Si le monde était parfait, les gens règleraient leurs factures sans délai. Serait donc inutile toute loi pour les y obliger.
Dans notre monde moins que parfait oĂą une telle lĂ©gislation semble nĂ©cessaire, mieux vaut qu’elle soit fondĂ©e sur de vastes consultations avec les personnes qu’elle vise, et qu’elle ne crĂ©e pas plus de problèmes qu’elle n’en rĂ©sout.
Ainsi, en Ontario, le rĂ©cent examen d'expert de la Loi sur le privilège dans l'industrie de la construction (rapport Reynolds et Vogel) est fondĂ© sur 14 mois de consultations menĂ©es auprès de professionnels chevronnĂ©s reprĂ©sentant tous les domaines du secteur de la construction. Le rapport et ses recommandations constituent la base d’un projet de loi qui Ă©tablira un rĂ©gime de règlement sans dĂ©lai dans cette province.
En revanche, le SĂ©nat est loin d’avoir consacrĂ© une infime partie de ce temps Ă consulter les membres de l’industrie avant de promulguer le projet de loi S-224, Loi canadienne sur le paiement sans dĂ©lai. Il n’a pas non plus rĂ©examinĂ© et rĂ©visĂ© le projet de loi après la publication du rapport Reynolds et Vogel, affirme la Section du droit de la construction et des infrastructures de l’ABC dans une lettre (disponible uniquement en anglais) adressĂ©e Ă la ministre des Services publics et de l'Approvisionnement.
[TRADUCTION] « Le gouvernement fĂ©dĂ©ral devrait suivre l’exemple de l’Ontario et introduire un processus de consultations approfondies avant de promulguer une telle lĂ©gislation », affirme la section. « Il serait judicieux de rĂ©examiner le projet de loi S-224 Ă la lumière des considĂ©rables travaux entrepris par l’Ontario; travaux dont les conclusions seraient tout aussi applicables au contexte fĂ©dĂ©ral. »
Le projet de loi sous sa forme actuelle prĂ©sente un certain nombre de problèmes dont de possibles consĂ©quences imprĂ©vues causĂ©es par un processus d’arbitrage obligatoire qui n’aborde pas des points tels que les qualifications et les pouvoirs de l’arbitre, le genre de preuve dont il peut tenir compte, les modalitĂ©s de l’Ă©tablissement des honoraires, et la question de savoir si l’arbitrage peut porter sur de multiples questions.
[TRADUCTION] « Le plus important est peut-ĂŞtre que M. Reynolds et Mme Vogel ont tĂ©moignĂ© lors de l’audience du comitĂ© sĂ©natorial sur le projet de loi S-224 concernant l’importance de l’Ă©tablissement (et le financement), par le gouvernement, d’une “entitĂ© de nomination autorisĂ©e” pour que le système d’arbitrage puisse fonctionner avec succès, mais que le projet de loi n’envisage aucune entitĂ© de ce genre. La mise en place d’un système d’arbitrage exige une participation, un engagement et un financement actifs de la part du ministère chargĂ© de son administration. »
La section souligne en outre que tout rĂ©gime de paiement doit « trouver un Ă©quilibre entre la règlementation et la libertĂ© contractuelle ». Le projet de loi S-224 est très normatif et ne laisse aux parties que peu de souplesse quant aux arrangements qui conviennent le mieux Ă chaque projet particulier, dĂ©clare la section.
[TRADUCTION] « L’ABC se rĂ©jouit des efforts dĂ©ployĂ©s pour envisager la question du paiement sans dĂ©lai dans le secteur de la construction », affirme la section. « Cependant, le projet de loi S-224 sous sa forme actuelle soulève un certain nombre d’enjeux. La lĂ©gislation sur le paiement sans dĂ©lai aura des incidences importantes et directes sur les arrangements commerciaux dans toutes les rĂ©gions du pays, et toute proposition de lĂ©gislation devrait reflĂ©ter un vaste Ă©ventail de commentaires des intervenants et trouver un Ă©quilibre entre la règlementation et la libertĂ© contractuelle. Ce n’est pas le cas du projet de loi S-224 Ă ces deux Ă©gards. »