L’honorable Edith Campbell

l'honorable Edith CampbellQUEL CHEMINEMENT VOUS A MENÉ AU MONDE DU DROIT ET À LA MAGISTRATURE?

J’ai grandi pensant que je me dirigerais vers une carrière scientifique. J’ai d’ailleurs entrepris et complété des études collégiales en sciences à cette fin. C’est à travers mes cours à option que j’ai découvert que j’avais aussi des affinités avec les sciences sociales. Tiraillée entre ces deux domaines, j’ai fait une demande d’admission au programme de baccalauréat en biologie et à celui de la licence en droit. Être admise dans ces deux programmes n’a pas facilité mon choix. C’est cependant ma curiosité pour le domaine du droit et ses maintes possibilités qui a fait pencher la balance en sa faveur.

J’ai eu l’opportunité de compléter le programme national de droit civil et de Common Law à l’Université d’Ottawa, ce qui m’a ouvert les portes à la pratique du droit dans l’ensemble du pays.

Durant mes 22 années de carrière, tout d’abord comme procureure de la Couronne avec le Service des poursuites pénales du Canada, puis comme avocate pour le ministère de la Justice du Canada, j’ai eu la chance de travailler au Québec, dans la région d’Ottawa, dans les provinces maritimes, au Yukon, et au Nunavut. Cela m’a permis de travailler non seulement dans des dossiers de poursuites, en vertu du Code criminel et d’autres lois fédérales comme la Loi sur la Concurrence, mais aussi dans des dossiers en matière civile. Cela m’a également permis de rencontrer et de travailler avec des gens de tous les horizons qui m’ont, d’une façon ou d’une autre, permis d’évoluer tant au niveau personnel que professionnel.

Je suis arrivée au Yukon en 2003 pour y travailler comme procureure de la Couronne pour ce qui devait être un terme d’un an. Je ne pensais pas, à l’époque, m’y établir de façon permanente. Cependant, le travail et la vie au Yukon, bien que remplis de défis, ont surpassé mes attentes. Après avoir tenté, avec ma famille, de nous établir ailleurs à deux reprises, nous avons dû nous rendre à l’évidence que le Yukon nous manquait. Ce n’est que quelques années après notre retour au territoire, en 2013, que j’ai décidé de poser ma candidature à la magistrature, et que je suis devenue la première femme juge résidente de la Cour suprême du Yukon en 2018.

QUELLE EXPÉRIENCE DE VOTRE CARRIÈRE JURIDIQUE VOUS A LE MIEUX PRÉPARÉ À VOTRE TRAVAIL AU SEIN DE LA MAGISTRATURE?

Je crois que c’est la diversité de ma pratique en litige, tout d’abord en droit criminel puis en droit civil, qui m’a le mieux préparée au travail de juge tant dans la salle de cour qu’à l’extérieur de la salle de cour. Les juges de la Cour suprême du Yukon sont des généralistes. Nous siégeons autant dans des dossiers civils que familiaux ou criminels.

QUELS CONSEILS DONNERIEZ-VOUS AUX JURISTES QUI COMPARAISSENT DEVANT VOUS?

La préparation est essentielle. On ne le dira jamais assez. Les avocats(es) les plus efficaces et convaincants(es) sont celles et ceux qui sont en mesure d’identifier les faits et les questions juridiques importants dans leurs dossiers et qui les maîtrisent bien. Ne soulevez pas et ne plaidez pas toutes les questions possibles et imaginables, vous risquez de perdre votre auditeur/auditrice en chemin. Soyez concis(e), organisé(e) et droit au but tant à l’oral qu’à l’écrit. Évitez les exagérations et les effets de toge. Ils n’impressionnent personne.

Les questions des juges reflètent leurs préoccupations et questionnements, assurez-vous d’y répondre au meilleur de vos connaissances et habiletés. Parfois, en plaidoirie orale, cela peut aussi impliquer d’admettre ne pas s’être spécifiquement penché(e) sur une question de nature périphérique et, si possible, suggérer une piste de solution. Ignorer les questions du/de la juge ou les esquisser ne les feront pas disparaître, et constituera plutôt une occasion manquée de le/la convaincre du bien-fondé de votre position.

Faites preuve de civilité et de courtoisie. Le contraire nuit non seulement à votre réputation mais, ultimement, aux intérêts de vos clients.

QUE SOUHAITEZ-VOUS QUE LE PUBLIC SACHE AU SUJET DU SYSTÈME DE JUSTICE?

Bien qu’il ne soit pas parfait, nous sommes privilégiés d’avoir un système de justice indépendant, basé sur la règle de droit et ouvert au public.

De plus, je pense qu’il est important de souligner que notre système de justice ne pourrait fonctionner sans l’apport et le travail important qu’accomplissent chaque jour les personnes qui oeuvrent dans les différents palais de justice à travers le pays, incluant les greffiers(ères) et les autres employés(es) du greffe, les shérifs, les assistants(es) judiciaires, les coordonnateurs(rices) de procès, et les techniciens(ennes) en informatique.