En 2003, lorsque Meldon Ellis est revenu Ă Vancouver pratiquer le droit après avoir passĂ© quelques annĂ©es Ă exploiter une entreprise de paris en ligne Ă Antigua, il Ă©tait dans une impasse. « J’avais besoin d’idĂ©es fraĂ®ches sur la façon de relancer ma carrière en droit », dit-il. Il a crĂ©Ă© son propre cabinet au dĂ©but de 2004 avec un seul dossier, mais sa plus grande difficultĂ© Ă©tait de maintenir sa motivation.
C’est alors que Linda Robertson est entrĂ©e dans sa vie pour le coacher en vue d’Ă©laborer un plan stratĂ©gique personnel. Elle l’a aidĂ© Ă dĂ©couvrir ses forces et ses faiblesses et Ă dresser l’inventaire de ses compĂ©tences. M. Ellis affirme que mĂŞme s’il savait qu’il devait formuler un plan d’entreprise et obtenir du travail, il se dĂ©courageait et se laissait facilement distraire de la tâche parce qu’il Ă©tait seul. Le fait de travailler Ă une stratĂ©gie avec Mme Robertson lui a donnĂ© un but et un sens personnel de responsabilitĂ©. « Un Ă©lĂ©ment important a Ă©tĂ© de m’engager envers une autre personne Ă faire ce que je devais. »
Dans l’annĂ©e suivant sa pĂ©riode de coaching avec Mme Robertson, M. Ellis a absorbĂ© une autre pratique et rĂ©ussi la transition d’avocat autonome Ă l’embauche d’un associĂ© et d’employĂ©s. Il estime que l’expĂ©rience de coaching a Ă©tĂ© extrĂŞmement prĂ©cieuse : Mme Robertson lui a apportĂ© de l’appui en mĂŞme temps qu’un modèle d’entreprise, l’occasion de brasser des idĂ©es et un sens de l’importance de la stratĂ©gie et de la planification.
M. Ellis affirme qu’en travaillant avec un coach, il faisait du remue-mĂ©ninges sur son orientation stratĂ©gique une heure Ă la fois. « C’est très difficile Ă faire lorsque vous ĂŞtes tout seul ou occupĂ© Ă autre chose, dit-il. Il est indiscutable que j’ai rĂ©ussi Ă dĂ©velopper cette entreprise plus rapidement que je ne l’aurais fait en m’en remettant Ă mes seuls moyens. »
Pourquoi un coach?
Les coachs d’avocats sont des professionnels qui conseillent les avocats sur divers aspects de leur vie de juriste y compris les buts, la gestion du temps, le cheminement de carrière, les relations avec les collègues et les relations avec les clients. Les meilleurs coachs ont obtenu une formation accrĂ©ditĂ©e auprès d’Ă©coles agrĂ©Ă©es par l’International Coaching Federation, y compris l’Institut Hudson et l’UniversitĂ© Royal Roads.
Un coach travaille avec un avocat sur une base personnelle afin d’en arriver aux meilleures solutions pour le travail, la carrière et la vie de cette personne. Le but ultime consiste Ă l’habiliter Ă poursuivre le processus par ses propres moyens. Les coachs travaillent aussi avec des groupes d’avocats, comme des Ă©quipes du contentieux ou des groupes d’associĂ©s, afin de promouvoir la communication et le travail d’Ă©quipe.
Les avocats sont de plus en plus nombreux Ă dĂ©couvrir que le coaching personnel est un moyen très efficace de rehausser leur carrière. Comme les Ă©lĂ©ments essentiels de la carrière d’un avocat sont personnels – personnalitĂ©, ambitions, prĂ©fĂ©rences et objectifs –, il est logique qu’un coaching individuel et personnalisĂ© soit le moyen le plus efficace d’arriver rapidement Ă destination.
La formation Ă l’intention des juristes a traditionnellement Ă©tĂ© prodiguĂ©e par des professionnels, y compris des spĂ©cialistes en marketing ou des experts-conseils en gestion, qui analysent une situation et prescrivent ce qui est nĂ©cessaire. « Le coaching fonctionne diffĂ©remment », affirme la coach Allison Wolf, de Vancouver. Il suppose la crĂ©ation d’un partenariat avec les clients, et il aide les clients Ă exprimer leur sagesse en posant des questions stratĂ©giques. C’est ainsi que les clients arrivent Ă trouver eux-mĂŞmes les meilleures rĂ©ponses. « Vous valorisez l’expĂ©rience et la mine de connaissances de votre interlocuteur, dit Mme Wolf. Vous ajoutez votre propre expĂ©rience dans le domaine. Vous l’aidez et le guidez de façon Ă ce qu’il prenne les meilleures dĂ©cisions stratĂ©giques face au dĂ©fi qu’il a Ă relever. Essentiellement, vous l’aidez Ă apprendre. »
Ce que Mme Wolf entend le plus souvent de la part de ses clients est : « Je suis face Ă un mur. Je ne sais pas que faire. » Elle leur donne des commentaires et partage sa propre expĂ©rience. Dans la relation avec un client, la clĂ© consiste Ă jeter des bases de confiance, d’honnĂŞtetĂ© et d’ouverture. Le client doit exprimer sans rĂ©serve ses pensĂ©es ou idĂ©es sur une situation.
Selon Mme Wolf, la formation offerte se rĂ©sume Ă un principe simple : « Il s’agit de demander, pas d’affirmer. Au contraire, les experts-conseils affirment. Un coach aide la personne Ă vĂ©ritablement trouver elle-mĂŞme l’information nĂ©cessaire, de sorte qu’elle apprenne Ă rĂ©gler ses problèmes. »
Mme Wolf ajoute que : « Le coaching s’appuie sur le principe de l’apprentissage dans l’action selon lequel pour rĂ©ellement savoir quelque chose, une personne doit l’apprendre. Le coaching n’est pas remĂ©diateur. Le coaching n’est pas utile Ă ceux qui ne peuvent simplement pas se dĂ©brouiller seuls. Le coaching convient aux personnes les plus performantes. Tiger Woods a un coach; c’est une solution pour ceux qui veulent vĂ©ritablement passer au niveau supĂ©rieur. »
Demande en hausse
La demande de coaching spĂ©cialisĂ© augmente Ă mesure que des professionnels performants dĂ©couvrent ses avantages. « Le monde des entreprises voit dans le coaching un avantage concurrentiel, dit Mme Robertson. Vous voulez des rĂ©sultats en termes de changement de comportements, et le coaching est la façon la plus efficace d’y arriver. C’est pourquoi le monde des entreprises a vĂ©ritablement adoptĂ© le coaching et c’est pourquoi un nombre croissant de cabinets d’avocats y souscrivent. Le coaching est une façon d’amener votre pratique au niveau supĂ©rieur. »
Mme Robertson travaille avec des avocats qui ont divers genres de difficultĂ©s, y compris des problèmes liĂ©s au stress et Ă la gestion du temps. Un de ses services les plus apprĂ©ciĂ©s est d’aider les avocats Ă amĂ©liorer l’enregistrement de leurs heures et leurs pratiques de facturation. « Je veux que grâce Ă l’amĂ©lioration de votre facturation, votre cabinet rĂ©cupère chaque sou qu’il me verse pour le coaching, dit-elle Ă ses clients. Vous enregistrerez et facturerez davantage d’heures après que vous aurez fait quelques sĂ©ances. »
Mme Robertson, coach d’avocats et experte-conseil en matière de pratique, est bien placĂ©e pour coacher des juristes : elle a elle-mĂŞme pratiquĂ© comme avocate chevronnĂ©e pendant 24 ans. Après avoir Ă©tĂ© avocate gĂ©nĂ©rale auprès d’une grande entreprise, elle est devenue vice-prĂ©sidente principale responsable des affaires juridiques et des ressources humaines. Elle raconte qu’elle s’est sentie « submergĂ©e ». C’est alors que son PDG lui a dit qu’elle avait besoin d’un coach pour l’aider Ă maĂ®triser son nouveau travail, Ă fixer des prioritĂ©s et Ă bien utiliser son temps. « L’expĂ©rience a Ă©tĂ© excellente; elle m’a sauvĂ©e, se rappelle-t-elle. J’aurais probablement dĂ©missionnĂ© parce que je ne parvenais pas Ă prendre le dessus tant j’en avais Ă faire. »
Mme Robertson affirme que le mentorat a toujours Ă©tĂ© important pour aider les jeunes avocats Ă devenir efficaces, mais de nombreux avocats expĂ©rimentĂ©s n’ont plus le temps de s’y prĂŞter. « Les coachs comme moi comblent un Ă©norme besoin en discutant avec les jeunes associĂ©s et en les aidant Ă obtenir ce genre de coaching et de mentorat qu’ils n’ont peut-ĂŞtre jamais reçu, dit-elle. De plus, je suis de l’extĂ©rieur donc ils peuvent ĂŞtre plus ouverts et candides avec moi qu’ils ne le seraient jamais avec un mentor de l’intĂ©rieur. »
La pratique du droit peut ĂŞtre une profession isolatrice et solitaire, et il est difficile d’obtenir de l’appui et des conseils de collègues qui sont toujours occupĂ©s. Mme Robertson estime que ses clients « sont reconnaissants de pouvoir discuter des problèmes et trouver une solution plutĂ´t que simplement rester avec leurs difficultĂ©s annĂ©e après annĂ©e. »
Créer une relation
Le coaching est une expérience plus profonde que la formation ou la consultation. Un cours renseigne sur un sujet donné, et un consultant guide les clients quant à la meilleure démarche face à un problème. En revanche un coach travaille avec la personne pour cerner ses besoins et buts précis, et lui offre un soutien et un engagement durables.
En tant qu’alliĂ© et partenaire source d’appui, un coach pose des questions qui permettent de reconnaĂ®tre les obstacles, puis Ă©labore avec le client des stratĂ©gies sur la voie Ă suivre et les solutions aux problèmes. « Mais il faut que ce soit sa stratĂ©gie, insiste Mme Robertson. Je peux prĂ©senter de nombreuses suggestions selon ce qui a Ă©tĂ© efficace pour moi ou pour d’autres clients, mais je veux que chaque client comprenne ce qui sera efficace pour lui. C’est ce qui fait la valeur du coaching : le client Ă©labore une stratĂ©gie – et bien sĂ»r j’offre des suggestions – qui sera efficace pour sa personnalitĂ©. »
Le coaching peut se faire en personne ou par tĂ©lĂ©phone. Mme Robertson a coachĂ© des avocats qu’elle n’a jamais rencontrĂ©s en personne, et elle affirme que c’est tout aussi efficace au tĂ©lĂ©phone qu’en personne. Elle ajoute que bon nombre de ses clients avocats prĂ©fèrent le coaching au tĂ©lĂ©phone en raison du facteur confidentialitĂ© : une fois qu’ils ferment la porte de leur bureau, personne n’a besoin de savoir qu’ils discutent avec un coach plutĂ´t qu’avec un client.
Lorsqu’elle fait du coaching pour une Ă©quipe, Mme Robertson commence par rencontrer chacun de ses membres individuellement, puis elle observe silencieusement une rĂ©union d’Ă©quipe pour constater les interactions entre les membres et les problèmes qui se posent – comme des problèmes de leadership ou des gens qui n’arrivent pas Ă l’heure, ne viennent pas du tout ou viennent sans ĂŞtre prĂ©parĂ©s. Elle formule ensuite des suggestions Ă partir de ce qu’elle a observĂ©. « Je m’assieds avec eux et nous formulons ensemble une stratĂ©gie. Je n’arrive pas en disant “Vous devez faire ceci et cela.” Je m’arrange pour qu’ils trouvent eux-mĂŞmes les solutions. Je facilite les conversations pour qu’ils comprennent ce qu’ils doivent faire diffĂ©remment pour augmenter leur efficacitĂ© commune. »
Ayant travaillĂ© au sein d’une entreprise qui mettait l’accent sur le travail d’Ă©quipe, Mme Robertson dit qu’elle a reçu beaucoup de formation sur la façon dont les gens peuvent coopĂ©rer et travailler efficacement en Ă©quipe. Mais les avocats ne sont pas nĂ©cessairement habituĂ©s Ă se percevoir comme membres d’une Ă©quipe. « Les partenariats de coaching sont très diffĂ©rents, fait-elle remarquer. Les avocats se considèrent souvent comme un groupe de personnes indĂ©pendantes qui partagent des bureaux. Alors, c’est un tout autre dĂ©fi que de les amener Ă se voir comme une Ă©quipe et Ă travailler davantage ensemble pour assurer le progrès du cabinet. »
Le coaching comme outil de conservation des avocats
MĂŞme si le coaching est de plus en plus apprĂ©ciĂ© des avocats, la profession juridique continue d’accuser en la matière un retard sur le reste du milieu des entreprises au Canada. De nombreuses grandes organisations d’une variĂ©tĂ© de secteurs ont adoptĂ© le coaching il y a une dĂ©cennie ou plus et ont en consĂ©quence augmentĂ© leur productivitĂ© et leur soliditĂ© organisationnelle. Alors qu’il devient de plus en plus difficile pour les cabinets d’attirer et de conserver des avocats de premier plan, le coaching est un outil qui peut aider Ă dĂ©marquer les avocats – et leurs cabinets – sur le marchĂ©.
« Un des plus grands dĂ©fis que les avocats doivent relever est qu’en sortant de l’Ă©cole avec leur diplĂ´me en droit, les cabinets dans lesquels ils atterrissent s’attendent essentiellement Ă ce qu’ils apprennent par osmose, dit Mme Wolf. Le coaching offre des possibilitĂ©s de formation et d’apprentissage sur place, dans le cadre des activitĂ©s bourdonnantes de la vie quotidienne. Il se dĂ©veloppe partout au monde et dans toutes les professions. »
Selon la coach Joan Paul, de Calgary, l’industrie du coaching continuera sans doute de se dĂ©velopper dans les prochaines annĂ©es. Elle prĂ©cise que la recherche confirme l’excellent rendement du capital investi dans le coaching. « La satisfaction au travail augmente sensiblement. Les relations avec les patrons et les collègues s’amĂ©liorent grandement. Le tout rehausse la rentabilitĂ©. »
Comme il est si important de recruter et de conserver des avocats de qualitĂ©, Mme Paul conseille aux cabinets d’organiser des programmes de coaching pour les associĂ©s. Alors que les cabinets peinent Ă trouver et retenir des collaborateurs de premier plan, dit-elle, le coaching est pour eux « un excellent moyen de se distinguer, surtout si on considère qu’il s’agit d’un investissement dans les plus jeunes et pas uniquement dans les cadres supĂ©rieurs. »
Les cabinets « peuvent en faire profiter les gens au dĂ©but de leur carrière et les aider Ă comprendre ce qu’il faut pour devenir un associĂ© dans un cabinet, ce qu’il faut pour dĂ©velopper ses aptitudes en leadership, et comment il faut se comporter dans un cabinet pour y connaĂ®tre le succès. »
D’ajouter Mme Paul, « Il ne s’agit pas simplement de faire plaisir aux gens, et il ne s’agit pas seulement d’aider Ă recruter et conserver des avocats. Il s’agit rĂ©ellement de se distinguer, et c’est utile pour produire des rĂ©sultats. Plus il y a de clartĂ© sur ce qu’ils veulent et sur la façon de fixer des buts pertinents, plus ils risquent de rĂ©ussir. »
Ann Macaulay est rédactrice à Toronto.