La modernisation du cadre juridique qui protège les droits Ă la vie privĂ©e des Canadiens et des Canadiennes peut parfois sembler un processus sans fin, et l’Ă©volution constante de la technologie n’en est pas la seule raison. Nous nous attendons Ă ce que les institutions gouvernementales utilisent des donnĂ©es pertinentes dans leurs programmes et politiques, mais nous insistons Ă©galement sur la protection de la vie privĂ©e des personnes dont les donnĂ©es sont nĂ©cessaires pour Ă©laborer ces programmes et politiques. Il faut donc s’attendre Ă ce que le pendule continue Ă osciller.
Depuis 2004, la Section du droit de la vie privĂ©e et de l’accès Ă l’information de l’ABC a produit plusieurs mĂ©moires et parrainĂ© maintes rĂ©solutions portant sur des enjeux connexes Ă la protection des donnĂ©es personnelles. Lorsque Justice Canada a publiĂ© des documents de discussion sur la modernisation de la Loi sur la protection des renseignements personnels en novembre 2020, la section Ă©tait de nouveau prĂŞte Ă formuler des commentaires (disponibles uniquement en anglais, les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions).
Dans son plus rĂ©cent mĂ©moire, elle convient que le titre de la Loi devrait ĂŞtre actualisĂ© pour « reflĂ©ter correctement le contexte particulier dans lequel elle rĂ©glemente la collecte, l’utilisation, la rĂ©tention et la divulgation des renseignements personnels dans le plus vaste ensemble de lois qui incarne la valeur fondamentale de la vie privĂ©e ». Elle souhaite en outre qu’y soit ajoutĂ©e une disposition sur l’objet qui reflète « l’Ă©quilibre entre les intĂ©rĂŞts liĂ©s Ă la protection des renseignements personnels et les besoins lĂ©gitimes du gouvernement » de recueillir, utiliser et parfois divulguer les renseignements. Elle ajouterait en outre un principe fondamental selon lequel « dans la mesure du possible, il faudrait utiliser des donnĂ©es pseudonymisĂ©es ou anonymisĂ©es ».
Justice Canada propose d’actualiser la dĂ©finition de « renseignements personnels » pour y inclure les renseignements personnels non consignĂ©s. En 2019, la section Ă©tait d’accord. Elle ajoute dĂ©sormais que la Loi « pourrait aussi inclure une obligation expresse de confidentialitĂ© Ă l’Ă©gard des renseignements personnels non consignĂ©s ».
La section ne recommande pas de dĂ©finir ce qui constitue des renseignements concernant une personne « identifiables ». Toutefois, elle appuie l’idĂ©e de remplacer l’expression « institutions fĂ©dĂ©rales » par « organismes publics fĂ©dĂ©raux » ce qui inclurait notamment les bureaux des parlementaires.
Pour en revenir Ă l’image de l’oscillation du pendule… Le document de discussion suggère que Justice Canada souhaite modifier l’exigence selon laquelle ces renseignements « ont un lien direct avec un programme ou une activitĂ© », abaissant le seuil aux renseignements qui sont « raisonnablement requis ». La section reconnaĂ®t que le fait d’exiger que les renseignements soient « directement pertinents » pose problème, mais elle n’est pas d’accord sur le caractère appropriĂ© du concept de renseignements « raisonnablement requis » Ă©tant donnĂ© qu’il est moins contraignant que celui qui s’applique au secteur privĂ©.
« La section de l’ABC affirme en outre sa position de longue date selon laquelle les institutions gouvernementales devraient identifier l’objet prĂ©cis pour lequel elles recueillent les renseignements personnels et veiller Ă ce qu’ils soient raisonnablement nĂ©cessaires pour atteindre l’objectif formulĂ© ou que la collecte soit autorisĂ©e par la loi. »
La Loi sur la protection des renseignements personnels ne dĂ©finit pas actuellement l’expression « renseignements auxquels le public a accès »; une lacune selon la section, qui ajoute que des règles spĂ©ciales sur l’utilisation desdits renseignements auxquels le public a accès devraient correspondre aux attentes raisonnables des Canadiens et Canadiennes quant Ă la protection de leurs renseignements personnels.
Justice Canada souhaite dĂ©finir ce qui constitue des renseignements personnels « anonymisĂ©s » et rĂ©glementer leur utilisation. La section de l’ABC recommande d’approfondir les Ă©tudes portant sur l’utilisation des donnĂ©es issues de ce qu’elle appelle la « pseudonymisation », soit des donnĂ©es qui ne peuvent ĂŞtre attribuĂ©es Ă une personne en particulier sans avoir recours Ă des informations supplĂ©mentaires conservĂ©es sĂ©parĂ©ment et soumises Ă des « mesures […] afin de garantir que les donnĂ©es Ă caractère personnel ne sont pas attribuĂ©es Ă une personne physique identifiĂ©e ou identifiable », selon la dĂ©finition prĂ©vue dans le Règlement gĂ©nĂ©ral sur la protection des donnĂ©es en vigueur dans l’Union europĂ©enne.
Le mĂ©moire de la section traite des moyens devant ĂŞtre mis en Ĺ“uvre pour garantir que les renseignements personnels recueillis par les institutions gouvernementales sont conservĂ©s selon des protocoles de sĂ©curitĂ© comportant des avis en cas d’atteintes et des obligations de signalement aussi rigoureuses que celles qui s’appliquent au secteur privĂ©.
Le mĂ©moire discute Ă©galement de la prise de dĂ©cision automatisĂ©e, des droits d’accès aux ressortissants Ă©trangers hors du Canada, du partage et de la divulgation des renseignements personnels lorsque plus d’un organisme public ont accès aux mĂŞmes ensembles de donnĂ©es, et de la modernisation des dispositions sur l’application afin d’accorder au commissaire Ă la protection de la vie privĂ©e des pouvoirs supplĂ©mentaires, y compris la compĂ©tence nĂ©cessaire pour rendre des ordonnances exĂ©cutoires.