Au lieu de mettre fin à un programme pilote sujet à controverse comme le recommande l’ABC, le ministère de l’Immigration en étend la portée, au grand regret de la Section du droit de l’immigration.
La section a écrit à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada en juillet (disponible uniquement en anglais) affirmant que ses membres avaient entendu des récits inquiétants faits par des ressortissants étrangers qui essayaient d’utiliser les services proposés par le projet pilote pour renouveler ou confirmer leur statut et demander de revenir au Canada. La section a suggéré une approche plus collaborative pour résoudre les temps d’attente excessifs aux postes frontaliers.
Après avoir découvert que deux postes frontaliers supplémentaires situés au Québec ont été ajoutés au projet pilote, la section a écrit aux ministres respectifs de la Sécurité publique et de l’Immigration en novembre pour réitérer la nécessité d’adopter une approche différente.
[TRADUCTION] « La section de l’ABC est d’avis que le projet pilote est illégal et qu’il sera sans aucun doute contesté devant les tribunaux », a affirmé la section dans sa lettre la plus récente (disponible uniquement en anglais). « Nous exhortons le gouvernement fédéral à annuler ce projet pilote. »
La section souligne que de nombreux ressortissants étrangers qui séjournent légalement au Canada en qualité de résidents temporaires utilisent le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés pour quitter le Canada et y revenir immédiatement, stratagème connu sous le nom « aller-retour à la frontière » (flagpoling), pour déposer une demande de permis de travail ou confirmer leur droit d’établissement après avoir reçu un visa de résident permanent. Le projet pilote, qui limite l’aller-retour à la frontière au mardi, mercredi et jeudi aux postes frontaliers du sud de l’Ontario, a été mis en place pour tenter de réduire le nombre très important de passages pendant les fins de semaine et les temps d’attente excessifs à ces points d’entrée particuliers.
La section, tout en comprenant très bien l’objectif du projet pilote, souligne que de nombreux ressortissants étrangers ont des raisons légitimes de faire l’aller-retour à la frontière pendant les fins de semaine puisqu’autrement, ils pourraient être obligés de prendre des congés ou de faire manquer l’école à leurs enfants. Si un agent décide de différer un examen au poste frontalier, le demandeur rentre au Canada sans avoir de statut jusqu’à son examen, ce qui peut avoir des incidences sur sa capacité à travailler ou à étudier au Canada, ainsi que sur sa couverture pour les soins de santé.
Qui plus est, la section indique que le projet pilote ne produit pas les résultats souhaités.
[TRADUCTION] « Alors que le passage hors des périodes de pointe devrait signifier un traitement plus rapide, cela n’a généralement pas été le cas », écrit la section. « D’ailleurs, nos membres signalent que les demandes des ressortissants étrangers ne sont pas traitées ou font encore l’objet d’attentes prolongées lors de passages le mardi, le mercredi et le jeudi (soit les jours désignés pour leur traitement) dans le sud de l’Ontario. Il a également été signalé que certains agents à des postes frontaliers autres que ceux désignés dans le projet pilote ont refusé de traiter les demandes. »
Cette dernière affirmation est particulièrement inquiétante, dit la section.
[TRADUCTION] « Le refus de traiter les demandes légitimes de résidents temporaires qui cherchent à revenir au Canada et le refus d’entrée opposé aux demandeurs sont illégaux et contraires à l’intérêt public. Nous vous exhortons à enjoindre aux agents de l’ASFC de s’acquitter de leurs tâches conformément à la loi et à veiller à ce que les fonds accordés à l’ASFC pour les activités connexes à l’immigration soient utilisés à cette fin. »
La section fait un certain nombre de recommandations à IRCC ou à l’ASFC, dont les suivantes :
- prendre immédiatement des mesures pour réduire le temps de traitement aux postes frontaliers de Vegreville; temps qui s’est allongé depuis la mise en œuvre du projet pilote;
- permettre aux ressortissants étrangers de sortir du Canada puis d’y revenir alors que leur demande d’extension ou de modification est en cours de traitement sans que cela menace leur statut;
- continuer à offrir aux résidents temporaires des options de rechange pour le droit d’établissement au Canada qui diminueraient la nécessité des allers-retours à la frontière pour l’obtenir;
- envisager d’utiliser une option de rechange en ligne pour prévoir les rendez-vous pour le droit d’établissement;
- ouvrir des bureaux sur le territoire dans les grands centres urbains pour traiter les demandes présentées en personne;
- établir des équipes d’agents de l’ASFC ayant des connaissances approfondies du droit canadien de l’immigration;
- élaborer un plan de communication pour éduquer le public quant aux temps de traitement pendant les périodes de pointe et en dehors de ces moments.