La Section du droit de l’immigration de l’Association du Barreau canadien exhorte Immigration, RĂ©fugiĂ©s et CitoyennetĂ© Canada Ă aborder le grave problème systĂ©mique de l’exclusion de la reprĂ©sentation juridique.
Aux dires de la section, le problème « se fait particulièrement sentir dans les changements apportĂ©s rĂ©cemment aux programmes et aux politiques connexes Ă la pandĂ©mie de COVID-19, y compris les dĂ©cisions de mise en Ĺ“uvre et les procĂ©dures de dĂ©pĂ´t en ligne qui n’ont pas dĂ©volu un rĂ´le aux reprĂ©sentants de manière appropriĂ©e ».
Le mĂ©moire de la section (disponible uniquement en anglais, toutes les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions) Ă©numère plusieurs exemples rĂ©cents d’exclusion des reprĂ©sentants des nouvelles plateformes numĂ©riques, y compris les versions initiales de l’attribution de la citoyennetĂ© en ligne, le renouvellement de la carte de rĂ©sidence permanente et d’autres portails et plateformes qui n’autorisent pas les reprĂ©sentants juridiques Ă prĂ©senter des demandes au nom de leurs clients. Cette situation est inquiĂ©tante pour de nombreuses raisons.
Selon l’une d’entre elles, bien que les reprĂ©sentants puissent aider leurs clients officieusement, « le Règlement sur l’immigration et la protection des rĂ©fugiĂ©s interdit le recours aux reprĂ©sentants non identifiĂ©s pour certains types de demandes ». Il n’est pas non plus acceptable de s’attendre Ă ce que les demandeurs confient leurs coordonnĂ©es d’accès personnel Ă un tiers, mĂŞme s’il s’agit d’un reprĂ©sentant auquel ils font entièrement confiance. « Les renseignements exigĂ©s pour Ă©tablir un compte MonCIC sont personnels et exigent des demandeurs qu’ils s’engagent Ă protĂ©ger la confidentialitĂ© de leur mot de passe », dit la section.
La section s’inquiète Ă©galement du fait que bien que les juristes soient assujettis aux règles de la responsabilitĂ© professionnelle en matière de conservation et de protection des mots de passe Ă©lectroniques, « ces règles ne s’appliquent pas aux consultants. La mise en place de nouvelles plateformes encouragera les tiers qui ne sont pas soumis aux mĂŞmes obligations dĂ©ontologiques que les juristes Ă effectuer des demandes et Ă crĂ©er des comptes au nom d’autrui ».
L’exclusion des reprĂ©sentants juridiques place les demandeurs dans une position difficile, Ă©crit la section. « Les plateformes numĂ©riques ont Ă©tĂ© conçues pour rĂ©duire le temps de traitement et pour accroĂ®tre l’efficacitĂ©. Les demandeurs doivent choisir entre les bĂ©nĂ©fices d’un service complet, avec un temps de traitement d’une demande sur papier inĂ©vitablement plus long, ou le recours Ă un processus en ligne conçu pour les demandeurs qui gèrent eux-mĂŞmes leur demande. »
La section souligne l’existence de problèmes rĂ©currents concernant l’accès des reprĂ©sentants juridiques au système Formulaire Web / Demande propre Ă un cas et au Centre de soutien Ă la clientèle. Le système Formulaire Web / Demande propre Ă un cas est un moyen efficace pour mettre Ă jour ou dĂ©poser des documents et, eu Ă©gard aux difficultĂ©s causĂ©es par la pandĂ©mie pour certains bureaux d’IRCC et certains centres de soutien Ă la clientèle, le système Formulaire Web est frĂ©quemment le seul moyen de communiquer avec un fonctionnaire d’IRCC. L’exclusion des reprĂ©sentants juridiques du système Formulaire Web les empĂŞche de reprĂ©senter activement leurs clients.
Un droit essentiel à la représentation juridique
Les processus juridiques liĂ©s aux programmes d’immigration et de statut de rĂ©fugiĂ© peuvent avoir des rĂ©percussions Ă long terme sur les particuliers. « Ainsi, des conclusions selon lesquelles le demandeur a fait de fausses dĂ©clarations peuvent nuire aux autres demandes de cette personne dans le domaine de l’immigration, Ă son admissibilitĂ©, et Ă l’admissibilitĂ© future des membres de sa famille », dit la section. Il est d’une importance capitale de veiller Ă ce que les plateformes soient conçues de manière Ă accorder un accès aux reprĂ©sentants juridiques des particuliers pour qu’ils puissent conseiller et guider leurs clients de manière appropriĂ©e.
Lorsque les reprĂ©sentants juridiques n’ont aucun moyen d’accĂ©der aux plateformes au nom de leurs clients, cela oblige les demandeurs Ă aller de l’avant en l’absence de reprĂ©sentation juridique, ce qui, dit la section, « est injuste du point de vue procĂ©dural et peut constituer une atteinte Ă la justice fondamentale. Cela peut conduire Ă des rĂ©sultats prĂ©judiciables, particulièrement pour les clients vulnĂ©rables qui sont Ă©galement confrontĂ©s Ă des obstacles culturels et linguistiques ».
Les demandeurs racialisĂ©s, qui ont plus de risques de faire face Ă ces obstacles, subissent les consĂ©quences de cette situation de manière disproportionnĂ©e, tout comme c’est le cas des demandeurs comme les personnes aĂ®nĂ©es, qui ont un accès limitĂ© Ă la technologie et dĂ©pendent de l’assistance de professionnels pour accĂ©der aux plateformes et obtenir divers formulaires.
« Les relations entre reprĂ©sentant et client sont frĂ©quemment des relations de longue date fondĂ©es sur une profonde confiance », dit la section. « L’accès Ă des conseils juridiques est un processus pluridimensionnel qui exige une attention et un soutien permanents. Il ne devrait ĂŞtre compromis en aucun cas, mĂŞme en raison de l’Ă©volution de la technologie. L’atteinte au droit des personnes de se prĂ©valoir de l’aide d’un juriste pour effectuer une demande peut aussi conduire Ă un contentieux Ă la fois inutile et onĂ©reux; contentieux qui compromet encore davantage l’accès Ă la justice. »
AmĂ©liorer l’efficacitĂ© en amenant les reprĂ©sentants juridiques Ă participer au processus dès son ouverture
La section reconnaĂ®t que certaines des nouvelles plateformes qui excluent les reprĂ©sentants sont « des produits dont la viabilitĂ© est limitĂ©e » et qui doivent ĂŞtre mis Ă jour. « Toutefois, le fait de limiter l’accès des reprĂ©sentants juridiques Ă la première version d’une nouvelle plateforme rĂ©duira probablement l’adoption d’un nouveau programme, allant ainsi Ă l’encontre de certains des objectifs d’IRCC. »
La section illustre son propos avec l’exemple d’un portail crĂ©Ă© en 2016 pour le dĂ©pĂ´t en ligne des demandes d’Ă©tude d’impact sur le marchĂ© du travail destinĂ© aux employeurs. « Parce qu’aucun rĂ´le n’y avait Ă©tĂ© crĂ©Ă© pour les juristes, nombreux Ă©taient les employeurs qui ne faisaient pas confiance au système, qui n’a Ă©tĂ© utilisĂ© que rarement jusqu’Ă rĂ©cemment lorsque Service Canada a crĂ©Ă© un portail spĂ©cifique pour les reprĂ©sentants juridiques. L’adoption gĂ©nĂ©ralisĂ©e de son utilisation a rapidement suivi alors que les employeurs apprenaient Ă faire confiance au système. Si la version initiale du système avait donnĂ© une place aux reprĂ©sentants juridiques, plus nombreux auraient Ă©tĂ© ses utilisateurs, ce qui se serait traduit par un traitement des demandes beaucoup plus efficace depuis des annĂ©es. »
L’enseignement Ă tirer de cela, selon la section, c’est que « pour qu’une nouvelle technologie visant le client soit adoptĂ©e avec succès, les reprĂ©sentants juridiques devraient ĂŞtre inclus dès le dĂ©part. »