitant devenir juges. Toutefois, les traitements doivent ĂŞtre concurrentiels. Le sous-comitĂ© fait valoir que « l’Ă©chelle qu’il convient d’utiliser pour dĂ©terminer le niveau de la rĂ©munĂ©ration des juges est celle de la rĂ©munĂ©ration des juristes de niveau supĂ©rieur du secteur privĂ© et de celle des cadres supĂ©rieurs du secteur public, parmi lesquels les juges sont en gĂ©nĂ©ral choisis et parmi lesquels ils retrouvent leurs pairs professionnels ».
L’objectif du processus de rĂ©munĂ©ration des juges est de veiller Ă ce que leur situation Ă©conomique ne subisse pas un recul trop marquĂ©, et dĂ©courageant, par rapport Ă celle dont ils jouissaient avant leur nomination Ă la magistrature, prĂ©cise le mĂ©moire, plus particulièrement Ă la lumière du fait qu’ils doivent se prĂ©occuper exclusivement de la rĂ©alisation de leurs tâches et qu’ils ne sont pas autorisĂ©s Ă augmenter leurs revenus au moyen d’autres emplois ou activitĂ©s.
L’ABC reconnaĂ®t que la pandĂ©mie de COVID-19 a eu de considĂ©rables rĂ©percussions sur l’Ă©conomie canadienne. Cependant, le sous-comitĂ© Ă©crit que la rĂ©munĂ©ration des juges doit, au moins, suivre le rythme de l’inflation pour que le traitement des juges en exercice ne subisse pas d’Ă©rosion. L’ABC a exhortĂ© la Commission Ă examiner les rĂ©percussions gĂ©nĂ©ralisĂ©es de la pandĂ©mie de COVID-19 sur l’Ă©conomie canadienne et Ă reconnaĂ®tre qu’elles auront des effets sur le traitement des juges pendant des annĂ©es, Ă tout le moins pendant toute la pĂ©riode actuelle visĂ©e par l’examen de la rĂ©munĂ©ration des juges. Alors qu’il existe d’autres prioritĂ©s publiques et gouvernementales concurrentielles, il incombe au gouvernement de prouver de manière irrĂ©futable qu’elles justifient une atteinte Ă l’impĂ©ratif constitutionnel de l’indĂ©pendance de la magistrature.
Diversité, protonotaires
Comme Brad Regehr l’a fait remarquer Ă la Commission le 11 mai, la magistrature doit reflĂ©ter la population canadienne, y compris les femmes, les personnes noires, autochtones et de couleur, les personnes handicapĂ©es, et toutes les personnes quel que soit leur sexe et leur identitĂ© sexuelle, ainsi que les membres de groupes sous-reprĂ©sentĂ©s. [TRADUCTION] « Il faut, pour attirer des candidats exceptionnels Ă la magistrature issus de groupes diversifiĂ©s, et pour accroĂ®tre leur nombre, que la rĂ©munĂ©ration soit concurrentielle », a-t-il dit.
Indra Maharaj, qui prĂ©side le Sous-comitĂ© sur les questions judiciaires, a soulignĂ© que maints juristes issus de ces groupes diversifiĂ©s contribuent de façon importante Ă la vie de leurs communautĂ©s en se faisant leurs porte-parole. La rĂ©munĂ©ration recommandĂ©e devrait reflĂ©ter leur obligation d’embrasser la neutralitĂ© lors de leur nomination et d’assumer un plus vaste rĂ´le de leadership.
L’ABC constate avec satisfaction que les protonotaires sont inclus dans les travaux de la sixième Commission quadriennale, ayant dĂ©posĂ© des mĂ©moires Ă l’intention des conseillers spĂ©ciaux sur la rĂ©munĂ©ration des protonotaires fĂ©dĂ©raux en 2008 et en 2013 selon lesquels « le principe de l’indĂ©pendance judiciaire devrait s’appliquer Ă©galement aux officiers de justice, comme les protonotaires, qui cumulent des fonctions administratives et d’importantes responsabilitĂ©s dĂ©cisionnelles judiciaires ».
Leur rĂ©munĂ©ration doit correspondre Ă celle dont jouissent les officiers exerçant des fonctions comparables dans d’autres tribunaux, tels que les conseillers-maĂ®tres traditionnels. « Enfin, leur rĂ©munĂ©ration doit exprimer le respect accordĂ© Ă la Cour fĂ©dĂ©rale, quoiqu’Ă un niveau subordonnĂ© Ă celui des juges de cette mĂŞme cour », affirme le mĂ©moire.