Le ComitĂ© des Règles de la Cour d’appel fĂ©dĂ©rale et de la Cour fĂ©dĂ©rale pose aux intervenants du système judiciaire la question philosophique suivante ayant des incidences pratiques : Quel est le but des dĂ©pens et comment les Ă©valuer au mieux pour atteindre cet objectif?
Comme pour la plupart des questions philosophiques, la réponse varie selon celui qui la donne.
En octobre, le ComitĂ© a envoyĂ© un document de travail Ă des membres de la communautĂ© juridique afin d’obtenir des commentaires suscitĂ©s par les questions suivantes dans quelques domaines gĂ©nĂ©raux.
- Quel est le but gĂ©nĂ©ral des dĂ©pens (indemnisation, dissuader les abus du système judiciaire, encourager le règlement, faciliter l’accès Ă la justice)?
- Les Règles des cours fédérales devraient-elles prévoir des dépens différents selon le type de litige?
- Devrait-il exister des règles et des dépens particuliers en cas de demande vexatoire?
- Le mode de calcul des dépens, et le Tarif B des cours, devraient-ils être modifiés?
- Devrait-il exister des règles rĂ©gissant l’adjudication de dĂ©pens aux juristes bĂ©nĂ©voles?
Le ComitĂ© a demandĂ© plus prĂ©cisĂ©ment que les Règles des cours fĂ©dĂ©rales soient examinĂ©es du point de vue de l’accès Ă la justice.
Le ComitĂ© de liaison entre la magistrature des Cours fĂ©dĂ©rales et le barreau de l’ABC a envoyĂ© le document de travail aux sections de l’Association. Les trois rĂ©ponses qu’il a reçues, provenant de la Section du droit de la taxe Ă la consommation, des douanes et du commerce, de la Section de la propriĂ©tĂ© intellectuelle et de la Section du droit maritime, ensuite envoyĂ©es au ComitĂ© des Règles (disponible uniquement en anglais), illustrent la façon dont la perception de l’Ă©valuation des dĂ©pens appropriĂ©s diffère en fonction du domaine de droit exercĂ©. Alors qu’aucun des groupes n’a rĂ©pondu Ă toutes les questions, et qu’ils n’ont pas tous rĂ©pondu aux mĂŞmes questions, il existe cependant un certain nombre de domaines dans lesquels ils s’accordent.
S’agissant des demandes vexatoires, ni la Section du droit de la taxe Ă la consommation, des douanes et du commerce, ni la Section de la propriĂ©tĂ© intellectuelle ne considèrent les dĂ©pens comme une dissuasion efficace.
« Les parties instables et dĂ©raisonnables peuvent utiliser le contentieux comme un moyen de harcèlement* », a Ă©crit la Section du droit de la taxe Ă la consommation, des douanes et du commerce. « Il est peu probable que ces parties rĂ©alisent une analyse des risques objective et raisonnable. Par consĂ©quent, il est possible que des modifications des règles n’aident aucunement Ă atteindre l’objectif de dissuasion des comportements rĂ©prĂ©hensibles. »
Quant Ă elle, la Section de la propriĂ©tĂ© intellectuelle a dĂ©clarĂ© que les Règles et la lĂ©gislation prĂ©voient dĂ©jĂ les cas de « litige vĂ©ritablement abusif » et que « (a) les approches jurisprudentielles et discrĂ©tionnaires donnent aux cours la souplesse nĂ©cessaire pour traiter chaque cas de façon appropriĂ©e et protĂ©ger la capacitĂ© des reprĂ©sentants de plaider sans restriction les intĂ©rĂŞts de leurs clients sans craindre l’adjudication de dĂ©pens Ă titre de reprĂ©sailles. »
En ce qui concerne les tarifs, les trois sections ont approuvĂ© l’idĂ©e d’une forme de modèle tarifaire. Cependant, elles ont Ă©galement convenu qu’il est grand temps que les cours rĂ©visent le Tarif B.
« De façon gĂ©nĂ©rale, les montants des indemnisations prĂ©vues par le Tarif B n’ont pas suivi l’accroissement des dĂ©pens », Ă©crit la Section du droit maritime dans sa rĂ©ponse, qui ne portait que sur le Tarif.
« Un tarif est une mĂ©thode appropriĂ©e pour calculer les dĂ©pens s’il est clair et appliquĂ© uniformĂ©ment », Ă©crit la Section de la propriĂ©tĂ© intellectuelle, qui recommande de conserver ce mode de calcul, mais ajoute, de façon gĂ©nĂ©rale, que « les dĂ©pens prĂ©vus dans le Tarif B sont trop faibles et ne reflètent pas la pratique actuelle dans le domaine de la propriĂ©tĂ© intellectuelle. »
Quant Ă elle, la Section du droit de la taxe Ă la consommation, des douanes et du commerce dĂ©clare que l’approche « d’absence de dĂ©pens » lorsque les dĂ©pens sont calculĂ©s sur la base d’un tarif, « pourrait faciliter l’accès Ă la justice en rĂ©duisant le risque financier. Cependant, cela va Ă l’encontre de l’objectif d’indemnisation et d’encouragement des règlements. »
Qui plus est, « le tarif existant, en tant que mode de calcul des dĂ©pens, n’est pas clair, et les montants prĂ©vus au Tarif B sont tellement faibles que seul un plaideur dĂ©muni s’en inquiètera. Ă€ cet Ă©gard, les cours ont dĂ©jĂ un système d’absence de dĂ©pens ».
En ce qui concerne les affaires plaidĂ©es par des juristes bĂ©nĂ©voles, la Section du droit de la taxe Ă la consommation, des douanes et du commerce dĂ©clare que la mise en place d’ententes aux termes desquelles le juriste bĂ©nĂ©vole a le droit d’ĂŞtre rĂ©munĂ©rĂ© pourrait accroĂ®tre l’accès Ă la justice, mais cela nuirait Ă l’esprit mĂŞme du bĂ©nĂ©volat. Elle suggère, dans les affaires plaidĂ©es par des juristes bĂ©nĂ©voles, de verser les dĂ©pens dans un fonds pour l’accès Ă la justice. « Amasser un “trĂ©sor de guerre” sous forme de dĂ©pens pourrait servir Ă appuyer les organisations bĂ©nĂ©voles, Ă financer des projets qui aident Ă informer les plaideurs non reprĂ©sentĂ©s ou Ă acquitter les frais administratifs d’un programme d’avocats de service. »
La Section de la propriĂ©tĂ© intellectuelle n’est pas d’accord sur ce point, affirmant qu’elle appuierait un accord aux termes duquel les juristes ont le droit de profiter des dĂ©pens lorsqu’ils sont adjugĂ©s. « Sinon, l’adjudication des dĂ©pens Ă la partie serait dĂ©nuĂ©e de fondement puisqu’elle n’engage aucun frais juridique. Cela protègerait indĂ»ment la partie opposĂ©e de possibles consĂ©quences financières de l’instance. »
*N.D.T. Toutes les citations sont des traductions des citations originales faites en anglais.