Maints jeunes juristes ont du mal à faire face à un stress important qui finit par les conduire à quitter la profession. Les conflits, les longues heures de travail, les clients exigeants, la concurrence et les pressions constantes pour atteindre la perfection peuvent être stressants, même pour les avocats et avocates les plus endurcis et chevronnés.
Heureusement, il existe de nombreuses façons de composer avec le stress, avant que l’Ă©puisement professionnel s’installe. La plupart commencent par les recettes de base pour combattre le stress, Ă savoir l’activitĂ© physique, une nourriture saine et un nombre d’heures de sommeil adĂ©quat, sans oublier de prendre des vacances, de mĂ©diter, de pratiquer la pleine conscience et de ne pas s’isoler du reste du monde. Cependant, il existe d’autres remèdes.
N’hĂ©sitez pas Ă demander de l’aide, affirme Gary Mitchell, chef de la direction et co-fondateur d’On Trac Coach Ă Vancouver. « N’essayez pas de le faire sans aide. Vous vous croyez peut-ĂŞtre la personne la plus intelligente de la salle, mais ce n’est frĂ©quemment pas le cas parce que d’autres possèdent des compĂ©tences diffĂ©rentes. Recherchez leur prĂ©sence. »
M. Mitchell conseille aux juristes d’Ă©tablir un plan d’affaires afin de les amener Ă penser comme des gens d’affaires « parce qu’un cabinet, c’est une entreprise. Planifiez votre avenir ». Le fait de possĂ©der un plan gĂ©nĂ©ral rĂ©duira un peu la pression. Ă€ court terme, il recommande de dresser quotidiennement une liste de choses Ă faire. Cela vous donne prise sur votre temps, et confiance que vous pouvez gĂ©rer votre journĂ©e.
Le stress est normal
« Nous vivons tous un certain degrĂ© de stress », dĂ©clare Deborah Glatter, directrice, Excellence en pratique, promotion et perfectionnement professionnel dans le cabinet Cassels Brock & Blackwell Ă Toronto. « C’est normal, et ce n’est pas une honte. Il y a des moyens pour y faire face. »
Cependant, les jeunes juristes se refusent gĂ©nĂ©ralement Ă en parler Ă moins que leur cabinet n’ait ouvert la porte sur la discussion en la positionnant dans le contexte social », affirme Mme Glatter. « Ils pensent que d’une certaine façon, ils ne sont pas prĂ©parĂ©s pour cette situation ou ne sont pas Ă la hauteur pour y faire face. Je pense que c’est l’une des raisons pour lesquelles tellement de jeunes juristes quittent la profession. »
Son conseil pour les juristes : « mettez des mĂ©canismes d’adaptation en place, utilisez les ressources disponibles et sachez que vous n’ĂŞtes pas seul ». Parlez avec vos amis juristes Ă propos du degrĂ© de stress qu’ils vivent. « Faire bonne figure pour le client, cela va de soi, mais vos collègues sont aussi stressĂ©s que vous et en parler serait sans doute dĂ©jĂ un dĂ©but de solution. »
Deborah Glatter affirme que les recherches rĂ©vèlent que les juristes sont gĂ©nĂ©ralement des pessimistes ayant une aversion pour le risque. « Je pense que ce sont les Ă©tudes en droit qui nous façonnent sur ce modèle, car vous passez tout votre temps Ă la facultĂ© de droit Ă chercher l’escargot dans la bouteille de bière de gingembre. C’est Ă vous qu’il incombe d’Ă©viter les catastrophes, et du point de vue des juristes, ces dernières ne demandent qu’Ă survenir partout et sans attendre s’ils ne font pas leur travail comme il le faut. » Son cabinet invite des experts Ă parler aux juristes pour les inciter Ă avoir une perspective plus optimiste.
Cassels offre des cours de conversation espagnole pendant le dĂ©jeuner. Cela force les juristes Ă sortir de leur bureau et Ă rencontrer d’autres personnes. Puisque « vous ne pensez pas au travail, vous vous forcez Ă penser Ă autre chose et vous oubliez la pression », dit-elle.
Cultiver la résilience
Valerie Cherneski, une consultante en accompagnement du personnel de direction basĂ©e Ă MontrĂ©al, enseigne aux jeunes juristes Ă exercer leur rĂ©silience. « Plus la rĂ©silience est grande, moins le stress et l’anxiĂ©tĂ© sont Ă©levĂ©s et meilleure est la capacitĂ© Ă composer avec des situations difficiles », dit-elle.
« Le degrĂ© de stress inhĂ©rent Ă la profession juridique est supĂ©rieur Ă celui de maintes autres professions », ajoute-t-elle, et les personnes qui sont plus rĂ©silientes abandonnent moins rapidement la lutte. « Elles fixent des objectifs et les atteignent parce qu’elles peuvent se relever et se remettre en selle en cas d’accident de parcours. »
Selon madame Cherneski, vous devez vous attendre aux accidents de parcours. « Vous allez ĂŞtre confrontĂ© Ă l’ostracisme. Votre charge de travail va vous engloutir. Un associĂ© en colère va vous voler dans les plumes. Un jour ou l’autre, le dossier tant convoitĂ© ne vous sera pas attribuĂ©. » Cela peut souvent dĂ©stabiliser les jeunes juristes, ajoute-t-elle, mais « si vous vous y attendez comme Ă des faits normaux de votre quotidien, il est beaucoup plus facile de les comprendre, de vous ressaisir et de poursuivre votre chemin. »
Cela n’enlève rien Ă vos compĂ©tences ni Ă votre personnalitĂ©, dit-elle. « MĂŞme si vous ĂŞtes le meilleur des avocats, un jour ou l’autre un de vos clients sera contrariĂ©, vous allez vous heurter Ă l’autre partie ou ne verrez pas les choses comme les autres avocats chargĂ©s du dossier. Cela fait partie de la profession. Il est ironique que les juristes ne soient pas formĂ©s dès le dĂ©part de façon Ă s’y attendre. »
La recherche de la perfection et celle de l’excellence ne sont pas la mĂŞme chose, ajoute-t-elle. Recherchez la première et vous ouvrez la porte Ă l’Ă©chec, minant d’avance tous vos efforts. Visez la deuxième en revanche, et vous serez motivĂ©. Tirez les enseignements des expĂ©riences nĂ©gatives et dĂ©cidez « si cela va vous freiner ou vous aiguillonner. » Prenez consciemment des mesures pour aller de l’avant et ne vous appesantissez pas sur le passĂ©.
Accepter, apprendre, se détacher et poursuivre son chemin
Pour vous aider Ă remonter en selle, Mme Cherneski vous conseille de « considĂ©rer les causes sans attendre. Cherchez les raisons pour lesquelles vous vous retrouvez dans cette situation et celles pour lesquelles il vous importe de remonter en selle ». Pensez Ă vos objectifs Ă court et Ă long terme, puis laissez tout cela derrière vous et poursuivez votre chemin. « DĂ©cidez de tirer les enseignements de l’expĂ©rience et utilisez-la pour motiver votre succès au lieu de la laisser vous dĂ©stabiliser. »
Atteindre les objectifs de travail facturable et collaborer avec les meilleurs associĂ©s et clients du cabinet crĂ©ent une pression constante. « Les cabinets sont des lieux oĂą la concurrence est inhĂ©rente, mais si vous tombez dans le piège de rĂ©duire votre motivation Ă cela, vous allez en pâtir et votre degrĂ© de stress et d’anxiĂ©tĂ© va augmenter considĂ©rablement », affirme Valerie Cherneski. Vous comparer avec les autres ne peut que vous dĂ©stabiliser plus facilement. « Consacrez votre temps et votre Ă©nergie très prĂ©cieux Ă votre propre cheminement et Ă votre propre travail. »
Trouvez au moins une façon d’Ă©liminer le stress qui correspond Ă votre style de vie. Certains sont sportifs; les activitĂ©s physiques sont leur solution. Pour d’autres, la pleine conscience et la mĂ©diation sont des exercices simples qui s’intègrent facilement Ă leur routine quotidienne. Votre vie professionnelle ne va pas se simplifier au fil de l’accumulation de l’anciennetĂ©, et votre vie personnelle va se compliquer, alors « si vous dĂ©veloppez une rĂ©silience en tant que jeune juriste, vous agissez directement sur votre capacitĂ© Ă exercer le droit avec succès et Ă avoir une vie gratifiante », affirme Mme Cherneski.
Ann Macaulay est une journaliste indépendante basée à Toronto.