Avez-vous besoin de mécanismes pour contrôler les surveillants qui surveillent les surveillants?
Le projet de loi C-22, qui est actuellement Ă©tudiĂ© par le Parlement, semble imposer trop de contraintes Ă un comitĂ© parlementaire proposĂ© dont le mandat serait de surveiller toutes les activitĂ©s connexes Ă la sĂ©curitĂ© nationale, suggère un mĂ©moire de l’ABC.
Dans son mĂ©moire de 2015 sur le projet de loi C-51 dĂ©posĂ© par le gouvernement prĂ©cĂ©dent, l’ABC recommandait la crĂ©ation d’un ComitĂ© parlementaire « ayant accès Ă des renseignements secrets ». Cependant, elle ne recommandera pas la promulgation du projet de loi C-22 sans que des modifications considĂ©rables lui soient d’abord apportĂ©es.
Le projet de loi C-22 contient un certain nombre de mĂ©canismes qui empĂŞcheraient le ComitĂ© de s’acquitter de son mandat en limitant son accès aux renseignements dont il a besoin, par exemple, ou en remettant son indĂ©pendance en question. Au fond, suggère le mĂ©moire, ces interdictions impliquent un manque de confiance dans les dĂ©putĂ©s et les sĂ©nateurs qui siègeraient Ă ce comitĂ©.
« Si on ne croit pas que les membres agiront de façon responsable dans l’intĂ©rĂŞt national, il n’y a aucune raison valable de constituer un comitĂ© », affirme le mĂ©moire. « Si on fait confiance aux membres du ComitĂ©, il est inutile d’imposer des restrictions superflues qui minent son travail et son rĂ´le […] »
La prĂ©occupation majeure de l’ABC est suscitĂ©e par l’article 16, qui permettrait aux ministres et aux ministères de refuser de fournir les renseignements, se fondant sur de vagues motifs de sĂ©curitĂ© nationale; une exemption qui semble « illogique » et « inutile », car les dĂ©putĂ©s et sĂ©nateurs qu’un ministre pourrait empĂŞcher de consulter des renseignements particuliers « auraient la mĂŞme habilitation que le ministre lui-mĂŞme ».
Les prĂ©occupations nourries par l’Association Ă l’Ă©gard de cet article sont assez graves pour qu’elle s’oppose Ă la promulgation du projet de loi s’il n’en est pas retirĂ©, affirme le mĂ©moire.
« En termes simples, l’article 16 dĂ©pouillerait de tout effet le projet de loi et empĂŞcherait le ComitĂ© parlementaire de rĂ©aliser son objectif. Elle crĂ©erait une vaste disposition “Ă©chappatoire”, en grande partie sans norme, permettant aux ministres de s’exonĂ©rer eux-mĂŞmes du rĂ©gime de divulgation du ComitĂ©. »
Le mĂ©moire souligne le fait que l’une des principales raisons pour l’Ă©tablissement d’un comitĂ© de surveillance des Parlementaires est de rassurer la population canadienne quant Ă la transparence des opĂ©rations de son gouvernement et Ă sa responsabilisation.
« Bien que les Canadiens et Canadiennes ne peuvent pas connaĂ®tre les renseignements qui, selon leur gouvernement, doivent ĂŞtre conservĂ©s secrets, leurs reprĂ©sentants Ă©lus, dĂ»ment formĂ©s et ayant fait l’objet des vĂ©rifications de sĂ©curitĂ© appropriĂ©es, devraient pouvoir les connaĂ®tre en leur nom. »
Parmi les autres préoccupations importantes, bien que moins urgentes, soulevées par la législation proposée, notons les suivantes :
- l’absence d’une dĂ©finition de l’expression « sĂ©curitĂ© nationale »,
- les ministres auraient le contrĂ´le sur ce que le ComitĂ© Ă©tudie. « Le groupe chargĂ© d’examiner ou de superviser les organismes de sĂ©curitĂ© nationale canadienne devrait ĂŞtre considĂ©rĂ© comme indĂ©pendant du gouvernement »;
- la lĂ©gislation n’Ă©nonce pas clairement le but du ComitĂ©;
- le risque de politisation de la composition proposée du Comité;
- le manque de recours à la disposition du Comité si les ministres refusent de communiquer les renseignements;
- le premier ministre ou le gouverneur en conseil nommerait la personne qui prĂ©side le ComitĂ©, ce qui constituerait « un autre empiĂ©tement inutile » sur ses travaux;
- l’habilitation de sĂ©curitĂ© des membres serait confiĂ©e aux organismes mĂŞmes que le ComitĂ© surveillerait, ce qui leur donne le pouvoir de s’opposer Ă toute nomination qui, de leur point de vue, risquerait de leur poser des problèmes;
- pour ĂŞtre efficace, le ComitĂ© doit disposer du pouvoir d’obliger les tĂ©moins Ă comparaĂ®tre et d’ordonner la production de documents;
- il devrait ĂŞtre exigĂ© du ComitĂ© qu’il produise des rapports annuels publics;
- le gouverneur en conseil ne devrait pas pouvoir prendre de règlements qui affectent le ComitĂ© de façon importante. « L’organe exĂ©cutif, qui fait l’objet de l’examen du ComitĂ©, ne devrait pas pouvoir restreindre le travail du ComitĂ© sans s’adresser au Parlement. »