FAQ - Privilege and Confidentiality for Lawyers in Private Practice

The Ethics and Professional Responsibility Committee has prepared answers to frequently asked questions about solicitor-client privilege and client confidentiality, providing practical guidance for addressing difficult client situations. This series of questions address scenarios commonly faced by lawyers in private practice. Please refer to the rules of your governing body for the detailed rules in your jurisdiction.

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Lors de conversations courantes, on ne fait pas nécessairement la distinction entre l'obligation de confidentialité et la protection du secret professionnel entre avocat et client puisque les deux protègent les renseignements du client contre la divulgation. Toutefois, leurs racines en droit et les exceptions qui s'appliquent à chaque notion diffèrent. La connaissance de la source des obligations fait éviter des faux pas déontologiques.

Votre obligation déontologique de confidentialité s'applique à l'ensemble des renseignements que vous apprenez en travaillant pour votre client. Cette obligation existe nonobstant la source de l'information ou son niveau de confidentialité avant de s'inscrire dans la relation avocat-client.

Le fondement sur lequel repose cette obligation déontologique est, au Québec, le Code de déontologie des avocats et d'autres lois et, dans les autres provinces et territoires, les codes de déontologie du Barreau. Les codes décrivent aussi les exceptions à l'obligation déontologique de confidentialité; ces exceptions diffèrent dans certains territoires. Votre obligation de confidentialité existe aussi en common law, découlant de la relation entre un avocat et son client. La common law n'a pas élaboré d'exceptions claires à cette obligation. Par opposition, le secret professionnel entre avocat et client s'applique seulement aux communications entre vous et votre client en vue de la prestation de conseils juridiques. Le secret professionnel est ancré dans la common law.

En 2010, la Cour suprême du Canada a déclaré, dans l'affaire Canadian Criminal Lawyers' Association concernant la Charte et l'accès à l'information, que « les seules exceptions reconnues au secret professionnel [entre avocat et client] sont la sécurité publique et le droit pour un accusé de présenter une défense pleine et entière, deux exceptions qui sont jalousement protégées »1

À l'égard de l'obligation de confidentialité et du secret professionnel entre avocat et client, les clients peuvent consentir à la divulgation de l'information. Dans certains cas, on peut conclure qu'ils ont renoncé à la confidentialité ou au secret professionnel entre avocat et client2.

Notes de fin

  1. Ontario (Sûreté et Sécurité publique) c. Criminal Lawyers’ Association, 2010 CSC 23 (CanLII).
  2. Adam Dodek, « Solicitor-Client Privilege in Canada – Challenges for the 21st Century », document de travail pour l’Association du barreau canadien, février 2011, à la p. 21.
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L’exception relative à la sécurité publique : La Cour suprême du Canada et la plupart des codes déontologiques des barreaux reconnaissent une exception relative à la sécurité publique qui peut permettre ou obliger la divulgation dans les cas où un préjudice est imminent pour une personne.

Dans l’arrêt Smith c. Jones3, la Cour suprême a conclu que les préoccupations en matière de sécurité publique écartent le secret professionnel entre avocat et client lorsque l’avocat croit raisonnablement qu’il existe une menace claire, sérieuse et imminente à la sécurité publique.4

De même, les codes de déontologie des barreaux prévoient des exceptions relatives à la sécurité publique à l’obligation déontologique de confidentialité. Le Code type de déontologie professionnelle de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada prévoit que : « Un avocat peut divulguer des renseignements confidentiels sans en divulguer plus qu’il ne faut lorsqu’il a des motifs raisonnables de penser qu’il existe un risque imminent de mort ou de blessures graves et que la divulgation est nécessaire pour prévenir cette mort ou ces blessures graves »5

Vérifiez auprès de votre barreau pour connaître la formulation précise de l’exception relative à la sécurité publique qui s’applique à l’obligation de confidentialité, particulièrement les types de préjudice futur couverts (activité criminelle, violence, lésions corporelles graves, etc.) et la nature facultative ou obligatoire de la responsabilité de l’avocat.

L’exception relative à la démonstration de l’innocence de l’accusé : Dans R. c. McClure,6 la Cour suprême du Canada a reconnu l’existence d’une exception au secret professionnel entre avocat et client lorsque l’innocence de l’accusé est en jeu. Elle a interprété cette exception de façon très stricte et l’exception devrait s’appliquer seulement dans les cas les plus rares. Les renseignements divulgués par l’avocat sous le régime de l’exception relative à la démonstration de l’innocence de l’accusé ne peuvent être utilisés contre le client.

Il n’existe aucune décision publiée dans laquelle l’application de l’arrêt McClure a entraîné une ordonnance de divulgation de renseignements protégés par le secret professionnel entre avocat et client.

Vous remarquerez que les codes de déontologie ne traitent pas de l’exception relative à la démonstration de l’innocence de l’accusé dans le contexte de l’obligation de confidentialité. On ignore si les codes de déontologie interdiraient la divulgation dans les cas où l’exception relative à la « démonstration de l’innocence » de l’accusé pourrait s’appliquer.

La divulgation d’information : honoraires et allégations contre un avocat : Tous les codes de déontologie des barreaux permettent à l’avocat de divulguer de l’information confidentielle afin d’établir ou de percevoir des honoraires ou pour se défendre ou défendre l’un de ses collègues contre toute allégation portant sur les affaires d’un client, que ce soit en matière pénale, civile ou réglementaire (par exemple, une plainte auprès d’un barreau). Peu importe la situation, l’avocat ne doit pas divulguer davantage d’information que ce qu’exige la situation.7

Il n’existe toutefois aucune exception comparable quant au secret professionnel entre avocat et client. Par conséquent, même si les codes de déontologie peuvent permettre aux avocats d’utiliser les renseignements généralement protégés par l’obligation déontologique de confidentialité, il se peut qu’il soit toujours interdit aux avocats de divulguer des renseignements protégés par le secret professionnel entre avocat et client. Lorsque le client n’est pas la partie adverse, le secret professionnel entre avocat et client peut protéger l’information même si les codes de déontologie en permettent l’utilisation. Lorsque le client est la partie adverse, cette contradiction entre l’obligation de confidentialité et le secret professionnel entre avocat et client ne se produirait pas.

Notes de fin

  1. Smith c. Jones, [1999] 1 R.C.S. 455.
  2. Ibid., au par. 77.
  3. Code type de déontologie professionnelle de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, Règle 2.03(3)
  4. R. c. McClure, [2001] R.C.S. 445.
  5. Code type de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, précité, Règles 2.03(4), 2.03(5) et 2.03(6).
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En 2006, la Cour suprême du Canada8 a établi une distinction entre le secret professionnel entre avocat et client et le privilège relatif au litige. Le secret professionnel entre avocat et client protège les communications renfermant des conseils juridiques entre un avocat et un client, tandis que le privilège relatif au litige ne se limite pas aux communications entre l’avocat et le client. Le juge Fish a indiqué que le privilège relatif au litige « touche aussi les communications entre un avocat et des tiers, ou dans le cas d’une partie non représentée, entre celle ci et des tiers. Il a pour objet d’assurer l’efficacité du processus contradictoire et non de favoriser les relations entre l’avocat et son client » .9

Comme la Cour le mentionne dans l’arrêt Blank c. Canada, il existe plusieurs distinctions importantes entre les deux privilèges :

  • Le secret professionnel entre avocat et client prend naissance dès qu’un client sollicite des conseils juridiques auprès d’un avocat, qu’il y ait ou non litige. Le privilège relatif au litige s’applique seulement dans le contexte d’un litige. 
  • Le secret professionnel entre avocat et client est ancré dans la nature confidentielle de la relation avocat-client. Il protège une relation. Le privilège relatif au litige vise à créer une zone protégée destinée à faciliter l’enquête et la préparation du dossier en vue d’un procès. Il facilite un processus. 
  • Le secret professionnel entre avocat et client s’applique seulement aux communications confidentielles entre le client et l’avocat. Le privilège relatif au litige s’applique aux communications de nature non confidentielle entre l’avocat et les tiers et comprend même le matériel qui ne se prête pas à la communication.
  • Le secret professionnel entre avocat et client dure éternellement – « la pérennité des privilèges »10 Le privilège relatif au litige « n’est ni absolu quant à sa portée, ni illimité quant à sa durée »11 et s’éteint à la fin du litige12.

La question de savoir si une communication est protégée par le privilège relatif au litige est une question de fait qu’il faut déterminer dans le contexte particulier où la communication a été effectuée.

Quand prend naissance le « privilège relatif au litige »? : Il est difficile de déterminer clairement le moment où prend naissance le privilège relatif au litige. La jurisprudence a établi qu’afin d’invoquer le privilège relatif au litige, une partie doit généralement établir deux faits :

  1. un litige était en cours ou était raisonnablement envisagé au moment de la communication
  2. l’objet dominant de la communication avait trait à ce litige.13

Un auteur a conclu qu’il faut davantage qu’une [TRADUCTION] « crainte floue ou générale de litige ».14

Dans Kennedy c. McKenzie,15 la Cour supérieure de l’Ontario a conclu qu’une partie faisant valoir le privilège relatif au litige doit établir que les documents ont été créés principalement en vue d’un litige actuel, envisagé ou prévu et pour l’une des raisons suivantes :

  • en réponse à des demandes de renseignements présentées par un mandataire de l’avocat de la partie;
  • à la demande ou à la suggestion de l’avocat de la partie;
  • en vue de les remettre à l’avocat afin d’obtenir des conseils;
  • afin de permettre à l’avocat d’intenter une action, de présenter une défense contre une action ou de préparer un mémoire15

Ce domaine de jurisprudence évolue. Vérifier la jurisprudence récente.

Notes de fin

  1. Blank c. Canada, 2006 CSC 39.
  2. Ibid. au par. 27.
  3. Ibid. au par. 37.
  4. Ibid.
  5. Ibid. au par. 28.
  6. Keefer Laundry Ltd. c. Pellerin Milnor Corp., 2006 BCSC 1180 (CanLII) aux par. 96 à 98; cité avec approbation dans Ross River Dena Council c. AG Canada, 2009 YKSC4 (CanLII), au par. 31.
  7. Gloria Geddes, « The Fragile Privilege: Establishing and Safeguarding Solicitor-Client Privilege », (1999) 47 (4) Revue fiscale canadienne 799, à la p. 822.
  8. Kennedy c. McKenzie, [2005] O.J. No 2060 (C.S.).
  9. Ibid., au par. 20, cité avec approbation dans R. c. Dunn, 2012 ONSC 2748 (CanLII).
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Intérêt commun – Contexte d’un litige : Habituellement, lorsqu’un avocat divulgue avec l’autorisation du client des renseignements privilégiés à des tiers, la protection du secret professionnel est considérée comme ayant fait l’objet d’une renonciation. Cependant, si les parties ont un intérêt commun tel qu’il leur serait avantageux d’échanger des renseignements privilégiés, il n’y a pas de présomption de renonciation.

Au Canada, tous les renseignements privilégiés entre des parties qui ont un « intérêt commun » continuent d’être protégés par le secret professionnel entre avocat et client. Le principe général a été décrit pour la première fois dans l’arrêt Buttes Gas & Oil c. Hammer (no. 3).17 Dans cette affaire, Lord Denning a estimé qu’il serait avantageux pour le système contradictoire, lorsque les parties visent un résultat ou un but commun, mais non identique, qu’elles puissent unifier leur « même intérêt ».

Aux États Unis, l’« exception de l’intérêt commun » au secret professionnel entre avocat et client s’applique seulement dans les cas de litige. Dans la décision rendue par la Cour d’appel du troisième circuit dans l’affaire In re Teleglobe Communications Corp18 : la cour a conclu que le privilège de l’intérêt commun s’applique [TRADUCTION] « lorsque des clients ayant des avocats distincts partagent des renseignements par ailleurs privilégiés afin de coordonner leurs activités juridiques » dans le contexte d’un litige19.

Intérêt commun – Contexte commercial : Initialement, l’application du secret professionnel entre avocat et client aux parties ayant un « intérêt commun » avait lieu seulement dans le contexte d’un litige. Il a depuis été étendu au Canada de manière à s’appliquer à certaines opérations commerciales [TRADUCTION] « au sein du groupe de sociétés ».20 La logique sous-tendant [TRADUCTION] l’« exception fondée sur un intérêt commun » dans un litige concerne la promotion du bon fonctionnement du système contradictoire. Dans le contexte d’opérations commerciales, le fondement philosophique est différent : l’intérêt commun des parties à la réalisation efficace d’une opération financière est reconnu comme constituant un avantage pour elles ainsi que pour l’économie et la société dans son ensemble.

La simple existence d’une opération commerciale ne suffit toutefois pas à mettre à l’abri toutes les communications entre client et avocat. Dans certains cas, les circonstances indiquent qu’il y a effectivement eu perte du secret professionnel ou renonciation à celui ci. Par exemple, dans une fusion ou autre opération commerciale où il y a une opposition manifeste entre les intérêts des parties, on ne peut guère justifier un échange d’information au nom d’un intérêt commun supérieur. Par ailleurs, les tribunaux ont conclu que dans de nombreuses opérations commerciales, les parties veulent négocier à la lumière d’une compréhension commune de la position juridique de chacun et que l’attente, explicite ou implicite, veut que les opinions contribuent à la réalisation de l’opération et, en ce sens, bénéficient à toutes les parties.21

Pour que l’« exception fondée sur un intérêt commun soit d’application et étende à un tiers le privilège du secret professionnel, l’intention des parties échangeant de l’information doit être manifestement volontaire, et l’échange doit se faire dans l’optique d’un avantage commun ».22

Une entente signée entre les parties et énonçant leur intérêt commercial commun et leur intention de protéger leurs communications privilégiées qu’elles partagent pourrait servir à procurer une preuve importante de ces intentions.

L’exception du « privilège de l’"intérêt commun" » est-elle la même aux États Unis qu’au Canada? : Aux États Unis, l’« exception de l’intérêt commun » au secret professionnel entre avocat et client s’applique seulement dans les cas de litige. Dans la décision rendue par la Cour d’appel du troisième circuit dans l’affaire In re Teleglobe Communications Corp.23 ,la cour a conclu que le privilège de l’intérêt commun s’applique [TRADUCTION] « lorsque des clients ayant des avocats distincts partagent des renseignements par ailleurs privilégiés afin de coordonner leurs activités juridiques » dans le contexte d’un litige24 Cela est conforme à l’alinéa 502(b)(3) de la Uniform Rule of Evidence des États Unis, qui nécessite une action en cours avant qu’on puisse faire valoir la défense de l’intérêt commun contre la renonciation au privilège.25

Comme on l’a vu précédemment, les tribunaux canadiens ont appliqué l’« exception de l’intérêt commun » à certaines opérations commerciales. Un tribunal canadien était prêt à appliquer le privilège de l’intérêt commun dans le contexte d’une opération commerciale transfrontalière. Dans la décision rendue en 2002 par la Cour suprême de la Colombie Britannique, Fraser Milner Casgrain LLP c. Minister of National Revenue26 la cour a appliqué l’exception de l’intérêt commun aux communications entre les parties au Canada et aux États Unis, expliquant que [TRADUCTION] « c’est l’intérêt commun des parties dans la réalisation de l’opération qui constitue l’élément qui donne naissance au privilège. La préservation de la confidentialité en constitue la justification »27 La nature transfrontalière de ces communications n’a pas eu d’effet sur la décision de la cour.

Le « mandat conjoint » : Le privilège conjoint est reconnu au Canada et aux États Unis et fait référence au cas où un avocat représente plusieurs clients dans une affaire.

Dans la réalisation d’opérations transfrontalières, il faudrait clairement indiquer les communications privilégiées et celles ci ne devraient être transmises que par l’intermédiaire d’un avocat dont les services ont été retenus conjointement par les parties afin d’obtenir la protection du « privilège conjoint ».

La divulgation qui ne s’inscrit pas dans un mandat conjoint constitue une renonciation au secret professionnel entre avocat et client aux États Unis, de sorte qu’il faut prendre soin de transmettre les communications par des voies protégées.

Notes de fin

  1. Buttes Gas & Oil c. Hammer, [1980] 3 All E.R. 475 (C.A.).
  2. Ronald D. Manes & Michael P. Silver, Solicitor-Client Privilege in Canadian Law, (Toronto: Butterworths, 1993) à la p. 64.
  3. Buttes Gas, précité, cité dans Pitney Bowes of Canada Ltd. c. R., 2003 CFPI 214, [2003] 3 C.T.C. 98, 229 F.T.R. 277, au par. 12.
  4. Dodek,  précité note 2, à la p. 30.
  5. Pitney Bowes, précité note 25, aux par. 19 et 20. Jusqu’à présent, cependant il y a eu peu d’indications des tribunaux d’appel sur ce point. Voir Maximum Ventures Inc. c. De Graaf, 2007 BCCA 510, au par. 14.
  6. Pitney Bowes, supra, note 25, au par. 19.
  7. In re Teleglobe Communications Corp., 493 F. 3d 345 (3d Cir. 2007).
  8. Ibid.
  9. Uniform Rules of Evidence Act (1999). Voir aussi Holland c. Island Creek Corp., 885 F. Supp 4, 6 (Dist. Ct. D.C. 1995) : On peut faire valoir le privilège d’intérêt commun à l’égard des communications entre les avocats de différentes parties si [TRADUCTION] « (1) la divulgation est faite en vue d’un litige en cours ou prévu ou d’une autre instance contradictoire; (2) en vue de la réalisation d’un intérêt commun; (3) la divulgation est faite d’une manière non incompatible avec la préservation de la confidentialité contre les parties adverses. »
  10. Fraser Milner Casgrain LLP c. Minister of National Revenue, 2002 BCSC 1344, 6 B.C.L.R. (4th) 135.
  11. Ibid. au par. 12.
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Si un client sollicite un avis juridique pour faciliter la perpétration d’un crime ou d’une fraude, les renseignements qu’il communique ne sont pas protégés par le secret professionnel entre avocat et client. Ce fait est qualifié comme une exclusion et non une exception, car la nature de ces communications va complètement à l’encontre du secret professionnel qui doit normalement s’appliquer. Certains tribunaux ont appliqué à certains délits civils l’exclusion relative au crime et à la fraude. Ce domaine de droit est incertain et controversé et nécessite des éclaircissements de la part des tribunaux d’appel.28 Vérifiez la jurisprudence récente si vous avez des doutes au sujet de votre situation.

Toutefois, les codes de conduite des barreaux ne reconnaissent pas d’exception à l’obligation de confidentialité relativement au crime ou à la fraude. Lorsque l’exception relative à la sécurité publique n’est pas d’application, il se peut que même en l’absence de privilège au titre du secret professionnel entre avocat et client, le code du barreau interdise la communication volontaire de renseignements.

Notes de fin

  1. Pour une analyse plus détaillée, voir Dodek, précité, note 2, aux p. 11 à 14.
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Vous êtes tenu de garder secret tout ce que vous avez appris des affaires de votre client tout au long de votre mandat. Cette obligation subsiste après la fin du mandat.

Les autres membres de votre cabinet sont également astreints à cette obligation de confidentialité. La Cour suprême du Canada a déjà jugé que l’obligation de confidentialité qu’impose la relation de confiance avec le client incombe non seulement à l’avocat pris individuellement, mais aussi au cabinet tout entier.29

Ni vous ni les autres membres de votre cabinet ne pouvez utiliser de renseignements confidentiels contre un ancien client du cabinet.

L’avocat change de cabinet : Lorsqu’un avocat change de cabinet, il sera présumé avoir partagé les renseignements confidentiels de ses anciens clients avec les membres de son nouveau cabinet, à moins que des mesures d’isolement convenables n’aient été prises qui permettent de démontrer qu’il n’y a pas de divulgation de renseignements confidentiels. Ce sont les exigences en matière de confidentialité qui expliquent les systèmes complexes érigés par les cabinets d’avocats pour éviter les situations de conflits d’intérêts.

Pour en apprendre plus sur cette question, veuillez consulter le rapport final et la trousse de documents modèles du Groupe de travail de l’ABC sur les conflits d’intérêts.30

Notes de fin

  1. R. v. Neil, [2002] 3 S.C.R. 631
  2. Conflits d’intérêts : Rapport final, recommandations et trousse de documents modèles
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Dans le contexte d'un double mandat, vous êtes tenu de faire preuve de loyauté absolue envers chacun des deux clients, et il vous incombe l'obligation déontologique de les traiter de manière égale. Avant de pouvoir accepter un double mandat, vous devez expliquer à chacun des clients la notion de loyauté absolue. Dans la plupart des provinces et territoires, aucun des renseignements communiqués par un client ne pourra être tenu confidentiel à l'égard de l'autre. Vous devez également expliquer à vos clients que si un conflit insoluble survient entre eux, vous devrez vous retirer du dossier et ne pourrez représenter ni l'un, ni l'autre.

Certaines provinces (comme l'Alberta, par exemple) autorisent les doubles mandats, à condition de mettre en œuvre des mesures d'isolement qui permettent d'empêcher la divulgation de renseignements confidentiels, tandis que les règlements applicables dans d'autres provinces (comme l'Ontario et la Colombie-Britannique, par exemple) interdisent catégoriquement que des renseignements communiqués à l'avocat par un des clients soient tenus pour confidentiels à l'égard de l'autre client dans le cadre d'un double mandat. Dans les contextes qui permettent les doubles mandats avec mesures d'isolement, il sera essentiel d'obtenir par écrit de chacun des clients leur consentement pleinement éclairé, après qu'ils aient chacun obtenu des conseils juridiques indépendants.

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En règle générale, vous ne pouvez utiliser les renseignements qui sont divulgués lors d’une enquête préalable dans le contexte d’instances ultérieures ou d’autres litiges. La « règle de l’engagement présumé », aussi connue sous le nom de « règle de l’engagement implicite », est une règle qui a été établie par les tribunaux, et qui est désormais codifiée dans les règles de procédure d’un grand nombre de provinces et territoires.

Cette règle prévoit que les éléments de preuve obtenus par la contrainte d’une partie à une instance civile lors de l’enquête préalable ne peuvent être utilisés par les parties à d’autres fins que celles de l’instance au cours de laquelle ils ont été recueillis31. En règle générale, de tels éléments de preuve ne peuvent être utilisés contre le même client ou contre un autre client, que ce soit dans le contexte de litiges parallèles ou d’une instance ultérieure.

La règle de l’engagement présumé est distincte du privilège du secret professionnel et de l’obligation de confidentialité, et n’y est pas reliée.

Exception à la règle de l’engagement présumé : Les règles applicables dans certaines provinces et certains territoires prévoient que les renseignements peuvent être utilisés dans des circonstances particulières, dont celles qui suivent :

  • avec consentement
  • aux fins d’attaquer la crédibilité d’une partie
  • en obtenant une ordonnance du tribunal
  • après que les renseignements aient été déposés en preuve auprès du tribunal ou après qu’ils auront été mentionnés au cours d’une audience (voir, par exemple, la règle 30.1 des Règles de procédure civile de l’Ontario).

Notes de fin

  1. Voir Juman c. Doucette, 2008 CSC 8, [2008] 1 RCS 157 au paragraphe 1. Voir également Lac d’Amiante du Québec Ltée c. 2858-0702 Québec Inc, 2001 CSC 51, [2001] 2 RCS 743.
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À la suite de la décision de la Cour suprême du Canada dans R. c. Stinchcombe32, les avocats de la Couronne ont l’obligation de divulguer aux avocats de la défense tous les renseignements pertinents. Le manquement à cette obligation de divulgation peut mener autant à des sanctions imposées par le tribunal qu’à des mesures disciplinaires du Barreau.33 Une obligation semblable n’incombe pas aux avocats de la défense qui, contrairement aux avocats de la Couronne, jouent un rôle purement contradictoire.

L’ABC décrit le rôle de l’avocat dans le cadre de procédures contradictoires comme étant « ouvertement et forcément partial » et, qu’en conséquence, « … rien ne l’oblige […] à aider son adversaire ou à faire valoir des points défavorables à son propre client ».34 Qui plus est, le privilège du secret professionnel entre avocat et client et le privilège relatif au litige, qui protègent les communications entre un accusé et son conseiller juridique, obligent les avocats de la défense à garder le silence. Seul le client peut décider si les communications qui font l’objet d’un privilège peuvent être divulguées à une tierce partie.

Il existe trois exceptions à l’absence générale d’une exigence de divulgation pour les avocats de la défense :

  1. un alibi devra être divulgué suffisamment tôt pour en permettre la vérification;35
  2. une défense d’ordre psychiatrique devra être communiquée suffisamment tôt pour permettre à un psychiatre de la Couronne d’examiner l’accusé;36
  3. tout témoignage d’expert que la défense a l’intention d’invoquer devra être déposé 30 jours avant le début du procès.37

Une exception additionnelle se rapporte à la question des obligations de l’avocat de la défense lorsque celui-ci entre en possession de preuves matérielles d’un crime. C’est le sujet de la question 11.

Notes de fin

  1. R. c. Neil, [2002] 3 R.C.S. 631.
  2. Voir Krieger c. Law Society of Alberta, [2002] 3 R.C.S. 372, 2002 CSC 65.
  3. Association du Barreau canadien, Code de déontologie professionnelle, chapitre IX, commentaire 17.
  4. Dans R. c. Cleghorn, [1995] 3 R.C.S. 175, [1995] J.C.S.. No 73, 100 C.C.C. (3e) 393, la Cour suprême a déclaré qu’« il est établi en droit » qu’un alibi devra être communiqué de manière correcte par l’avocat de la défense et qu’une telle communication réunit deux conditions : elle doit être suffisante et présentée en temps opportun. La Cour a formulé la mise en garde suivante : « Si l’omission de communiquer l’existence d’un alibi n’annule pas la défense, elle risque d’affaiblir la valeur que le juge des faits lui accordera. » (paragraphe 3).
  5. Dans R. c. Worth, [1995] O.J. No 1063, 98 C.C.C. (3e) 133 (C.A.), la Cour d’appel de l’Ontario a mis en balance les droits garantis par l’article 7 de la Charte et l’obligation de l’accusé d’être vu par un psychiatre de la Couronne après que la défense ait soulevé la question de la santé mentale de l’accusé. La Cour a jugé qu’il existe effectivement une obligation de communiquer la défense d’aliénation mentale et de faire en sorte que l’accusé soit disponible pour un examen par les psychiatres de la Couronne.
  6. Code criminel, L.R.C., 1985, ch. C-46, article 657.3, tel que cité dans Alice Woolley et al., éd., Lawyers’ Ethics and Professional Regulation (Markham : LexisNexis, 2008) 382.
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Vous ne pouvez accepter des paiements en espèces d’un client que lorsque le montant s’élève à moins de 7 500 $ par dossier de client. Tous les barreaux ont récemment adopté des règlements interdisant aux avocats d’accepter 7 500 $ ou plus en espèces dans un même dossier de client. Ceci signifie qu’il vous est interdit d’accepter d’un même client de multiples versements en espèces qui totalisent 7 500 $ ou plus (par exemple, huit différents versements en espèces de 1 000 $). Vous trouverez, dans les règlements de chacun des barreaux, plus de précisions ainsi que certaines exceptions qui se rapportent aux clients institutionnels.

Veuillez remarquer que ce n’est pas en effectuant un paiement en espèces qu’un client pourra éviter que ne soit établi un relevé de la transaction. Il vous incombe de respecter certaines exigences de tenue de dossier pour chacun de vos clients. Les règlements des barreaux comprennent désormais des exigences très précises concernant l’identification des clients, la vérification des données concernant les clients, ainsi que la tenue des dossiers.

Exigences de base en matière de tenue de dossiers : Tous les barreaux imposent dorénavant un certain nombre d’obligations de base en matière de tenue de dossiers. Vous devez obtenir et vérifier les renseignements sur vos clients et, pour chaque client, maintenir un dossier dans lequel figureront les données suivantes :

  1. le nom complet du client;
  2. le cas échéant, l’adresse professionnelle et le numéro de téléphone au travail du client;
  3. dans le cas de clients qui sont des personnes physiques, l’adresse et le numéro de téléphone du domicile du client;
  4. dans le cas de clients qui sont des personnes physiques, la profession ou les professions du client;
  5. dans le cas de clients institutionnels autres qu’un établissement financier, un organisme public ou un émetteur assujetti, le numéro d’entreprise ou le numéro d’incorporation de l’entité; le lieu de délivrance du numéro d’entreprise ou du numéro d’incorporation, le cas échéant; ainsi que la nature générale de l’entreprise (ou des entreprises) ou de l’activité (ou des activités) menée (ou menées) par le client;
  6. dans le cas de clients institutionnels, le nom, le titre et les coordonnées de chaque particulier qui donne des instructions dans le cadre du dossier pour lequel vos services ont été engagés;
  7. dans le cas d’un client qui représente un tiers ou agit au nom de celui-ci, les mêmes renseignements, s’il y a lieu, relativement au tiers que les renseignements visés ci-dessus relativement au client.
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Le privilège du secret professionnel entre avocat et client fait la distinction entre « communications » et « éléments de preuve ». Les preuves matérielles d’un crime ne sont pas protégées par le privilège du secret professionnel, car elles ne constituent pas une communication orale ou écrite, mais plutôt des preuves matérielles. Cependant, tout ce que votre client pourrait vous dire au sujet de ces éléments de preuve serait protégé par le privilège (tant que ces propos ne sont pas jugés constituer une communication aux fins de la perpétration d’un crime futur – voir la discussion de la question 5).

L’entrée en possession de preuves matérielles d’un crime comporte des risques juridiques et déontologiques importants pour vous. Vous devriez consulter votre barreau et éventuellement un conseiller juridique.

Si vous conservez des preuves matérielles d’un crime, vous risquez d’être accusé d’entrave à la justice en vertu du paragraphe 139(2) du Code criminel qui rend coupable d’un acte criminel « quiconque volontairement tente de quelque manière […] d’entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice », voire d’être accusé de complicité après le fait en vertu du paragraphe 23(1) du Code criminel. Dans l’arrêt de principe sur cette question, R. c. Murray38, l’avocat a été accusé d’obstruction à la justice.

Dans Murray, le tribunal a accepté qu’un avocat puisse conserver des éléments de preuve incriminante pendant un délai raisonnable afin de pouvoir les examiner et les soumettre à des contrôles. Michel Proulx et David Layton proposent des lignes directrices sur ce sujet dans leur livre « Ethics and Canadian Criminal Law » (2001), dans lequel ils donnent les conseils suivants :

  1. Il faut une raison légitime pour prendre l’élément de preuve concerné. La possession et la rétention n’en sont justifiées que lorsqu’elles sont raisonnablement nécessaires pour la bonne représentation du client, c’est-à-dire, afin d’en préparer la défense.
  2. L’avocat ne doit pas examiner l’élément de preuve ou le soumettre à des contrôles si l’examen ou le contrôle en modifie ou détruit les caractéristiques physiques.
  3. L’avocat ne doit garder l’élément de preuve que pendant le délai qui est raisonnablement nécessaire afin de pouvoir en compléter l’examen ou les contrôles.
  4. L’avocat qui retire un élément de preuve incriminante de son emplacement d’origine risque de perdre la protection du privilège du secret professionnel juridique. Cette perte de privilège affecterait également les faits relatifs à l’emplacement ainsi qu’à l’état de cet élément de preuve. L’avocat risque même d’avoir l’obligation de témoigner.

Dans R. c. Murray, le juge Gravely, de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, propose à l’avocat qui s’est rendu compte qu’il est irrégulièrement entré en possession d’éléments de preuve matérielle incriminante les trois options [TRADUCTION] « juridiquement justifiables » suivantes :

  1. immédiatement remettre la preuve au ministère public, soit directement, soit anonymement;
  2. déposer la preuve auprès du juge de première instance; ou
  3. faire part au ministère public de l’existence de cette preuve et se préparer à la lutte qui sera nécessaire pour en garder le contrôle.

L’avocat ne peut se prévaloir des deuxième et troisième options que lorsque son client aura déjà été accusé d’une infraction et que les procédures sont en cours.

Si vous entrez en possession d’une preuve matérielle d’un crime avant que des procédures concernant cette preuve ne débutent contre votre client, la meilleure façon de procéder serait d’engager les services d’un conseiller juridique indépendant et de le charger de remettre la preuve à la Couronne. Les communications entre vous et ce conseiller juridique seront protégées par le privilège du secret professionnel entre avocat et client. Qui plus est, si vous procédez ainsi, les communications entre vous et votre client au sujet de la preuve pourront demeurer protégées par le privilège du secret professionnel, et vous pourriez peut-être éviter le scénario qui vous verrait appelé à témoigner contre votre client.

Notes de fin

  1. R. c. Murray, [2000] O.J. No 2182, 144 C.C.C. (3d) 289 (C.S.J.).
+

La vente d’actions est l’affaire la plus facile à trancher puisque la société continue de bénéficier du secret professionnel lorsqu’elle est vendue. La société peut changer de mains, mais elle demeure la cliente.

Lorsque les actifs sont achetés, il s’agit de savoir si l’acheteur est l’ayant cause. Il est établi depuis longtemps que le secret professionnel entre avocat et client est transmis aux ayants cause.39

La Cour supérieure de l’Ontario a énoncé le principe de la façon suivante : [TRADUCTION] « L’ayant cause peut faire valoir le secret professionnel entre avocat et client se rattachant à un prédécesseur. Ainsi, le secret professionnel du propriétaire original se transmet à un ayant cause ».40

Les tribunaux font bénéficier les ayants cause du secret professionnel puisque leurs intérêts sont communs à ceux du prédécesseur et que les communications ont été faites sous le sceau de la confidentialité. En d’autres termes, le secret professionnel entre avocat et client qui « appartient » au propriétaire d’une entreprise est transmis à l’ayant cause de l’entreprise, et celui-ci peut le faire valoir et le conserver.

Notes de fin

  1. Geffen c. Succesion Goodman, [1991] 2 R.C.S. 353; voir aussi Crescent Farms (SIDCUP) Sports Ltd. Sterling Offices et al., [1972] 1 Ch. 553 (Eng.).
  2. UPM-Kymmene Corp. c. Repap Enterprise Inc., [2001] O.J. No. 4220, au par. 10 (C.S.).
+

Lorsque vous agissez au nom d’un client en faillite, vous avez toujours une obligation de confidentialité envers lui. De façon générale, le secret professionnel entre avocat et client est conservé pendant une instance de faillite et vous ne pouvez pas divulguer de renseignements privilégiés au syndic de faillite sans le consentement de votre client failli.

Vous ne serez pas nécessairement forcé de divulguer des communications privilégiées concernant votre client en faillite, mais vous pourriez être tenu de divulguer des renseignements factuels au sujet des affaires du failli, renseignements qui ne sont pas considérés comme des communications entre vous et votre client aux fins de la prestation de conseils juridiques et qui seraient, si tel était le cas, protégés par le secret professionnel entre avocat et client.

En 1984, la Cour suprême de l’Ontario a conclu qu’un avocat peut être forcé de [TRADUCTION] « divulguer tous les renseignements concernant les affaires du failli, ses opérations et l’emplacement de ses biens, etc., qui ne nécessitent pas la divulgation de communications faites à l’appelant en vue de la prestation de conseils juridiques » .41

La Loi sur la faillite et l’insolvabilité ne traite pas directement du secret professionnel entre avocat et client ni de sa renonciation, mais la jurisprudence nous indique que le syndic ne peut y renoncer et que le secret professionnel bénéficie uniquement au failli. Dans le précédent sur l’application du secret professionnel dans une instance de faillite42 la Cour d’appel de l’Alberta a conclu que les communications privilégiées constituaient un [TRADUCTION] « droit personnel » qui n’était pas soumis à l’obligation générale de transfert de « biens », au sens attribué à ce terme à l’article 2 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, et a confirmé que [TRADUCTION] « le droit personnel que constitue le secret professionnel n’est pas modifié par la LFI » .43 Il n’existe aucune obligation ni aucun cas spécial dans le cadre d’une instance de faillite qui permettrait à quiconque, hormis le client failli, de renoncer au secret professionnel entre avocat et client.

Notes de fin

  1. Clarkson c. Chilcott, (1984) 48 O.R. (2d) 545 (C.S.).
  2. Bre-X Minerals Ltd. (Trustee of) c. Verchere, 2001 ABCA 255, [2002] 97 Alta L.R. (3d) 1.
  3. Ibid. au par. 35.
+

L’enfant mineure est votre cliente. Vous lui devez un devoir de confidentialité, et les communications que vous avez avec elle en vue de lui fournir des conseils juridiques sont protégées par le privilège du secret professionnel entre avocat et client.

Toute décision sur la communication de renseignements ou la renonciation au privilège qui les protège revient à votre cliente mineure et non à ses parents ou à vous en tant que son avocat. (Nous supposons ici que l’enfant mineure a la capacité juridique pour donner des directives à un avocat. Voir à la fin de la présente réponse les situations où un enfant mineur n’est pas compétent pour donner des directives à un avocat.)

Même si des renseignements ne sont pas visés par le privilège du secret professionnel, vous avez une obligation déontologique d’éviter de communiquer quelque renseignement que ce soit au sujet des affaires de votre cliente, même aux membres de sa famille. Les devoirs de confidentialité et de loyauté envers un client, y compris un client qui est mineur, garantissent que le client peut librement vous communiquer des renseignements et recevoir les meilleurs conseils juridiques possible.

Vous devriez expliquer à votre cliente à la fois le privilège du secret professionnel et les devoirs de confidentialité et de loyauté. Discutez-en avec votre cliente sans que ses parents ne soient présents.

Votre cliente peut choisir de communiquer des renseignements à ses parents et vous autoriser à le faire, mais il faut que ce soit clair qu’il s’agit d’un choix qui lui appartient, et qu’elle comprenne vos obligations envers elle.

Si ce sont les parents de votre cliente qui paient vos honoraires, certains renseignements sur la facturation et sur vos honoraires peuvent avoir à leur être communiqués pour des motifs pratiques. Pour éviter tout malentendu, les renseignements financiers que vous devrez communiquer aux parents de votre cliente devraient être clairement indiqués dans le mandat sur lequel vous vous entendez avec la cliente.44

Enfant qui n’a pas la capacité juridique pour donner des directives à son avocat : litiges – S’il s’agit d’un client mineur qui n’a pas la capacité juridique pour donner des directives à un avocat, que ce soit en raison de son âge, d’un manque de maturité ou d’une déficience, le tribunal devra désigner un tuteur à l’instance. Vous recevrez vos instructions du tuteur à l’instance.

Enfant qui n’a pas la capacité juridique pour donner des directives à son avocat : affaires autres que des litiges – Pour des affaires autres que des litiges, vous devez déterminer si un tuteur a été régulièrement désigné pour traiter des affaires de l’enfant, y compris ses affaires juridiques. À moins qu’il n’y ait des restrictions pertinentes aux pouvoirs de ce tuteur, vous recevrez vos instructions du tuteur.45

Notes de fin

  1. Association du Barreau canadien, Code de déontologie professionnelle 2009, chapitre IV
  2. Pour plus amples renseignements sur les situations où le client est un enfant, voir Practice Advisory, Guidelines for Representing Children, Law Society of Alberta
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Vos devoirs de loyauté et de confidentialité envers votre client restent d’application, peu importe la capacité juridique de votre client. Vous ne pouvez communiquer de renseignements confidentiels à personne, même pas à des membres de la famille, sans l’autorisation explicite ou implicite de votre client, ou une ordonnance d’un tribunal ou autre autorisation légale. En outre, le devoir de confidentialité persiste à la fin du mandat, sans limitation dans le temps, même après la mort d’un client.

Même si vous croyez que votre client a maintenant une capacité mentale réduite ou douteuse,46 vous avez toujours le devoir de préserver une relation avocat-client normale dans la mesure du possible. L’avocat d’un client ayant une compétence réduite a une obligation déontologique de veiller à ce que les intérêts de son client ne soient pas négligés et que la relation confidentielle entre lui et le client ne soit pas compromise par une communication de renseignements non autorisée.

Lorsque vous avez des motifs raisonnables de croire que le handicap de votre client risque d’avoir érodé sa capacité juridique à donner des directives ou à conclure des ententes légales exécutoires, vous devriez prendre des mesures pour faire désigner un représentant légalement autorisé, comme un tuteur ou un tuteur à l’instance. Ce représentant peut être un membre de la famille. Si de telles mesures sont nécessaires, vous ne devez pas communiquer davantage de renseignements que nécessaire.

Notes de fin

  1. Ed Montigny, Notes on Capacity to Instruct Counsel, ARCH Disability Law Centre, 15 février 2011
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Votre devoir de confidentialité protège tous les renseignements au sujet de clients actuels et d’anciens clients. La mort d’un ancien client ne change rien à ce devoir de confidentialité, qui persiste après la fin du mandat et après la mort du client. Aucun renseignement que vous obtenez au cours de la relation avocat-client ne peut être communiqué sauf ordonnance judiciaire, sous réserve toutefois de certaines nuances dans le contexte des testaments.

Comme un testament n’est pas une communication entre avocat et client et donc n’est pas protégé par un privilège, les renseignements figurant dans le testament ne sont pas privilégiés. Néanmoins, les directives visant la rédaction du testament sont des communications privilégiées.47 Ainsi, toute communication concernant la création du testament ou le choix d’un exécuteur testamentaire, d’un mandataire ou d’un fiduciaire, par exemple, est privilégiée. Seul le client peut renoncer au privilège, et non l’avocat (même après la mort du client).

Exceptions visant la renonciation à un privilège : Dans les affaires de testaments et successions, les règles de la renonciation à un privilège ont été assouplies. Pour comprendre les intentions du testateur et y faire suite ou pour déterminer l’existence d’un testament, les tribunaux ont admis la divulgation de communications privilégiées.48

Dans Geffen c. Succession Goodman49 la Cour suprême du Canada a étendu le privilège aux héritiers et ayants droit d’une personne décédée et permis que leur soient divulguées des communications privilégiées. La Cour l’a justifié en jugeant qu’il était dans l’intérêt de la justice de déterminer les intentions de la personne décédée. En cas de confusion quant à la répartition appropriée des actifs de la succession, « il ne peut être question de renoncer à quelque privilège que ce soit avant que les intentions véritables de la disposante n’aient été établies, ce qui nécessite l’admission du témoignage de l’avocat » .50

Dans ces circonstances précises, vous pouvez communiquer des renseignements confidentiels et privilégiés sans trahir votre devoir de loyauté envers votre client.

Honoraires imputés à la succession d’un ancien client : Les modalités de facturation du travail qu’un avocat peut avoir à accomplir à l’égard de la succession d’un client décédé sont souvent précisées dans le mandat conclu avec l’ancien client. Le mandat prévoit habituellement de facturer la succession.

Lorsque vous recevez la demande initiale de la succession de l’ancien client, vous devriez confirmer que vous facturerez le temps que vous mettrez à répondre à la demande. Le taux d’honoraire applicable est régi par les divers barreaux, qui exigent tous que les honoraires soient justes et raisonnables dans les circonstances.

Notes de fin

  1. Ronald D. Manes et Michael P. Silver, Solicitor-Client Privilege in Canadian Law (Toronto : Butterworths, 1993) 181.
  2. Ibid.
  3. Geffen c. Succession Goodman, [1991] 2 R.C.S. 353.
  4. Geffen c. Succession Goodman, [1991] 2 R.C.S. 353, para. 66.
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La meilleure pratique consiste à clarifier par écrit, dès le début du mandat, qui retient vos services :

  • soit les administrateurs personnellement;
  • soit la société;
  • soit les administrateurs et la société, conjointement.

Vous devez vous assurer d’emblée de l’identité de votre client, ou vous serez exposé à un examen ultérieur dont les résultats risqueraient d’être défavorables.

L’arrêt Boreta c. Primrose Drilling Ventures Ltd indique une façon de déterminer qui est le client. La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a examiné la relation entre des avocats externes et des membres d’une société en fonction de critères tant objectifs que subjectifs. Elle s’est demandé quand « une personne raisonnable » se mettant à la place de la société et connaissant tous les faits [TRADUCTION] « arriverait raisonnablement à la conclusion qu’un avocat externe agissait pour le compte de la société » .51 La Cour a aussi examiné la conduite des parties en cause, prenant en compte [TRADUCTION] « toutes les circonstances dans le cadre d’un examen de l’ensemble de la preuve sur la conduite des parties et des documents » .52

Même avec la confirmation écrite des administrateurs et de la société quant à l’identité de votre client ou vos clients, il y a sans doute des questions de privilège et de conflits à gérer.

En supposant que vous avez été retenu par les administrateurs personnellement et non par la société, la société serait considérée comme ayant renoncé aux protections du privilège du secret professionnel si elle vous communique des renseignements. Cependant, les tribunaux canadiens ont démontré une disposition à reconnaître une « exception fondée sur un intérêt commun » à la règle de la renonciation qui serait vraisemblablement d’application dans ce cas. (Voir la question 4.)

Si un intérêt opposé survenait entre la société et les administrateurs, tout renseignement communiqué par une partie à l’autre aurait vraisemblablement perdu son caractère privilégié et pourrait être présenté dans une instance judiciaire entre les parties. Il pourrait toutefois encore être protégé à l’égard de tiers.

Notes de fin

  1. Boreta c. Primrose Drilling Ventures Ltd., [2010] A.J. No. 641, para. 56 (Q.B.).
  2. Ibid., au para. 57.
  3. Voir Fraser Milner Casgrain LLP c. Minister of National Revenue, 2002 BCSC 1344, 6 B.C.L.R. (4th) 135.
+

Est-ce que je peux répondre à ses questions?

Le privilège du secret professionnel entre avocat et client et le devoir de confidentialité persistent après la fin de la relation avocat-client. Le client peut renoncer au privilège ou au devoir de façon explicite ou implicite. Pour déterminer si un client a renoncé à la protection du privilège ou du devoir de confidentialité, le critère est rigoureux.

Le client, étant le « propriétaire » du privilège, doit à la fois :

  1. connaître l’existence du privilège;
  2. manifester clairement son intention de renoncer au privilège.

Il revient au tribunal de déterminer s’il y a eu renonciation volontaire et intentionnelle.

The courts prefer not to interfere with privilege and are reluctant to assume that a waiver is implied. However, the courts have recognized that a waiver may occur for fairness reasons.

Les tribunaux préfèrent éviter d’entraver un privilège et sont réticents à supposer qu’une renonciation a été donnée implicitement. Cependant, ils ont reconnu qu’il peut y avoir renonciation pour des raisons d’équité.

Si l’avocat opposé à votre ancienne cliente vous demande de témoigner, vous devez vous assurer que votre ancienne cliente a de façon valide renoncé au privilège du secret professionnel et au devoir de confidentialité que vous lui devez. Demandez à l’avocat opposé d’obtenir une renonciation par écrit de votre ancienne cliente, par l’entremise du nouvel avocat de votre ancienne cliente. S’il l’obtient, vous pouvez témoigner.

En l’absence de renonciation écrite de la part de votre ancienne cliente, vous devriez indiquer à l’avocat de la partie adverse qu’il faudrait une ordonnance du tribunal autorisant votre témoignage au motif d’une renonciation de la part de votre ancienne cliente sera nécessaire. C’est seulement à cette condition que vous serez libéré de votre devoir de confidentialité et de la contrainte du privilège et que vous pourrez répondre à des questions sur les conseils que vous avez donnés et les instructions que vous avez reçues avant le règlement.

Notes de fin

  1. Ronald D. Manes et Michael P. Silver, Solicitor-Client Privilege in Canadian Law (Toronto: Butterworths, 1993) p. 187.
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Les avocats devraient recourir au chiffrement lorsqu’ils transmettent des communications confidentielles par voie électronique (courrier électronique et documents).

L’utilisation de la formule usuelle « privilégié et confidentiel » au sommet ou au bas du courriel d’un avocat n’assure pas davantage le caractère privilégié et confidentiel du contenu du courriel qu’elle ne le fait dans le cas d’une lettre. Le caractère privilégié et confidentiel est surtout déterminé par la teneur de la communication et l’identité des personnes auxquelles elle est envoyée.

Vous devriez éviter d’envoyer automatiquement et en copie caché à votre client toutes vos communications par courriel avec l’avocat de la partie adverse. Il est bien trop facile pour le client de cliquer par inadvertance sur « Répondre à tous » et d’ainsi envoyer une réponse confidentielle à l’avocat de la partie adverse.

Association du Barreau canadien, Lignes directrices pour un exercice du droit conforme à la déontologie dans le cadre des nouvelles technologies de l’information.55

Note de fin

  1. Respect de l’éthique : exercer le droit avec l’assistance de la technologie