Lorsqu’en septembre le ministère des Finances a publié un projet de loi visant à limiter le recours à la comptabilité fondée sur la facturation, l’ABC a été ravie de constater que le gouvernement avait pris des mesures pour régler l’une de ses principales préoccupations soulevées par les changements.
Quand le gouvernement a annoncé, dans le cadre du budget 2017, son intention de modifier la comptabilité fondée sur la facturation et les modalités de l’imposition des travaux en cours, l’ABC a affirmé que la période de deux ans prévue pour la mise en œuvre était largement trop courte eu égard à la quantité de travaux en cours qui pourraient être visés par une imposition imprévue et accélérée. Le projet de loi modifie la période de mise en œuvre pour la faire passer de deux à cinq ans.
« L’ABC est ravie de constater l’allongement de la période de transition », a écrit la présidente de l’ABC, Kerry Simmons, c.r., au ministre des Finances, Bill Morneau. « Une période de transition de cinq ans atténuera en outre, tant pour les cabinets juridiques que pour les clients, les importants frais connexes à la conformité et à l’administration. Nous savons gré au gouvernement d’avoir tenu compte de notre recommandation et l’en remercions. »
Ceci dit, il y a encore des questions en matière d’accès à la justice. Les modifications de la Loi de l’impôt sur le revenu pourraient malgré tout compliquer la tâche des juristes qui souhaiteraient travailler pour des clients n’ayant pas la capacité financière de payer immédiatement. Pour réduire les risques que la législation n’entrave involontairement l’accès à la justice, l’ABC a réitéré ses recommandations antérieures.
- Le gouvernement devrait préciser que la proposition d’abolir la méthode de comptabilité fondée sur la facturation sera sans conséquence pour trois types d’ententes de paiement – les ententes classiques d’honoraires conditionnels, les ententes de facto sur des honoraires conditionnels et les ententes de paiement différé. (L’Agence du revenu du Canada a confirmé que les modifications de la comptabilité fondée sur la facturation ne devraient avoir aucune répercussion sur les ententes d’honoraires conditionnels. Cependant, la portée des directives de l’ARC demeure floue.)
- La Loi de l’impôt sur le revenu devrait énoncer clairement les principes s’appliquant à la comptabilisation des travaux en cours.
- Une exception de minimis devrait être prévue pour les petites entreprises juridiques comme solution pratique pour exclure les cas où les exigences de conformité et les frais d’administration seraient exagérés par rapport aux recettes fiscales prévues.
« La proposition d’abolir le recours à la comptabilité fondée sur la facturation revient, aux yeux de bien des juristes, à les obliger à payer des impôts sur des revenus qui ne seront réalisés qu’au terme de plusieurs années, voire jamais, ou sur des revenus si incertains qu’on ne peut les quantifier », a écrit la présidente de l’ABC. « À l’heure actuelle, les avocats et les avocates rendent service à bien des clients qui ne sont pas en mesure de payer leurs services dès l’attribution du mandat, en proposant différents types d’ententes de paiement différé; d’où un volume passablement élevé de travaux en cours. »
Le montant qu’un juriste facturera en fin de compte au titre des travaux en cours et le moment auquel il dressera la facture sont fréquemment tributaires d’événements à venir et de maints éléments qui échappent à son contrôle, affirme la lettre. Qui plus est, les honoraires facturés au client dépendent de nombreux facteurs et ne sont pas nécessairement liés au temps que l’avocat ou toute autre personne a effectivement consacré au dossier du client.
L’ABC loue l’objectif d’équité fiscale, mais affirme que le gouvernement propose de modifier fondamentalement une pratique de longue date, ce qui pourrait, pour les personnes qui recherchent des services juridiques, avoir de profondes répercussions tout à fait imprévues.
« La consignation de tous les revenus d’entreprise selon la méthode de la comptabilité d’exercice et le parfait rapprochement des dépenses et des revenus peuvent sembler être un signe d’équité, mais nous croyons que le système fiscal doit être assez souple pour tenir compte des différences entre les sphères d’activité professionnelle (et des raisons expliquant ces différences). Pour la profession juridique, nous sommes d’avis que le fisc doit reconnaître le caractère unique de la relation avocat-client et l’importance de cette relation pour l’accès à la justice. »