Calder v Alberta, 2017 ABQB 162 (disponible uniquement en anglais)
Le 7 mars 2017, monsieur le juge Neufeld, de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta, a publiĂ© sa dĂ©cision quant au trop payĂ© d’une prestation de retraite conformĂ©ment Ă la loi intitulĂ©e Public Service Pension Plan Act (PSPPA). Se fondant sur un certain nombre de causes d’action, les demandeurs demandaient que les versements de prestations d’une retraite surĂ©valuĂ©e se poursuivent. En fin de compte, le juge Neufeld a affirmĂ© que les dĂ©fenderesses, soit la province de l’Alberta et l’Alberta Pension Services Corporation (APSC), devaient assumer la responsabilitĂ© des assertions nĂ©gligentes et inexactes envers les demandeurs; responsabilitĂ© s’Ă©levant Ă 265 017 $.
M. William Calder, Ph. D., avait travaillĂ© comme gestionnaire pour la province de l’Alberta de 1978 Ă 1986, avant de dĂ©missionner et d’accepter un poste en Saskatchewan. En 1995, il est revenu travailler dans la province de l’Alberta. Entre la fin du premier emploi en Alberta et le dĂ©but du second, la province a clos le rĂ©gime de retraite original et en a ouvert un nouveau. M. Caldera commencĂ© Ă percevoir ses prestations de retraite en septembre 2011, recevant, au dĂ©part, 11 646,03 $ par mois, dont 8 417,09 $ Ă©taient imputables au rĂ©gime de retraite d’origine. Le 2 juin 2014, l’APSC l’a informĂ© qu’il y avait eu erreur dans le calcul de sa retraite au titre du premier rĂ©gime et qu’il n’avait droit qu’Ă 2 232,16 $ par mois et non Ă 8 417,09 $. L’APSC a rajustĂ© les prestations de retraite de M. Calder Ă partir d’aoĂ»t 2014, mais n’a pas demandĂ© de remboursement du trop payĂ©. Il y avait 23 autres retraitĂ©s qui percevaient des prestations versĂ©es par le rĂ©gime original et par le nouveau rĂ©gime et qui se trouvaient dans la mĂŞme situation. La demande de M. Calder devait servir de cause type pour les demandes des autres.
La correction des prestations de retraite de M. Calder Ă©tait fondĂ©e sur une interprĂ©tation, de 2012, des dispositions de la PSPPA rĂ©gissant la façon dont les droits sont calculĂ©s. Les droits de M. Calder avaient Ă©tĂ© calculĂ©s sur la base d’une interprĂ©tation antĂ©rieure, faite en 2009, en vertu de laquelle les prestations versĂ©es au titre du rĂ©gime d’origine Ă©taient fondĂ©es sur le salaire rĂ©cent auquel un ajustement au coĂ»t de la vie Ă©tait appliquĂ©, en remontant Ă la clĂ´ture du rĂ©gime d’origine, en 1994. Monsieur le juge Neufeld a taxĂ© cette interprĂ©tation d’absurde en ce qu’elle se traduisait par la prise en compte double de l’inflation. Il a par consĂ©quent rejetĂ© l’affirmation du demandeur selon laquelle l’interprĂ©tation datant de 2009 Ă©tait correcte.
Advenant que l’interprĂ©tation datant de 2009 ne soit pas rĂ©putĂ©e correcte, les demandeurs soutenaient avoir un droit acquis de percevoir le montant le plus Ă©levĂ©. Monsieur le juge Neufeld a rejetĂ© cette allĂ©gation, affirmant que [traduction] « ni le droit des fiducies ni le droit des contrats ne peut ĂŞtre interprĂ©tĂ© si largement qu’on puisse obliger l’APSC Ă continuer indĂ©finiment d’appliquer une interprĂ©tation lĂ©gislative qui a Ă©tĂ© rĂ©putĂ©e incorrecte et de crĂ©er des rĂ©sultats absurdes » (paragraphe 48). Il a en outre rejetĂ© l’argument des demandeurs fondĂ©s sur la prĂ©clusion, affirmant que la prĂ©clusion n’est pas une cause d’action et que bien qu’elle puisse ĂŞtre invoquĂ©e comme moyen de dĂ©fense, elle ne peut ĂŞtre utilisĂ©e pour empĂŞcher l’application de dispositions lĂ©gislatives expresses.
Les demandeurs affirmaient en outre que la province et l’APSC avaient une obligation fiduciaire envers les bĂ©nĂ©ficiaires du rĂ©gime. Les dĂ©fenderesses ont reconnu que les administrateurs de rĂ©gimes de retraite privĂ©s ont une obligation fiduciaire, mais ont opĂ©rĂ© une distinction entre le cas de l’espèce et la jurisprudence antĂ©rieure, se fondant sur le fait que le rĂ©gime en question Ă©tait un rĂ©gime de retraite public Ă©tabli par la loi. Monsieur le juge Neufeld a affirmĂ© que la province a un devoir gĂ©nĂ©ral envers tous les Albertains de gĂ©rer correctement les fonds publics et que dans ce contexte, cela signifiait qu’elle devait se conformer aux dispositions de la PSPPA. Alors que monsieur le juge Neufeld n’a pas spĂ©cifiquement soulignĂ© le fait que les rĂ©gimes rĂ©gis par la PSPPA sont exonĂ©rĂ©s de l’application de la loi intitulĂ©e Employment Pension Plans Act, il a bel et bien affirmĂ© qu’il serait erronĂ© de superposer une obligation fiduciaire gĂ©nĂ©rale Ă la PSPPA qui exigerait de la province qu’elle accorde prĂ©sĂ©ance aux intĂ©rĂŞts des bĂ©nĂ©ficiaires par rapport Ă ceux du public en gĂ©nĂ©ral. Qui plus est, mĂŞme s’il existait une obligation fiduciaire, elle ne pouvait justifier d’avoir recours Ă une interprĂ©tation conduisant Ă un rĂ©sultat absurde.
Enfin, les demandeurs ont allĂ©guĂ© une assertion nĂ©gligente et inexacte. Les dĂ©fenderesses ont reconnu les trois premiers Ă©lĂ©ments du critère, y compris le fait que l’auteur de l’assertion avait agi avec nĂ©gligence en faisant la dĂ©claration. Cependant, les dĂ©fenderesses ont adoptĂ© la position selon laquelle il Ă©tait dĂ©raisonnable que M. Calder se fie Ă ces dĂ©clarations. Monsieur le juge Neufeld a conclu que M. Calder avait pris les mesures raisonnables pour vĂ©rifier les estimations qui lui avaient Ă©tĂ© communiquĂ©es et qu’il Ă©tait raisonnable qu’il s’y soit fiĂ©, mĂŞme s’il soupçonnait une quelconque erreur. Monsieur le juge Neufeld a conclu que l’Ă©lĂ©ment essentiel de la confiance des demandeurs Ă©tait [traduction] « le caractère facultatif », c’est-Ă -dire que s’ils avaient Ă©tĂ© conseillĂ©s correctement, ils auraient peut-ĂŞtre fait un certain nombre de choix diffĂ©rents, y compris celui de continuer Ă travailler. Les demandeurs se sont fiĂ©s aux renseignements qui leur avaient Ă©tĂ© communiquĂ©s pour renoncer aux autres options, Ă leur propre dĂ©triment.
S’agissant du montant, les demandeurs demandaient que leur soient accordĂ©s des dommages-intĂ©rĂŞts fondĂ©s sur la diffĂ©rence entre la valeur d’une retraite fondĂ©e sur l’interprĂ©tation de 2009 et celle de 2012. Monsieur le juge Neufeld a rejetĂ© ce point de vue. Les demandeurs n’ont pas dĂ©posĂ© suffisamment de preuves Ă©tablissant ce qu’ils auraient fait s’ils avaient reçu les conseils appropriĂ©s et n’ont, par consĂ©quent, pas Ă©tabli le prĂ©judice subi. Cependant, monsieur le juge Neufeld a affirmĂ© qu’il Ă©tait Ă©quitable de prĂ©sumer que si M. Calder avait Ă©tĂ© correctement conseillĂ©, il aurait continuĂ© Ă travailler jusqu’Ă 68 ans. Par consĂ©quent, Ă la lumière de la preuve dĂ©posĂ©e par l’actuaire de la dĂ©fenderesse, les dommages-intĂ©rĂŞts ont Ă©tĂ© Ă©valuĂ©s comme Ă©tant la diffĂ©rente nette d’impĂ´t de la valeur capitalisĂ©e du salaire et des prestations de retraite ensuite majorĂ©e pour tenir compte des impĂ´ts et produire un forfait s’Ă©levant Ă 265 017 $.
Terra Klinck et Jason R. Paquette, BMKP Law