Par Amilah Abd-Al-Rashid et Amélie Cournoyer
En tant qu’adjointes à la recherche juridique et communautaire dans le cadre du projet « Soutien à l’exploitation inclusive des ressources en Afrique de l’Est » (SEIR), nous avons appuyé les activités du projet pendant un mois dans le comté de Kwale, au Kenya. Le SEIR est un projet financé par Affaires mondiales Canada et mis en œuvre par l’ABC en partenariat avec plusieurs barreaux de l’Afrique orientale.
Lors de notre arrivée en novembre, nous sommes allées sur le terrain pour consulter les organisations ancrées dans la communauté et les pouvoirs publics locaux afin d’évaluer les incidences du secteur de l’extraction sur la vie des résidents, plus particulièrement celle des femmes.
Pendant notre première semaine, nous avons assisté à une série d’activités communautaires organisées par Transparency International Kenya dans le cadre de la mise en œuvre du programme Mining for Sustainable Development Programme (M4SD). Les dirigeants communautaires ont eu l’occasion de participer à une discussion ouverte avec les représentants de la principale société minière locale, Base Titanium, ainsi qu’avec ceux du Ministry of Petroleum and Mining. Ces efforts de collaboration déployés sous la tutelle du SEIR et du programme M4SD ont pour objectif l’autonomisation des personnes touchées par le développement du secteur primaire.
Nous avons ensuite recentré notre attention sur des consultations avec des membres d’organisations ancrées dans la communauté, des groupes de femmes et des services publics. Nous avons rencontré plusieurs dirigeantes qui font partie du Kwale Community Referral Pathway. Ce réseau d’entités privées et publiques est à la disposition des membres de la communauté pour les aider à régler des questions connexes, entre autres, aux services de santé et de bien-être des enfants, aux droits fonciers et aux préoccupations environnementales.
Les femmes du comté de Kwale sont fréquemment limitées par le risque d’ostracisme social, de division de leur famille et de leur vie de famille, et par la crainte que leur inspirent les contrevenants. L’autonomisation des plaignantes est une question à aborder avec la plus grande prudence dans une société où se mêlent intimement la religion et la culture fondée sur le patriarcat. Nous avons eu le privilège de nous entretenir avec l’agente Rael Rotich, qui dirige le bureau du genre du commissariat de police de Msambweni (Msambweni Police Station Gender Desk). Elle organise des activités de sensibilisation au cours desquelles elle explique le processus du dépôt d’un rapport de police et, plus important encore dans le contexte de Kwale, la manière de le faire en toute confidentialité.
L’agente Rotich s’efforce de recueillir des éléments de preuve solides et crédibles dans les situations où la preuve disponible est rare. Ainsi, les personnes qui allèguent avoir été violées sont souvent obligées d’attendre plusieurs jours avant que l’accusé ne quitte leur résidence, ce qui limite la preuve qui peut être recueillie dans un hôpital. En outre, on ne peut se fier à la disponibilité des témoins puisqu’un grand nombre d’entre eux sont intimidés par la communauté ou craignent d’en être rejetés. Eu égard à la nature des crimes sexospécifiques et de la situation culturelle dans le comté de Kwale, les efforts de sensibilisation sont un moyen efficace pour aller de l’avant et autonomiser les femmes.
Au cours de nos deux dernières semaines, nous avons appuyé des activités de représentation des femmes et de formation sensible au genre prodiguée à des juristes bénévoles qui fournissent des services juridiques bénévoles au moyen de cliniques mobiles et de consultations privées. Nous avons également abordé la question de la manière dont les femmes se réapproprient leur droit d’être indemnisées dans le cadre de litiges fonciers en se fondant sur la Matrimonial Property Act du Kenya et sur d’autres mécanismes juridiques novateurs.
Amélie Cournoyer et Amilah Abd-Al-Rashid sont des stagiaires de la promotion 2018-2019 du Programme international des jeunes juristes. Elles ont respectivement travaillé à Transparency International Initiative Madagascar à Antananarivo et au South African History Archive à Johannesburg.
Les bénévoles de l’ABC, Amilah Abd-Al-Rashid (gauche) et Amélie Cournoyer (droite) ont rencontré l’agente Rael Rotich du Msambweni Police Station Gender Desk dans le cadre de leurs travaux connexes au SEIR. Le Gender Desk fait partie du Kwale Community Referral Pathway.