Photo : Elizabeth Wozniak (Ă gauche) et Lori Hill
Elizabeth Wozniak a pris deux dĂ©cisions essentielles au dĂ©but de l’exploitation de son cabinet juridique : elle a dĂ©cidĂ© de se spĂ©cialiser en droit de l’immigration dans le marchĂ© restreint de la Nouvelle-Écosse et d’utiliser des tarifs forfaitaires pour la facturation. Ces changements ont Ă©tĂ© très positifs.
« Les gens me conseillaient de ne pas le faire », dit Me Wozniak, qui facture au forfait depuis 2010. « Nous Ă©tions convaincus que c’Ă©tait la bonne solution, pour la transparence et pour faire correspondre les intĂ©rĂŞts du cabinet avec ceux de nos clients. Plus nous sommes efficients, meilleur c’est, tant pour nous que pour nos clients. J’ai commencĂ© Ă remettre en question les conseils que me donnaient les autres juristes. »
« Lorsqu’on me dit que je ne peux pas faire quelque chose, cela me motive pour faire le saut dans l’inconnu. »
Est-il temps pour votre cabinet de faire un tel saut? Les petits cabinets, particulièrement ceux qui se trouvent sur des marchĂ©s spĂ©cialisĂ©s, peuvent non seulement prospĂ©rer mais Ă©galement ĂŞtre plus souples et mieux s’adapter aux changements du marchĂ©.
Il faut du temps pour dĂ©velopper une pratique spĂ©cialisĂ©e. Il faut commencer par devenir expert dans le domaine visĂ©. Me Wozniak a commencĂ© Ă apprendre le droit de l’immigration au cours de ses Ă©tudes en droit Ă la Schulich School of Law de l’UniversitĂ© Dalhousie oĂą elle a aidĂ© des rĂ©fugiĂ©s en tant que bĂ©nĂ©vole. Après l’obtention de son diplĂ´me en 2001, elle a exercĂ© le droit de la famille dans le cabinet Cragg Law et a Ă©tabli une pratique pro bono en droit de l’immigration.
Lorsque d’anciens rĂ©fugiĂ©s clients ont commencĂ© Ă s’adresser Ă elle car ils souhaitaient faire venir un conjoint ou un proche au Canada, Me Wozniak a dĂ©cidĂ© d’intĂ©grer le droit de l’immigration Ă sa pratique. Il s’agissait d’un domaine du droit qu’elle adorait et dans lequel elle excellait.
« Les gens m’ont dit que je ne devrais pas exercer le droit de l’immigration Ă temps plein, que ce n’Ă©tait pas rentable et que le marchĂ© est trop restreint en Nouvelle-Écosse », dit-elle. « Je recevais de nouveau des conseils contraires Ă mes intuitions. J’y ai beaucoup rĂ©flĂ©chi, puis j’ai dĂ©cidĂ© que c’Ă©tait une bonne idĂ©e. »
En 2012, Me Wozniak a ouvert son propre cabinet juridique spĂ©cialisĂ© en droit de l’immigration. Bien qu’elle se trouve sur un marchĂ© restreint, elle a rĂ©ussi Ă se forger une clientèle stable. Au fil de la croissance du cabinet, le nombre des juristes y exerçant a augmentĂ©. Lori Hill a commencĂ© Ă travailler avec Me Wozniak en 2007 dans le domaine du droit de l’immigration, et deux autres juristes ont Ă©tĂ© engagĂ©s l’an dernier, ainsi qu’un stagiaire. Pour aider Ă gĂ©rer le processus d’embauche, le cabinet a mis en place un comitĂ© de recrutement.
« L’embauche n’a jamais Ă©tĂ© facile, car aucun d’entre nous n’a d’expĂ©rience dans ce domaine », dit Me Wozniak. « Parfois, nous publions une offre d’emploi, d’autres fois c’est le bouche-Ă -oreille. Nous ne savons pas encore ce qui fonctionne le mieux. Nous embauchons des gens qui s’intĂ©ressent au sujet et peuvent travailler en Ă©quipe. Nous avons un système de critique mutuelle et permanente de notre travail, nous ne pouvons donc pas engager de personnes imbues d’elles-mĂŞmes. »
La petite taille a ses avantages. Parce que Me Wozniak est la fondatrice et associĂ©e directrice, c’est Ă elle qu’Ă©choient les tâches « dĂ©sagrĂ©ables », comme le rĂ©seautage, le fait de trouver de nouveaux clients et la rĂ©daction de billets de blogue, qui l’empĂŞchent de travailler sur des dossiers de temps en temps. Cependant, elle a rĂ©ussi Ă mettre sur pied un cabinet oĂą il lui plait de travailler. Elle demeure la seule associĂ©e et a dirigĂ© le changement d’image lorsque le cabinet est devenu North Star Immigration l’an dernier et a lancĂ© un nouveau site Web.
« J’avais vraiment conscience de gĂ©rer un cabinet moderne, je devais suivre Google Analytics et m’assurer de la santĂ© financière du cabinet. Certaines dĂ©cisions quant Ă l’exploitation relèvent uniquement de ma responsabilitĂ© et les autres juristes du cabinet n’ont pas Ă s’en inquiĂ©ter. »
Les cabinets juridiques qui cherchent Ă s’agrandir doivent rĂ©flĂ©chir sĂ©rieusement Ă ce dont ils ont besoin avant de recruter. Me Wozniak recommande de se doter de lignes directrices et d’une stratĂ©gie d’entreprise Ă long terme que le personnel peut comprendre.
« Simplifiez les processus autant que possible pour avoir un système clair », dĂ©clare-t-elle. « Il ne faut pas que la vue d’ensemble vous effraie. Connaissez vos objectifs. En ce qui concerne la technologie, choisissez les solutions que vous pouvez entretenir par vous-mĂŞme facilement et Ă peu de frais ou mieux encore, sans aucuns frais. »
Dale Barrett a une vision claire pour son cabinet de droit fiscal : il veut en faire un lieu oĂą les clients apprennent Ă ne plus craindre les impĂ´ts. Ă€ l’issue de son stage dans le cabinet Torys, il a ouvert Barrett Tax Law en 2008. Ancien ingĂ©nieur informaticien, le droit fiscal l’attirait en raison du besoin de services de conseils fiscaux abordables.
« En droit pĂ©nal, l’intĂ©gralitĂ© du pouvoir d’un gouvernement souverain est axĂ©e sur une personne », dit Me Barrett. « Il y a le risque de poursuites injustes en l’absence d’accès de la personne Ă un avocat. En ce qui concerne les questions fiscales, il n’y a pas d’aide juridique bien qu’un grand nombre de Canadiens et de Canadiennes ne puissent pas se permettre d’engager un avocat fiscaliste pour les dĂ©fendre correctement. C’est très regrettable. »
Me Barrett a commencĂ© tout doucement, acceptant les dossiers qu’il savait pouvoir traiter sans problème. Il a commencĂ© Ă offrir des consultations gratuites et a dĂ©veloppĂ© un service de renvoi avec des comptables de tout le pays, qui lui fournit la plupart de ses clients.
« Je voulais qu’on me perçoive comme Ă©tant plus accessible que mes homologues », dit Me Barrett. « Je ne voulais pas faire peur aux gens, comme c’est le cas de certains autres juristes. Je n’ai jamais Ă©tĂ© le genre Ă instiller la crainte. En vĂ©ritĂ©, dans le domaine fiscal il est très peu probable que les gens se retrouvent en prison. C’est le châtiment rĂ©servĂ© aux cas les plus graves. Les gens doivent le savoir. »
Le cabinet Barrett Tax Law est passĂ© d’un Ă cinq juristes exerçant dans trois bureaux. Pour recruter, il faut ĂŞtre bien prĂ©parĂ©, y compris savoir ce dont vous avez besoin, les compĂ©tences que vous recherchez et les responsabilitĂ©s que le juriste devra assumer.
« L’expansion de votre cabinet n’est pas un processus aisĂ© », dit Me Barrett. « Ce n’est pas le moment d’embaucher n’importe qui, de lui confier tous les secrets de votre rĂ©ussite et de constater un beau jour que la personne quitte le cabinet pour ouvrir le sien et vous faire concurrence. Il est cependant impossible de prendre plus d’ampleur sans l’aide de nouveaux juristes. Il faut donc, en fin de compte, relâcher un peu le contrĂ´le. »
Lorsque vous dĂ©veloppez votre pratique, le temps peut sembler long avant que les clients s’en rendent compte et ne viennent frapper Ă la porte. Ne dĂ©sespĂ©rez pas. Poursuivez sans relâche vos efforts acharnĂ©s pour vous faire remarquer.
« Ne soyez pas frustrĂ© », dit Me Barrett. « Les grands cabinets juridiques ne sont pas nĂ©s en un jour. Je me le rĂ©pète : il a fallu plus de neuf ans au cabinet Tory’s pour atteindre sa taille actuelle. Il faut vous agrandir Ă votre propre rythme. »
Julie Sobowale est une journaliste et une consultante en communications indépendante à Ottawa.