Les libellés des projets de loi du nouveau gouvernement libéral font certainement preuve de précision, quoiqu'ils soient loin d’être poétiques.
Le projet de loi C-4 en est un bel exemple. Intitulé Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi sur les relations de travail au Parlement, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et la Loi de l'impôt sur le revenu, nul ne pourra dire que son titre ne précise pas les intentions du gouvernement.
En avril, trois sections de l’ABC ont écrit au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées pour commenter la partie du projet de loi qui abroge le projet de loi C-377, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu.
L’opposition de l’ABC au projet de loi C-377 remonte à son dépôt à la Chambre des communes en 2012. Les sections du droit constitutionnel et des droits de la personne, du droit de la vie privée et de l’accès à l’information et du droit des régimes de retraite et des avantages sociaux ont écrit plusieurs mémoires depuis et ont comparu devant un bon nombre de comités parlementaires pour faire valoir leurs préoccupations à son sujet. Celui-ci a néanmoins été adopté en 2015.
« Nous étions et demeurons de l’avis que le projet de loi C-377 était fondamentalement vicié et qu’il engendrait de graves préoccupations en matière de droit de la vie privée, de droit constitutionnel et de droit des régimes de retraite. Il n’aurait jamais dû être adopté », disent les présidents actuels des sections dans leur lettre du 13 avril dernier.
En effet, en septembre 2012, les présidents de ces sections à l’époque ont écrit que non seulement « on ne voit pas bien quel enjeu ou problème perçu le projet de loi est censé régler », mais aussi « que les sections de l’ABC ont de grandes réserves au sujet du projet de loi, d’un point de vue procédural. Le projet de loi pourrait avoir une importante incidence sur les activités des syndicats, pourtant les processus en cause sont intégrés à des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu. À notre avis, il est inapproprié que des restrictions opérationnelles soient introduites par des modifications à la législation fiscale. »
Dans une lettre de décembre 2014, les sections soulignaient que le projet de loi imposait la divulgation de renseignements personnels, y compris du traitement et des salaires d’employés et d’entrepreneurs d’organisations indépendantes et que cette obligation « dépasse le cadre de ce qui a toujours été prévu aux termes des lois canadiennes ». Cette obligation paraissait incompatible avec les garanties relatives à la vie privée que prévoient de nombreuses lois sur la protection de la vie privée et la jurisprudence constitutionnelle canadienne.
Une autre préoccupation concernait les exonérations relatives au secret professionnel de l’avocat qui demeuraient trop restreintes. L’ABC recommandait l’adoption d’une « clause d’exonération générale relative aux renseignements protégés par le privilège du secret professionnel de l’avocat au lieu de limiter l’exonération » à des activités précises.
Les sections trouvaient aussi que la définition de « fiducie de syndicat » était trop vaste, englobant du coup n’importe quel organisme « ayant notamment pour objet de régir les relations entre les employeurs et les employés ». Tandis que le projet de loi visait les syndicats, ses provisions pourraient éventuellement aussi englober « tout fonds de retraite ou d’avantages sociaux qui compte des syndiqués parmi ses bénéficiaires ».
En 2012, l’ABC a sévèrement critiqué le projet de loi C-377 et n’y trouvait rien de méritoire.
« Les modifications proposées dans cette lettre ne sont pas exhaustives et ne peuvent pas être interprétées comme un appui au projet de loi », ont écrit les sections dans leur lettre de novembre 2012. « Les Sections de l’ABC soutiennent que le projet de loi ne devrait pas être adopté, même s’il comportait ces modifications proposées. »
Nous guetterons avec intérêt son abrogation.