Le coût par rapport à la valeur est l’une des principales oppositions qui se joue au sein de la politique d’immigration du Canada. La crainte que les immigrants de la catégorie du regroupement familial seront un fardeau pour l’économie sans y contribuer tend à prévaloir sur toute considération quant à la valeur qu’ils apporteront.
« Les avantages économiques, sociaux et culturels de la réunification des familles sont sous-estimés, surtout lorsque leur analyse tient compte de plusieurs générations », affirme la Section du droit de l’immigration dans un mémoire rédigé dans le cadre de l’étude sur la réunification des familles menée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration. Le président de la section, Vance Langford, a comparu devant le Comité à la fin octobre. (Il a en outre accordé une brève entrevue au magazine ABC National, disponible uniquement en anglais sur nationalmagazine.ca)
La section appuie le principe de la réunification des familles en tant qu’objectif de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, et a plusieurs idées pour améliorer un processus semé d’embûches qui peut largement excéder les limites raisonnables du temps nécessaire et de la patience.
L’impression que les parents et les grands-parents vont soumettre le « filet social » canadien à des pressions excessives est l’un des obstacles les plus importants à l’acceptation des immigrants de la catégorie du regroupement familial; impression que ne justifie pratiquement aucune preuve tangible.
« Des études récentes indiquent qu’on oublie souvent l’effet positif net des contributions non économiques des parents et des grands-parents sur l’économie, notamment la garde d’enfants, l’aide aux entreprises familiales, le soutien émotionnel, l’éducation culturelle, le bénévolat, le maintien de la cohésion sociale et l’entretien ménager – en plus de leur éventuel apport financier », ajoute la section.
Les quotas restrictifs constituent un autre obstacle, car ils se traduisent par une durée de traitement des demandes comptée en années, ce qui crée des difficultés émotionnelles pour les familles et réduit le caractère attirant du Canada en tant que destination pour l’immigration. Ainsi, le temps actuel de traitement pour l’adoption d’enfants haïtiens est de 41 mois, dit la section.
« Pendant ce temps, les enfants peuvent être séparés longtemps de leurs parents adoptifs, ou les parents peuvent se voir obligés de quitter le Canada pour vivre avec leur enfant à l’étranger, ce qui risque de leur faire perdre le droit de parrainer l’enfant. »
L’accroissement du nombre actuel d’immigrants à 360 000, soit juste un pourcent de la population canadienne actuelle, appuierait la réunification familiale sans avoir d’incidence sur le nombre des immigrants relevant des catégories de l’immigration économique et de celles admises pour des raisons humanitaires, affirme la section.
Le Programme du super visa est utile pour aider les parents et grands-parents à entrer sur le territoire de façon temporaire, mais il ne devrait pas être considéré comme une solution de rechange au Programme de parrainage des parents et des grands-parents, dit la section. « Bien que le Programme du super visa ait allégé quelque peu la pression subie par les familles canadiennes […] il y a eu des pauses temporaires concomitantes dans la réception des demandes ainsi que des files d’attente et des délais de traitement déraisonnables dans le cadre du Programme de parrainage des parents et des grands-parents », déclare la section. Le nombre actuel de demandes au titre de ce programme approche 80 000, avec un temps de traitement allant de trois à cinq ans dans certains cas. La section recommande, entre autres mesures, que le gouvernement réduise les files d’attente et garantisse des délais de traitement de deux ans au plus.
Les obstacles à l’immigration des conjoints et partenaires peuvent inclure des « rejets sporadiques et souvent inexpliqués de demandes de visa de résident temporaire », des évaluations « déraisonnables et incohérentes » d’éléments tels que la cohabitation ou l’authenticité des relations conjugales, l’intention de retourner au Canada, et un manque de droit de faire appel de décisions de rejet de demandes de résidence permanente présentées à l’intérieur des frontières canadiennes.
« Par conséquent, les époux risquent d’être séparés pendant des années, ce qui nuit sérieusement à leur relation et à leur capacité de s’établir et d’apporter des contributions concrètes au Canada. »
La section est d’avis qu’un grand nombre de ces obstacles peuvent être surmontés grâce à des mesures aussi simples que la formation des agents, la prise de décisions harmonisées et de meilleures possibilités d’interjeter appel.
Elle recommande en outre l’abrogation de l’alinéa 117(9)(d) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés qui porte sur les déclarations trompeuses. La disposition est excessivement large, selon la section, car une famille pourrait être séparée à titre permanent en raison d’une erreur de bonne foi telle que celle résultant de la confusion engendrée par l’expression « conjoint de fait ».
Les autres recommandations concernant le parrainage sont les suivantes :
- une plus grande souplesse et l’autorisation du parrainage des enfants adoptés, y compris une meilleure coordination avec les pouvoirs provinciaux;
- un examen des circonstances dans lesquelles les considérations d’ordre humanitaire peuvent justifier l’approbation des demandes concernant des enfants à charge ou adoptés, les membres d’une fratrie et autres membres de la famille;
- envisager d’abaisser l’âge pour le parrainage;
- le seuil financier exigé pour le parrainage devrait refléter le coût de la vie locale;
- pour les parents et les grands-parents, il devrait être tenu compte de la capacité du demandeur à être autonome au Canada, de ses actifs financiers et de ses apports non économiques
- l’application uniforme, dans tous les bureaux délivrant les visas, d’une norme de temps de traitement d’un an à partir du moment où la demande est complète.