Les menaces économiques ne font pas autant les manchettes que les autres risques qui guettent le Canada, mais elles ne sont pas pour autant sans danger pour la sécurité et la prospérité nationales. Plus tôt cette année, le gouvernement fédéral a formé un groupe de travail pour étudier et endiguer les menaces nouvelles et émergentes, et a demandé aux intervenants de faire leurs commentaires.
La Section du droit de la concurrence et de l’investissement Ă©tranger de l’Association du Barreau canadien a fourni des recommandations dĂ©taillĂ©es (en anglais seulement, toutes les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions), dont les plus importantes sont rĂ©sumĂ©es ci-dessous.
Avis et approbations préalables à la conclusion
La Section de l’ABC est de l’avis qu’un rĂ©gime ciblĂ© d’avis et d’approbations serait efficace pour prĂ©venir le gouvernement des investissements potentiellement prĂ©occupants avant leur exĂ©cution et apporter une prĂ©visibilitĂ© et une certitude rĂ©glementaire accrues aux investisseurs Ă©trangers et aux entreprises canadiennes. Pour ce faire, un tel rĂ©gime doit cibler les investissements Ă haut risque, se baser sur des seuils clairs et ĂŞtre exempt d’obligations de conformitĂ© exigeant beaucoup de temps et d’effort.
En ce qui concerne la possibilitĂ© d’imposer des avis prĂ©alables Ă la conclusion dans certains secteurs technologiques, la section affirme que, quelle que soit l’approche, « les exigences de dĂ©pĂ´t prĂ©alable doivent ĂŞtre claires et sans Ă©quivoque pour limiter concrètement le nombre d’investissements qui y sont assujettis ». Si une liste des secteurs commerciaux ou technologiques peut ĂŞtre utile pour orienter les investisseurs Ă©trangers, le gouvernement doit veiller Ă ce que les descriptions ne soient ni trop vagues ni trop gĂ©nĂ©rales. Par exemple, on pourrait recourir aux codes du Système de classification des industries de l’AmĂ©rique du Nord ou Ă d’autres paramètres clairs de ce genre.
Exemption pour les pays Ă faible risque
Comme le fait remarquer la section, plus des deux tiers des investissements Ă©trangers proviennent des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Australie. « Nous croyons que les investissements de ces pays sont très peu susceptibles de soulever des prĂ©occupations de sĂ©curitĂ© nationale. Par consĂ©quent, nous recommandons fortement d’exempter les investisseurs des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Australie de tout rĂ©gime imposant un avis prĂ©alable Ă la conclusion. (On pourrait inclure la Nouvelle-ZĂ©lande pour traiter Ă©quitablement les pays du Groupe des cinq.) »
Cette mesure réduirait le fardeau sur les investisseurs étrangers des pays susmentionnés, sans réellement nuire à la capacité du gouvernement de faire appliquer la Loi sur Investissement Canada.
Atténuation
La plupart des investissements comportent certains risques et avantages pour l’Ă©conomie canadienne, indique la section. « L’attĂ©nuation est, et devrait ĂŞtre vue comme une solution possible dans le cas des volets d’investissements qui prĂ©sentent un risque de prĂ©judice Ă la sĂ©curitĂ© du Canada. »
Les investisseurs de bonne foi accepteront gĂ©nĂ©ralement les mesures d’attĂ©nuation raisonnables, surtout s’ils sont prĂ©venus de la possibilitĂ© de telles mesures et que la mise en conformitĂ© n’est pas dĂ©mesurĂ©ment contraignante. « L’incertitude rĂ©glementaire peut avoir un effet domino qui dĂ©courage les investisseurs non problĂ©matiques », explique la section, qui incite le gouvernement Ă recenser les mesures d’attĂ©nuation dans le rapport annuel sur la Loi sur Investissement Canada pour en faire un guide informel aux investisseurs et aux juristes.
La section propose une liste de mesures d’attĂ©nuation technologiques et matĂ©rielles qu’elle juge souhaitables (p. ex. sĂ©paration des rĂ©seaux, restrictions gĂ©ographiques raisonnables, vidĂ©osurveillance), en ajoutant que « l’attĂ©nuation structurelle, par exemple par le refus ou le dessaisissement de secteurs d’activitĂ©, ne doit pas ĂŞtre imposĂ©e Ă moins de nĂ©cessitĂ© absolue ».
Application des mesures
La section considère que le travail pour voir au respect des mesures est « une partie importante d’un rĂ©gime de sĂ©curitĂ© nationale efficace » et que la Division de l’examen des investissements doit disposer des ressources nĂ©cessaires pour assurer la conformitĂ© s’il y a lieu.
Elle juge d’une part que le Canada devrait adopter une approche de mise en application des mesures comparable Ă celle des autres pays du Groupe des cinq, notamment des amendes sĂ©vères pour omission de prĂ©senter une demande ou de produire un avis obligatoires lorsque certaines conditions sont remplies. D’autre part, la section « ne croit pas que les investisseurs devraient Ă©coper d’amendes pour des “contraventions” Ă la sĂ©curitĂ© nationale ».
Étant donnĂ© que la grande majoritĂ© des investissements ne soulèvent aucune prĂ©occupation sur le plan de la sĂ©curitĂ© nationale ou des avantages nets, la section estime que les investisseurs ne devraient recevoir des amendes que s’ils omettent de se conformer aux exigences ministĂ©rielles de prĂ©senter une demande ou un avis obligatoires. « Nous ne croyons pas que ces investisseurs devraient courir le risque d’ĂŞtre sanctionnĂ©s pour un dĂ©faut d’avis involontaire. »
Transparence dans le processus d’examen relatif Ă la sĂ©curitĂ© nationale
Il peut ĂŞtre frustrant pour les investisseurs de rĂ©pondre aux prĂ©occupations de sĂ©curitĂ© nationale du gouvernement s’ils n’en savent pas assez sur celles-ci. Bien que la section soit consciente de l’importance de protĂ©ger la sĂ©curitĂ© nationale et reconnaisse les rĂ©centes amĂ©liorations en matière de communication sur le sujet, elle estime qu’il est possible d’en faire plus sans compromettre cette sĂ©curitĂ©.
Le processus d’examen au regard de la sĂ©curitĂ© nationale peut Ă©galement ĂŞtre amĂ©liorĂ© au moyen d’un avocat spĂ©cial, soit quelqu’un qui serait dotĂ© d’une autorisation de sĂ©curitĂ© et qui agirait comme surveillant de l’Ă©quitĂ©, pour « rappeler Ă toutes les parties les considĂ©rations dictĂ©es par l’examen relatif Ă la sĂ©curitĂ©, notamment celles portant sur les menaces lĂ©gitimes Ă la sĂ©curitĂ© du Canada et de ses alliĂ©s. Cet avocat spĂ©cial assisterait aux dĂ©libĂ©rations officielles d’une transaction afin d’attester que le processus est objectif, Ă©quitable et respectueux des considĂ©rations relatives Ă la sĂ©curitĂ© ».